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CONSEIL D'ADMINISTRATION : LES MODES DE DÉLIBÉRATION DOIVENT ÊTRE PRÉVUS PAR LES
STATUTS
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par
Le fonctionnement du Conseil
d’administration est soumis au principe de liberté contractuelle qui permet à
une association de décider elle-même, dans ses statuts ou son règlement
intérieur, des règles d’organisation du Conseil d’Administration (CA) et de ses
pouvoirs[1]. La Cour d’Appel de Rennes vient à
ce titre de rendre un arrêt rappelant la primauté des statuts concernant la
forme des délibérations du Conseil d’Administration[2].
Le
Conseil d’Administration d’une association, bien que son existence ne soit, en
principe, pas obligatoire, reste pourtant un organe collégiale incontournable
de direction. Traditionnellement, il joue un rôle de relais entre les membres
de l’association et le Bureau (composé notamment du Président). Son rôle se
caractérise par une mission d’animation, en déterminant notamment les grandes
lignes du projet associatif, et par une mission de contrôle et de surveillance.
1. Rappel : le principe de liberté
contractuelle dans l’organisation du Conseil d’Administration
Comme
le prévoit le principe de liberté contractuelle énoncé ci-dessus,
l’organisation du Conseil d’Administration d’une association est fixée par les
statuts, et peut être, le cas échéant, complétée, par un règlement intérieur.
Ces
textes doivent nécessairement prévoir un nombre non négligeable de dispositions
dans la mesure où, comme nous le verrons ci-dessous, ils constituent l’ossature
de l’association, et a fortiori du Conseil d’Administration, dont on
ne saurait pouvoir se départir.
Dès
lors, il sera fixé à l’occasion, par exemple, le nombre minimum et maximum
d’administrateurs, la composition du Conseil, le lieu et la périodicité des
réunions, etc.
Les
statuts devront également définir les modalités relatives à la prise de
décisions du Conseil d’Administration : modalités de convocation du CA, règles
de quorum, mode de scrutin, ou encore nombre de voix dont dispose chaque
administrateur.
A
ce titre, les règles énoncées peuvent être plus ou moins contraignantes, selon
que l’association se trouve dans un fonctionnement démocratique[3]ou non. Aucune règle, si ce n’est
lorsque l’ordre public s’en trouve menacé, n’est, en soi, interdite.
Trop
imprécis, les statuts ne permettront pas un fonctionnement optimal de
l’association, laissant la porte ouverte aux contestations. Trop précis, ils
rendent nécessaires des modifications statutaires régulières dont la procédure
est lourde (en particulier pour les associations reconnues d’utilité publique).
Question
de dosage.
A
noter qu’à défaut de précisions dans les statuts, l’analyse des dispositions
statutaires relève du pouvoir souverain des juges du fond[4].
2. Les statuts, une vérité
inviolable
La
question posée par l’affaire faisant l’objet de l’arrêt par la Cour d’Appel de
Rennes tient au fait de savoir s’il est possible de s’affranchir des règles
imposées par les statuts dans le cadre des délibérations du Conseil
d’Administration.
En
l’espèce, le Conseil d’Administration avait expressément habilité son Président
à agir en justice, en première instance, au nom de l’Association. Une décision
avait été rendue et il s’agissait alors pour le Conseil d’Administration de se
prononcer sur l’opportunité de faire appel ou non.
Le
compte rendu du Conseil d’Administration, délivré aux membres, indiquait que
l’organisme allait effectivement faire appel de la décision judiciaire, en ces
termes :
« Après
consultation du Conseil, le président a établi contact téléphoniquement avec
les membres du CA sur l’opportunité de faire appel. Sur les 10 avis (…) 2
contre, 1 abstention, 7 pour.
Les pouvoirs ont
été donnés afin que cette réunion entérine la décision de faire appel et de
donner au président en exercice ou aux vice-présidents le mandat de représenter
l’association dans cette démarche ».
Or,
il se trouve que les statuts de ladite association ne prévoient pas que le
Conseil d’Administration puisse se tenir dans le cadre d’une réunion téléphonique, au cours de
laquelle aurait eu lieu une délibération.
Prenant
acte, dès lors, qu’aucun mandat n’a
été valablement reçu par le Président du Conseil d’Administration pour faire
appel, la Cour d’Appel de Rennes rejette l’action de l’association au motif
qu’elle est donc irrecevable.
Cette
jurisprudence illustre en réalité une solution constante. En effet, toute
décision adoptée dans des conditions irrégulières est annulable à la demande
d’un administrateur ou d’un membre de l’association[5].
Nous
rappellerons ici toutefois que l’annulation des délibérations n’est pas
prononcée par les juges judiciaires si l’irrégularité n’a pas eu d’incidence
sur les délibérations ou les votes. Par exemple, est validée une décision adoptée
à 15 voix pour, une voix contre et 7 abstentions par un comité composé
irrégulièrement de 23 membres au lieu de 15 car, même si l’on admet que les 8
membres excédentaires ont tous voté pour, il n’en reste pas moins que,
abstraction faite de leurs voix, le vote est largement acquis[6].
Rédiger
des statuts clairs et précis est donc une première étape vers la réussite d’un
projet associatif. Reste ensuite à s’y conformer strictement.
Anthony BERGER, Avocat NPS
CONSULTING
Les Notes:
[1]Principe
de liberté contractuelle issu de la loi du 1erjuillet 1901
[2]CA
Rennes, 12 avril 2018, n°16/08140
[3]En
application de l’article 1, I, 2° de la loi n°2014-856 du 31 juillet 2014
relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) : pour appartenir au secteur
d’ESS les associations à caractère économique doivent adopter un mode de
gouvernance démocratique : « Une gouvernance
démocratique, définie et organisée par les statuts, prévoyant l’information et
la participation, dont l’expression n’est pas seulement liée à leur apport en
capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des
salariés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise »
[4]Cass.
1èreciv., 17 fév. 2016, n°15-11.304
[5]Par
exemple, voir Cass. 1èreciv., 3 mai 2006, n°03-18.229 pour une délibération
votée par un Conseil d’administration convoqué par une personne n’ayant pas
qualité pour y procéder.
[6]Cass. Soc., 1erdéc. 1966, Bull. civ. V, n°920
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