DROIT, SCIENCES SOCIALES ET POLITIQUES
SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION
L’APPLICATION DU DROIT DES SOCIETES AUX
ASSOCIATIONS
Présenté
par
Jacques - Brice
MOMNOUGUI
Mémoire
pour l’obtention du Master II Droit privé fondamental : Dominante Droit des
affaires
Sous la direction de Mme Florence Deboissy
Professeur à l’Université Montesquieu – Bordeaux IV
Année
Universitaire 2006 – 2007
Liste des abréviations
AJ
Actualité Juridique
Al.
Alinéa
Art.
Article
Ass. Plén. Assemblée
plénière
Bull.
Bulletin des arrêts de la Cour de
cassation
BODACC Bulletin officiel des annonces civiles et
commerciales
Bull.
Joly
Bulletin Joly
Cass.
civ.
Cour de cassation,
chambre civile
Cass.
com.
Cour de cassation,
chambre commerciale
Cass.
soc.
Cour de cassation,
chambre sociale
C.
Code
C.
ass.
Cour d’assises
C.
civ. Code
civil
C.
com. Code de commerce
C.
trav. Code du travail
Chap.
Chapitre
Chron. Chronique
Concl.
Conclusions
D.
Recueil Dalloz
Décr.
Décret
Gaz.
Pal.
Gazette du Palais
JCP
Juris-Classeur
périodique (Semaine juridique)
JO
Journal officiel
J.-Cl.
Soc. Juris-Classeur Sociétés
L.
Loi
NCPC
Nouveau Code de
procédure civile
Op.
cit. Ouvrage
déjà cité
Ord.
Ordonnance
Rev.
Sociétés
Revue des sociétés
RJ
com.
Revue de jurisprudence
commerciale
RTD
Civ.
Revue trimestrielle de droit civil
RTD
Com.
Revue trimestrielle de
droit commercial
SOMMAIRE
TITRE I :
L’application du droit des sociétés à l’association acte juridique
CHAPITRE 1 : L’ASSOCIATION, ACTE DE VOLONTE
Section 1 : La volonté, condition de validité des décisions modificatrices
des statuts
Section 2 : La volonté, condition de survie de l’acte
CHAPITRE 2 : L’ASSOCIATION, ACTE
D’ORGANISATION
Section 1 : L’organisation du pouvoir
Section 2 : La possibilité de contester le pouvoir au sein de l’organisation
TITRE II :
L’application du droit des sociétés à l’association personne morale
CHAPITRE 1 : LES EFFETS LIES A LA
PERSONNIFICATION DE L’ASSOCIATION
Section 1 : L’effet sur la
constitution de l’association : La reprise des engagements
Section 2 : L’effet sur la
disparition de l’association : La survie de la personnalité juridique pour les
besoins de la liquidation
CHAPITRE 2 : LA RESPONSABILITE CIVILE DES
DIRIGEANTS DE L’ASSOCIATION PERSONNIFIEE
Section 1 : La
déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des
sociétaires
Section 2 : La
déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des
tiers
INTRODUCTION
GENERALE
1. « La loi du 1er juillet 1901 relative
au contrat d’association ne fait aucune référence au droit des sociétés dont il
puisse résulter que des règles applicables au droit des sociétés soient
transposables aux associations »[1] .
De
prime abord, il serait tentant d’accorder du crédit à cette réponse
ministérielle dans la mesure où, l’une des spécificités du droit privé français
est la diversité de ses groupements.
2.
Cette caractéristique est en fait une richesse[2] puisque, en
fonction des buts poursuivis par les fondateurs, ceux-ci peuvent librement se
doter d’une structure appropriée.
Ainsi, lorsque le but est de partager les
bénéfices ou profiter d’une économie, les fondateurs feront le choix de la
société puisqu’elle est «instituée
par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat
d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou profiter
de l’économie qui pourra en résulter » au sens de l’Art.1832 al.1er
du Code civil.
Quant
à l’association, elle sera choisie par ceux dont le but n’est pas le partage de
bénéfices. L’Art.1er de
la loi de 1901 dispose en effet que : « L’association
est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun,
d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. Elle est régie
quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicable aux
contrats et obligations ».
3.
Il s’en suit donc que l’association n’est pas la société, et la société n’est
pas l’association. Plus radicalement encore, il semble que l’association se
situe à l’opposé de la société. Cette opposition a été voulue par le
législateur en 1901. En effet, à la
lecture des travaux préparatoires de la loi de 1901 il ressort clairement que
les parlementaires ont conçu
l’association comme se situant à l’opposé le plus extrême de la société,
puisque ils sont partis de la définition de la société pour retenir une
définition exactement contraire de l’association[3].
4.
Partant de là, plusieurs arguments ont été avancés pour critiquer l’application
par les juges du droit des sociétés aux associations.
Il
a d’abord été soutenu, que cette application ne serait que la résultante d’un
certain laxisme des juges qui au lieu d’interpréter le contrat d’association,
cèdent par facilité à la transposition des règles du droit des sociétés.
Il
a aussi été soutenu que la transposition jurisprudentielle constituait une
atteinte à la liberté contractuelle et une violation de l’art. 1er
de la loi de 1901.
Il
a enfin été avancé que cette transposition visait à faire de l’association une
société, ce qui consisterait en fait à la dénaturer.
5.
Ces fortes critiques peuvent toutes se résumer en une seule : L’opposition
radicale entre l’association et la société. Cette opposition peut cependant
être relativisée. En effet, d’une part, il existe des points de rencontre entre
elles[4] et d’autre part, elles peuvent entrer en concurrence[5].
6.
De même, doit être relativisée la réponse ministérielle du 10 décembre 1984[6] puisque les
juges continuent d’appliquer le droit des sociétés à des associations. Ceci
revient à considérer comme nulle la valeur juridique d’une réponse
ministérielle.
7.
Au demeurant, cette transposition jurisprudentielle qui a commencé timidement
dans les années 60 du siècle dernier, est devenu au cours de ces dernières
années[7], par la profusion des arrêts, un véritable phénomène. De plus, la
jurisprudence tend aujourd’hui à construire ce qui constituerait peut-être le «
droit commun des groupements » que beaucoup appellent de leurs vœux[8].
8.
Partant de là cette transposition peut être justifiée aux plans politique et
technique.
Au
plan politique, la loi de 1901, qui a institué la liberté d’association exhibe
de nombreuses carences. Fière de ses 18 articles[9], elle ne
dit mot sur l’organisation du groupement associatif, qu’elle abandonne aux
fondateurs. Ce dessaisissement du législateur qui a été qualifié « de principe
de liberté statutaire » aboutit en fait à un libertinage dangereux tant pour
les sociétaires[10] que pour les tiers[11].
Au
plan technique, il n’y a pas de déni de justice[12], le référé
législatif[13] n’existe plus, donc les juges ne peuvent que statuer. Par ailleurs, le
droit des sociétés s’est beaucoup développé, à la différence du droit
associatif.
Par
droit des sociétés aujourd’hui, il faut entendre le Code civil[14], le Code
de commerce[15], le Code Monétaire et Financier[16] et des lois non codifiées[17]. Le droit
des associations quant à lui est issu pour l’essentiel de la loi de 1901 et son
décret d’application du 16 août 1901, du Code civil par renvoi[18], du Code
de commerce[19], de certaines lois non codifiées[20] et de nombreux textes dérogatoires
au droit commun[21]. Le droit associatif est donc aussi vaste que le droit des sociétés,
avec cette différence que la loi de 1901 qui constitue le socle du droit commun
des associations n’a fait l’objet que de timides retouches. Le contrat
d’association, tel qu’il résulte de cette Loi, n’a jamais été modifié à la
différence du contrat de société.
Et
si on a pu plaider pour le maintien tel quel de cette Loi[22], c’est en
réalité parce qu’elle a répondu à un vœu séculaire, voire millénaire : La
liberté d’association. Mais en réalité, le constat généralement opéré est de
parler de « carences » du droit associatif, face aux « excès » du droit des
sociétés.
9. Le recours au
droit des sociétés opéré par les juges saisis est donc justifié. Bien plus, il
est nécessaire car il permet de combler le vide juridique laissé par la loi de
1901. La méthode utilisée est le raisonnement a pari ou par analogie. Il s’agit d’une méthode exégétique
d’interprétation de la Loi qui consiste pour le juge à remonter à la ratio legis, c'est-à-dire à l’esprit du
législateur pour appliquer dans le silence d’une Loi d’autres règles issues
d’autres Lois et dont le but est de régir la même situation.
10.
Si les juges raisonnent a pari c’est
qu’ils considèrent que les solutions du droit des sociétés sont transposables
aux associations. Ils affirment donc de manière indirecte qu’il s’agit de deux
choses du même genre. Le législateur semble raisonner pareillement lorsqu’il
réunit l’association et la société à travers le droit commun de l’entreprise[23].
11.
Si l’application du droit des sociétés aux associations aboutit à réunir deux
groupements que tout opposait, il ne faudrait pas qu’on en arrive à les confondre.
Il importe donc de vérifier que les juges ont bien respecté cette exigence.
Encore faut-il rechercher au préalable les fondements de cette transposition.
Pour ce faire, il convient de se demander : quelles sont les fondements des
règles juridiques qui sont transposées ? Quelle est la portée de cette
transposition ?
12.
L’application du droit des sociétés aux associations présente des intérêts
pratique et théorique.
D’un
point de vue pratique, d’une part, le rôle des associations dans la vie
publique et sociale s’est fortement accru : des associations caritatives,
cultuelles, intellectuelles aux associations de consommateurs, raciales, de
défense des sans-papiers. Les associations sont partout et naissent chaque
jour. Ce phénomène associatif[24] a provoqué l’institution du CNVA[25] qui est
chargé d’étudier et de suivre l’ensemble des questions intéressant la vie
associative, de donner son avis sur les projets de textes législatifs ou
réglementaires et proposer les mesures utiles au développement de la vie
associative[26]. D’autre part, il s’agit aussi de savoir si au fur et à mesure des
transpositions, l’association serait devenue une société.
D’un
point de vue théorique, l’application du droit des sociétés aux associations a
suscités en doctrine, un vif débat quant aux règles qu’il fallait transposer
pour éviter de dénaturer l’association. Il a ainsi été proposé de se fonder
soit sur des « règles techniques » soit sur des règles issues des « principes
communs des personnes morales » ou des « principes communs des groupements ».
Si
le fondement des « règles techniques » semble délicat dans sa mise en œuvre[27], il n’est
pas superflu d’imaginer les principes communs des groupements ou des personnes
morales. Les deux qualificatifs, seront retenus ici, pour la simple raison,
qu’ils ne sont pas incompatibles[28].
13.
Dans le cadre de cette étude, les fondements qui ont été retenus pourraient
aboutir à un consensus doctrinal tout en rassurant la pratique[29]. Ces
fondements sont « l’acte juridique » et la « personnalité morale ». Dès lors, il sera successivement envisagé
l’application du droit des sociétés à l’association acte juridique (Titre I) et
l’application du droit des sociétés à l’association personne morale (Titre II).
Titre I : L’application du droit des sociétés à l’association
acte juridique
14.
Par acte juridique, il faut entendre : « une
opération juridique (negotium) consistant en une manifestation de la volonté
(publique ou privée, unilatérale, plurilatérale ou collective) ayant pour objet
et pour effet de produire une conséquence juridique (établissement d’une règle,
modification d’une situation juridique, création d’un droit, etc.)[30] ».
15.
L’association et la société sont deux actes juridiques car ils sont issus d’une
manifestation de volonté, et produisent des effets de droit. Il s’agit d’actes
juridiques particuliers, distincts des autres pour un certain nombre de
raisons.
D’abord, ils se distinguent des autres actes
juridiques par la présence d’un intérêt commun. Ce ne sont donc pas des « jeux à somme nulle où l’un perd ce que
l’autre gagne [31] » dépourvus de possibilités
d’expression collective et de représentation. Il s’agirait plutôt d’ « un jeu de coopération où tous les joueurs
gagnent et perdent en même temps[32] ».
Ensuite,
ils se caractérisent aussi par le fait qu’ils créent une organisation[33], une
structure dotée d’organes qui se répartissent le pouvoir, et émettent des actes
juridiques dont la portée a largement au-delà de la simple structure sociale.
16.
En tenant compte de cette réalité, les juges ont appliqué à des associations un
certain nombre de règles issues de leur
nature commune d’acte juridique avec la société.
17.
En tant qu’acte juridique, l’association est donc un acte de volonté (Chapitre
1) dont l’effet est de créer une organisation. Et en cela, elle est aussi un
acte d’organisation (Chapitre2).
Chapitre 1 : L’association, acte de volonté
18.
L’association est un acte de volonté car elle est créée par au moins deux
personnes qui expriment une volonté commune. Cette volonté délimite en fait l’animus du groupement associatif qui est
constitué entre autres « d’un concours de
volontés pour remplir l’objet social [34] ».
19.
Ce concours de volontés se retrouve en fait au delà des associations, dans tous
les groupements volontaires de droit privé[35]. Cela
justifie sans doute qu’un auteur l’ait érigé au rang de principe commun à tous
les groupements sous le vocable d’affectio
collaborationis[36].
20.
À la naissance de l’acte, ses créateurs sont animés d’une volonté d’être
ensemble. Ils se choisissent et s’engagent à employer « leurs connaissances à la réalisation d’un but autre que le partage des
bénéfices »[37].
21.
Mais, une fois l’acte créé, l’association va se doter d’une possibilité
d’expression collective. La volonté de tout un chacun se manifeste alors par la
participation à l’assemblée générale à travers l’expression d’un droit de vote.
Certes, les décisions sont prises à la majorité et s’imposent même à ceux qui
n’y ont pas consenti. Mais quid
lorsque ces dernières modifient les statuts en augmentant les engagements des
sociétaires ?
22.
Enfin, l’existence de l’acte est conditionnée par cette volonté commune, et la
disparition de cette volontas suffit
à entraîner la disparition de l’acte. Mais à quelles conditions ?
23.
Saisis par les associations, les juges n’ont pas hésité, en recourant au droit
des sociétés, à affirmer le rôle de la volonté dans le fonctionnement et
l’existence de l’association. La volonté est alors une condition de validité
des décisions modificatrices des statuts (Section 1) et une condition de survie
de l’acte (Section 2).
Section 1 / La
volonté, condition de validité des décisions modificatrices des statuts :
L’interdiction d’augmenter les engagements d’un sociétaire sans son
consentement
24.
Dans certains groupements, la Loi prévoit expressément que les engagements d’un
membre ne peuvent être augmentés sans son consentement[38]. Rien de
tel n’a été prévu pour l’association par la loi de 1901.
25.
Dans un arrêt du 20 juin 2001[39], la Cour de cassation a étendu
cette interdiction aux associations sur le fondement de l’art. 1134 du C. civ.
(§1). Toutefois, elle aurait pu, pour aboutir à un résultat identique mais plus efficace, retenir comme
fondement l’art. 1836 du C. civ. (§2)
§ 1) Le
fondement retenu : L’art. 1134 du Code civil
26.
Dans cette affaire, les statuts de l’AFUL[40] Neuve Douane avaient été modifiés,
entraînant notamment un changement du critère de répartition des dépenses de
l’association. Mais cette nouvelle répartition s’étant révélée défavorable à un
sociétaire (M. Colombero), ce dernier contesta en justice la validité de cette
délibération qui aggravait son engagement. Les juges suprêmes saisis, par un
arrêt de Cassation, rendirent au visa de l’art. 1134 du C. civ. l’attendu
suivant :
« Qu’en statuant ainsi, sans
constater que M. Colombero avait accepté la modification des statuts, alors que
celle-ci aboutissait à une augmentation de ses engagements, la Cour d’appel a
violé le texte susvisé »
27.
S’il convient de relever le mérite de cette solution (A), révéler ses limites
(B) semble inévitable.
A – Le mérite de la solution : L’association,
contrat
28.
En se fondant sur l’art. 1134[41] du C. civ. les juges suprêmes ne
font qu’affirmer la nature contractuelle de l’association. C’est là le seul
mérite de cette solution qui « privilégie
l’association-contrat par rapport à
l’association-institution »[42].
29.
Si au sens de l’art. 1134 al 1er, le contrat est la loi des parties,
cela signifie qu’il est d’une part la loi des parties seulement (1) et d’autre
part la loi de toutes les parties (2).
1°) Le contrat d’association,
loi des parties seulement
30.
Il convient au préalable d’identifier quelles sont les parties au contrat
d’association.
L’association
naît d’un contrat passé entre les membres de l’association, mais elle est aussi
un contrat passé entre l’association
elle-même et chaque membre.
31.
En tant que loi des parties uniquement, le contrat d’association ne peut faire
l’objet d’une modification extérieure. Dès lors, seules les parties peuvent
décider de la modification du contrat et un juge ne peut modifier lui-même le
système de répartition des charges des sociétaires déterminé par les statuts[43].
32.
Mais l’une des parties, notamment l’association peut-elle modifier
unilatéralement le contrat ? Y répondre par la négative permettrait d’affirmer
que l’association est aussi la loi de toutes les parties.
2°) Le contrat d’association,
loi de toutes les parties
33.
En se fondant comme elle l’a fait sur l’art. 1134 du C. civ. la Cour de
Cassation reconnaît que l’association est la loi de toutes les parties. Dès
lors, l’association ne peut modifier unilatéralement le contrat.
34.
Les juges semblent affirmer qu’aucune modification ultérieure du contrat
d’association ne saurait être décidée sans le consentement des membres
concernés. Ce serait en effet, aller à l’encontre de leurs obligations
contractuelles. C’est en fait la nature contractuelle de l’association qui ne
permet pas à l’assemblée, sauf si elle statue à l’unanimité des membres, de
modifier l’engagement de ceux-ci[44].
35. Cela vaut-il dans
tous les cas ? Ou uniquement lorsque la décision modificatrice vient augmenter
les engagements initiaux des sociétaires ?
36.
Il est permis de croire que cette solution vaudra pour toutes les modifications
étant entendu que la nature contractuelle de l’association n’a jamais été
véritablement contestée.
37.
Cette solution est donc bien fondée en ce qu’elle affirme sans ambages la
nature contractuelle de l’association. Cependant, elle semble limitée dans sa
portée.
B – Les limites de la solution
38.
Cette solution semble avoir une portée limitée, car au lieu de poser un
principe de portée générale, elle fait référence aux statuts de l’association
(1), alors que cette référence comporte un certain nombre de limites (2).
1°) la référence aux statuts
39.
La loi de 1901 a certes accordé une grande liberté aux sociétaires en ce qui
concerne leurs règles de fonctionnement. C’est un principe légal fortement
réaffirmé, à tel point que la plupart des arrêts font toujours référence aux
statuts et l’arrêt suscité n’échappe pas
à cette règle. En l’espèce, « l’aggravation
des charges des sociétaires n’était pas prévue parmi les décisions pouvant être
prises à la majorité. La solution aurait-elle été la même si cela avait été le
cas ?[45] ».
40.
Cette question permet en réalité d’entrevoir les limites de cette référence aux
statuts.
2°) Les limites de la référence
aux statuts
41.
Les juges suprêmes prennent le soin de faire expressément référence aux statuts
sur la base de deux principes classiques du droit général de la cassation en
matière de contrats.
Le
premier édicte que « les statuts font la
loi des parties et la liberté contractuelle laisse à celle-ci le soin de fixer
comme elles l’entendent le contenu des statuts[46] ».
Le
second énonce que « l’interprétation des
statuts par les juges du fond est souveraine sauf dénaturation[47] ».
42.
Ces principes, dont la justification ne fait l’objet d’aucun doute a pu
conduire à des dérives dans les associations. Ainsi, dans un arrêt du 25 avril
1990[48], la Cour de Cassation a admis que les statuts d’une association votés
dans des conditions régulières pouvaient priver de droit de vote certaines
catégories de sociétaires.
43. Certes,
il faut relativiser la portée de cet arrêt, car la Cour suprême ne s’est pas
prononcée sur le principe du droit de vote mais sur la validité des clauses statutaires.
44.
Mais on le voit tout de même, la restriction du droit de vote est encore plus
grave que l’augmentation des engagements des membres. Et si la première est
exclue, on ne saurait imaginer la seconde. Les deux vont de paire, d’où la
nécessité d’affirmer avec force, comme principes communs à tous les
groupements, le droit de vote mais aussi la règle de l’interdiction
d’augmentation des engagements sans le consentement des membres.
45.
En somme, pour les raisons exposées précédemment, la référence à l’art. 1134 du
C. civ. ne permet pas d’assurer de façon pérenne et générale l’inviolabilité de
la règle de l’intangibilité. En vertu de l’adage specialia generalibus derogant, il convient peut - être de
souhaiter que les juges recourent de lege
ferenda à l’art. 1836 du C. civ.
§ 2) Le fondement souhaitable : L’art. 1836 du
Code civil
46.
Aux termes de l’art. 1836 du C. civ.
« Les statuts ne peuvent être modifiés, à
défaut de clause contraire que par l’accord unanime des associés.
En aucun cas, les engagements d’un associé ne peuvent
être augmentés sans le consentement de celui-ci ».
47. La transposition
de l’art. 1836 du C. civ. aux associations est souhaitable dans la mesure où
elle conduirait au même résultat[49] que celui de l’art. 1134 du C.
civ., sans encourir les mêmes critiques. Il s’agit donc d’une transposition
évidente (A) mais surtout efficace (B) pour l’affirmation de cette règle comme
principe.
A – L’évidence de la transposition
48.
Envisager comme évidente la transposition de cet article c’est reconnaître aux
sociétaires comme aux associés une identité de situation face à une décision
venant augmenter leurs engagements initiaux. En effet dans un cas comme dans
l’autre on peut retrouver une décision modificatrice des statuts (1),
entraînant une augmentation des engagements d’un ou plusieurs membres du
groupement (2).
1°) La décision modificatrice
des statuts
49.
À l’instar des sociétés, la décision modificatrice des statuts d’une
association relève de la compétence de l’assemblée générale extraordinaire. Le
principe pour tous les groupements contractuels est l’unanimité à moins que les
statuts ou la loi ne prévoient un autre mode de répartition.
Dans
les deux cas on a donc un même organe, édictant une mesure identique : Une
décision venant modifier les engagements initiaux des membres du groupement.
2°) L’augmentation des
engagements des membres du groupement
50.
Il semble intéressant, à ce stade du raisonnement de se demander en quoi
consiste l’augmentation des engagements. En d’autres termes, à partir de quel
moment un membre va-t-il considérer que son engagement a été augmenté ?
En
droit des sociétés, l’examen de la jurisprudence permet d’envisager plusieurs
situations pouvant aggraver les engagements des associés[50].
En
droit des associations, dans l’arrêt du 20 juin 2001[51],
l’augmentation des engagements consistait en un changement du critère de
répartition des dépenses de l’association.
51.
Mais quid des cotisations ?
La
question ne manque pas d’intérêt dans la mesure où une partie de la doctrine a
pu considérer que ces sommes ne pouvaient être considérées comme étant
l’engagement des associés[52]. Et dès lors, on ne pouvait
considérer que l’intangibilité des engagements puisse viser les hypothèses
d’augmentation des engagements. Toutefois cela est contestable dans la mesure
où les cotisations « restent le reflet de
l’engagement des membres[53] ».
52.
L’évidence de transposition de l’art. 1836 ne fait donc l’objet d’aucun doute
car on le voit, dans l’association comme dans la société, les membres se
retrouvent dans la même situation. Mais bien plus que l’évidence, c’est
l’efficacité de cette transposition pour l’instauration du principe de
l’intangibilité des engagements en droit des associations qu’il convient d’envisager.
B – L’efficacité de la transposition
53.
Cette transposition serait, semble-t-il, pleinement efficace pour affirmer avec
force la règle de l’interdiction comme principe commun. Pour ce faire il
convient de se référer d’abord au droit des sociétés où elle est d’ordre
public, la jurisprudence[54] considérant même qu’elle est
sanctionnée de nullité absolue (1). Ensuite il sera envisagé les conséquences
de son application aux associations (2).
1°) L’art. 1836 du Code civil
en droit des sociétés
54.
En droit des sociétés dans un arrêt du 13 novembre 2006[55] les juges
ont accordé une valeur absolue à l’art. 1836 en décidant que : « Lorsque l’augmentation des engagements des
associés ne procède pas de leur consentement unanime, l’associé ayant consenti
à cette augmentation n’est pas de ce seul fait, dépourvu d’intérêt à agir en
nullité car l’art. 1836, alinéa 2, du Code civil est une disposition d’ordre
public sanctionnée de nullité absolue ».
55.
En l’espèce, une action en nullité était dirigée contre une décision
d’assemblée générale à laquelle il était reproché d’avoir augmenté les
engagements des associés sans leur consentement unanime, il s’agissait alors de
savoir si l’un des associés ayant consenti à la décision était recevable à
agir. La Cour en recevant cette action, estime que la règle est d’ordre public
et donc sanctionnée de nullité absolue.
56.
Certes la solution est critiquable[56], mais elle reste tout de même
intéressante car elle affirme sans équivoque que la règle de l’intangibilité
des engagements est d’ordre public. Et en cela, son application aux
associations pourrait entraîner un certain nombre de conséquences.
2°) Les conséquences de
l’application de l’art. 1836 aux associations
57.
Puisque l’art. 1836 est d’ordre public, il ne saurait y être dérogé
conventionnellement. En l’appliquant aux associations les juges feraient
rentrer une disposition impérieuse dans le droit des associations non sans
quelques grincements de dents[57].
58.
Au demeurant, cela permettrait peut être de lutter contre les dérives
constatées dans les associations notamment en matière de droits politiques[58] des
sociétaires, et d’injecter un peu de démocratie dans les associations. Il ne
reste plus qu’à espérer que la jurisprudence fasse prochainement application de
cette disposition aux associations.
59.
La jurisprudence, on l’a vu, reconnaît que la volonté est une condition de
validité des décisions modificatrices des statuts en appliquant la règle de
l’intangibilité des engagements aux associations. Mais elle pourrait aller plus
loin encore en transposant l’art. 1836 al. 2 qui est en droit des sociétés une
disposition d’ordre public[59].
60.
La jurisprudence, on le verra, reconnaît aussi que l’association est un acte
volontaire, un groupement de personnes et en tant que tel, la volonté est
également une condition de survie de l’acte.
Section 2 / La
volonté, condition de survie de l’acte
61.
C’est peut-être une vérité de Lapalisse que d’envisager la problématique de la
dissolution volontaire de l’association. En effet, c’est un contrat auquel
n’échappe pas le mutuus dissensus.
C’est en tout cas ce que rappelle l’art. 1er et l’art. 9 de la loi
de 1901.
62.
Mais l’enjeu n’est pour autant pas inexistant. En effet, en l’absence de mutuus dissensus, est-il possible qu’un
sociétaire qui ne désire plus poursuivre l’activité commune, sollicite en
justice la dissolution du groupement ? Si oui n’est-ce pas un cas de solus dissensus homologué par le juge?
63.
Alors qu’en droit des sociétés, il est admis depuis longtemps que la société ne
peut survivre à une mésentente si elle est « de nature à paralyser son fonctionnement »[60] aucune
disposition similaire n’existe dans la loi de 1901.
64. La
jurisprudence a donc dû pallier cette carence en transposant la dissolution
pour justes motifs de l’art. 1844-7-5 aux associations (§ 1). Au-delà, n’est-ce
pas l’ensemble de l’art. 1844-7 qui est considéré comme un principe commun à
tous les groupements ? Il convient donc d’analyser les probabilités de
transposition des autres dispositions de l’art. 1844-7 du Code civil (§2).
§ 1) La transposition de la dissolution pour
justes motifs
65.
Le juge judiciaire peut prononcer la dissolution de l’association lorsque des «
justes motifs » paralysent le fonctionnement de la société. La jurisprudence a
d’abord été hostile à l’application de cette dissolution à des groupements à
but non lucratif[61]. Ensuite, elle admit le principe de cette dissolution en se référant
au droit des contrats et sans recourir au doit des sociétés (A). Aujourd’hui,
elle semble considérer l’art. 1844-7-5 comme un principe commun de dissolution
(B).
A – Le fondement contractuel
66.
L’hésitation de la jurisprudence à appliquer l’art. 1844-7-5 aux associations
pose la question du fondement contractuel de la dissolution pour justes motifs.
Par deux arrêts[62], certes anciens, les juges ont estimé que la dissolution pour justes
motifs était possible lorsqu’une des parties méconnaissait gravement ses
obligations contractuelles (1) ou lorsqu’il ne régnait plus aucun esprit de
confiance au sein de l’association (2).
1°) La méconnaissance des
obligations contractuelles
67.
Dans un arrêt du 17 octobre 1973[63], la Cour de cassation prononça la
dissolution d’une association en se fondant sur la méconnaissance par un
sociétaire de ses obligations contractuelles. En l’espèce, un contrat
d’association avait été conclu entre deux vétérinaires. Après deux années sans
problèmes, l’un d’eux (M. Boïté) fit paraître une annonce indiquant qu’il
recevrait désormais les clients et les appels à son domicile et non plus au
siège social. L’autre (M. Lassourd) demanda alors aux juges de prononcer la
rupture du contrat d’association et la condamnation de M. Boïté au paiement de
dommages intérêts. La Cour d’appel saisie prononça la résolution du contrat aux
torts de M. Boïté. Saisie par ce dernier, la Cour de cassation valide le
raisonnement des premiers juges par un attendu qui mérite d’être repris :
« Attendu ensuite, qu’après
avoir, par une interprétation […] du contrat […] considéré que la commune volonté des parties était de voir exercer la profession au siège social de
l’association, les juges du second degré ont souverainement estimé que Boïté,
en transférant son cabinet à son domicile particulier et en publiant un
communiqué donnant à penser à la clientèle qu’il exerçait désormais seul la
profession, avait eu un comportement justifiant la dissolution de l’association
»
68.
Cet arrêt permet de tirer deux enseignements :
- La dissolution (ou la résolution du
contrat) de l’association peut être prononcée lorsque la commune volonté des
parties fait défaut.
- Celle-ci fait notamment défaut
lorsque l’un des sociétaires a méconnu ses obligations contractuelles.
69.
De ces observations, il semble opportun de faire le rapprochement entre la
dissolution pour justes motifs et la condition résolutoire de l’art. 1184 du C.
civ. Qu’est-ce finalement que la dissolution pour justes motifs si ce n’est la
transposition de la condition résolutoire[64] ?
En
effet la condition résolutoire qui est sous entendue dans tous les contrats
synallagmatiques, consiste pour une partie à solliciter en justice la
résolution avec dommages et intérêts lorsque l’autre partie ne satisfait point
son engagement. N’est-ce pas la même situation, lorsqu’un associé sollicite en
justice la dissolution de la société pour inexécution par un autre de ses
obligations contractuelles ?
70.
Toutefois, l’application de l’art. 1184 exclut que les torts soient réciproques.
Il faut alors dissoudre tout simplement le groupement sans dommages et
intérêts. C’est notamment, le cas lorsque les sociétaires s’accusent
réciproquement de détournement et ne se font plus confiance.
2°) La perte de confiance
réciproque
71.
Dans un arrêt du 10 mai 1978[65], deux médecins s’étaient
constitués en association en vue de l’exploitation en commun d’un cabinet
médical. S’accusant réciproquement de détournement, la Cour d’appel saisie
refusera de prononcer la résolution de leurs contrats aux torts exclusifs de
l’un d’eux en estimant « qu’en se privant de l’affectio societatis
qui devait présider à leurs rapports professionnels, les docteurs Sucrot et
Gros ont commis vis-à-vis de l’autre les fautes qui légitiment la dissolution
de l’association sans indemnité ». Les juges suprêmes ne feront que
confirmer ce raisonnement.
72.
En statuant ainsi ils fondent la dissolution pour justes motifs sur la perte de
confiance réciproque qui constituait en l’espèce une privation de l’affectio societatis. La référence à cet
« affectio », pour le cas d’une
association, ne devrait pas surprendre pour deux raisons :
- D’une part, l’affectio societatis n’est que la traduction latine du consentement
que l’on retrouve dans tous les contrats
- D’autre part, elle n’est donc pas propre aux
sociétés, c’est dans ce sens que l’on parle souvent d’affectio associationis, consiacionis, collaborationis…
73.
L’étude de cette jurisprudence ancienne a permis de révéler le fondement
contractuel de la dissolution pour justes motifs. Mais la jurisprudence
n’hésite plus comme par le passé à appliquer l’art. 1844-7-5 aux associations,
article qu’elle considère comme un principe commun de dissolution des
groupements de personnes.
B – L’art. 1844-7-5, principe commun de
dissolution
74.
Le raisonnement actuel de la Cour de cassation consiste à transposer l’art.
1844-7-5 du C. civ. aux associations. Par cette transposition, elle en fait un
principe général relatif aux groupements de personnes. En revanche, elle subordonne
son succès à deux conditions : le demandeur doit justifier de la qualité de
membre (1) ; en outre il faut que la mésentente soit de nature à paralyser le
fonctionnement de l’association (2).
1°) La qualité pour agir
75.
Au sens de l’art. 1844-7-5 du C. civ. la dissolution pour justes motifs peut
être prononcée « à la demande d’un
associé ». Cette exigence a toujours été réaffirmée par la jurisprudence en
droit des sociétés[66].
76.
Quant aux associations, la jurisprudence n’est guère florissante. Toutefois, il
convient de citer deux arrêts récents qui affirment cette exigence de qualité.
Dans un arrêt du 24 septembre 2002[67], la Cour d’appel de Poitiers a
rejeté la demande en dissolution d’un ancien sociétaire en estimant que ce
dernier n’était pas « recevable à
solliciter en justice la dissolution d’une association dont il a perdu la
qualité de membre ».
Un
autre arrêt du 13 mars 2007[68] est particulièrement intéressant.
Dans cette affaire, Mme X avait fait par deux actes (le 4 mars 1974 et le 14
juin 1977) donation à une association d’un nombre important d’immeubles. L’acte
prévoyait qu’en cas de dissolution de l’association, les biens devaient faire
retour à la donatrice et à ses héritiers. Mme X décédée, ses deux filles
demandèrent au tribunal de prononcer la dissolution de l’association pour
illicéité de son objet et subsidiairement la nullité des apports pour défaut de
conformité avec le but poursuivi : Elles furent déboutées. Vingt ans plus tard,
elles ont assigné l’association pour obtenir sa dissolution au visa de l’art.
1844-7 du C.civ., faute de remplir l’objet pour lequel elle avait été
constituée. La Cour d’appel saisie (Angers, 4 oct. 2005) prononça la
dissolution de l’association. Celle-ci se pourvut alors en cassation sur la
base d’une fausse application de l’art. 1844-7 qui ne peut résulter « d’une action des tiers » ou « d’une mésentente entre associés paralysant
le fonctionnement de ses membres ». Sur
le défaut de qualité, la Cour estima qu’en tant que fin de non recevoir, elle
aurait du être soulevée devant les juges du fond à peine d’irrecevabilité
et a approuvé la Cour d’appel d’avoir relevé que l’association ne remplissait
plus son objet et prononcer la dissolution.
77.
On le voit, la jurisprudence, tend à affirmer comme en droit des sociétés que
cette action n’est réservée qu’aux seuls membres du groupement. En plus de la
qualité, il faut que le sociétaire démontre l’existence d’une mésentente grave,
c'est-à-dire paralysant le fonctionnement de l’association.
2°) La gravité de la mésentente
78.
Cette exigence de gravité de la mésentente ne fait l’objet d’aucune discussion
en droit des sociétés. La société étant un groupement intéressé, la
jurisprudence a toujours hésité à dissoudre une société économiquement viable,
alors que ses membres n’arrivaient plus à s’entendre. C’est donc l’importance
économique des sociétés qui justifie cette exigence[69].
D’ailleurs, l’appréciation de cette mésentente relève de l’appréciation
souveraine des juges du fond[70]. Cela explique sans doute que la
paralysie soit une exigence dont le contenu variable reste difficile à
démontrer[71].
79.
La vocation désintéressée de l’association étant d’ordre public, peut-on
espérer que la mésentente pourra y trouver une application plus souple ? En
d’autres termes le juge prononcera-t-il tout simplement la dissolution, dès
lors que l’affectio associationis
fera défaut ? Le doute est permis. Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner
un attendu de l’arrêt du 24 septembre 2002 : « Attendu que si le défaut non de vie associative, mais d’affectio
associationis peut entraîner la dissolution d’une association lorsque notamment
ce défaut se manifeste par une
mésentente entre associés de nature à paralyser le fonctionnement de
l’association » […]
80.
Comme en droit des sociétés, seule la mésentente grave, c'est-à-dire de nature
à paralyser le fonctionnement de l’association, peut justifier la dissolution
d’une association. Dès lors, la jurisprudence tend à affirmer la dissolution
pour justes motifs comme un principe commun de dissolution des groupements de
personnes.
81.
Mais doit-on aller au-delà de la seule transposition de l’art. 1844-7-5 et considérer l’ensemble de l’art. 1844-7 comme
un principe commun ? La réponse à cette question suppose d’examiner les
probabilités de transposition de l’art. 1844-7.
§ 2) Les probabilités de transposition des autres
dispositions de l’art. 1844-7 du Code civil
82. Il convient de distinguer les transpositions probables (A) de celles
qui ne le sont pas (B).
A – Les transpositions probables
83.
L’examen des dispositions qui va suivre permet de rendre compte de la nature
contractuelle de l’association. Peuvent alors être transposées les causes de
dissolution issues du droit commun des contrats (1) et celles résultant de la
volonté des associés (2).
1°) Les causes de dissolution
issues du droit commun des contrats
84.
Au sens de l’art. 1844-7, la société prend fin par : l’expiration du temps pour
lequel elle a été constituée (1°), par la réalisation ou extinction de son
objet (2°), l’annulation du contrat de société (3°). Ces causes de dissolution
relèvent en fait du droit commun des contrats ; ce n’est que la traduction des
articles 1108 et 1134 du C. civ.
L’association
étant un contrat, il ne fait aucun doute que ces dispositions peuvent lui être
transposées. Il en va de même de celles résultant de la volonté des associés.
2°) Les causes de dissolution
résultant de la volonté des associés
85.
L’art. 1844-7 ajoute également en son 4°) que la société prend fin par
dissolution anticipée décidée par les associés. Or, l’association, et cela
vient d’être démontré, est un acte de volonté. Elle peut donc tout à fait
prendre fin par décision unanime des sociétaires.
Toutefois,
il est des dispositions dont la transposition semble improbable.
B – Les
transpositions improbables
86.
Si la réunion de toutes les parts en une seule main n’est une cause de
dissolution que dans les groupements intéressés (1), la jurisprudence a
également dû exclure pour les associations la dissolution pour liquidation
judiciaire (2).
1°) La réunion de toutes les
parts sociales entre une seule main
87.
Ce cas de dissolution est prévu à l’art. 1844-7-6. La réunion de toutes les
parts en une seule main est une conséquence de la vocation aux bénéfices de la
société. Elle ne saurait être transposée aux associations qui ne peuvent
partager un bénéfice.
En
revanche, une association peut parfaitement être mise en liquidation
judiciaire.
2°) La dissolution pour
liquidation judiciaire
88.
Par un arrêt du 8 juillet 2003[72] la Cour de cassation a estimé qu’
« une association ne prenant pas fin par
l’effet du jugement ordonnant la liquidation judiciaire, elle peut valablement,
en vertu de son droit propre, interjeter un appel par l’intermédiaire de son
président pourvu qu’elle le fasse contre le liquidateur ou en sa présence
».
89.
Un auteur commentant cet arrêt a parfaitement démontré les bienfaits de ce
refus jurisprudentiel de transposition d’une règle dont on ne voit guère à quel
principe général elle peut être rattachée[73].
Tenant d’ailleurs compte des difficultés qu’a engendré l’application de
cette disposition dans les sociétés[74], le législateur dans la réforme
des procédures collectives[75] a autorisé le maintien
exceptionnel de l’activité.
Conclusion du
Chapitre 1
90.
Au terme de ce chapitre, il est permis d’affirmer que l’association est bien un
acte de volonté. C’est en fait la conséquence de sa nature d’acte juridique
puisque tous les actes juridiques sont des actes de volonté. Les manifestations
de la volonté se rencontrent ainsi tout au long de la vie de l’acte et
conditionnent même sa survie.
Toutefois,
l’association est un acte juridique particulier en ce sens qu’il crée une
organisation.
Chapitre 2 :
L’association, acte d’organisation
91.
La notion d’organisation est souvent remplacée par celle de groupement par les
juristes. Au demeurant, il s’agit in
concreto de la même réalité.
92.
Comme le relève Paul Didier[76], il n’est pas aisé de définir la
notion d’organisation mais « il n’est pas
superflu cependant d’esquisser les deux ou trois idées que ce mot tente de
réunir ou résumer. La première est l’idée d’une tâche à réaliser, d’une chose à
faire […] Le mot organisation évoque aussi l’idée d’une division de l’activité
envisagée […] Enfin, le mot organisation implique que ces sous-ensembles de
l’activité mère soient répartis, selon le cas, entre plusieurs moments, lieux
ou personnes ».
93.
L’association comme la société rendent bien compte de cette réalité dans la
mesure où dans l’un comme dans l’autre il y a bien une tâche à réaliser (mise
en commun de connaissances, ou d’apports) ; une division de l’activité
envisagée (objet social se divisant en activités principales et accessoires) ;
une répartition des tâches entre plusieurs moments (durée, exercices), lieux
(siège social, filiales, succursales) ou personnes (membres, organes).
94.
Dès lors, il n’est pas étonnant que les juges, prenant acte de ce phénomène,
aient tout simplement appliqué à des associations, les règles prévues pour les
sociétés lorsque cela était nécessaire. Ces règles concernent tantôt
l’organisation du pouvoir (Section 1) tantôt la possibilité de contester le
pouvoir au sein de l’organisation (Section 2).
Section 1 :
L’organisation du pouvoir
95.
Si la création d’une organisation est bien la caractéristique du contrat
d’association, il appartient aussi à ce dernier de prévoir l’exercice ou la
répartition du pouvoir au sein de cette organisation. Le pouvoir est donc la
conséquence de l’animus[77] qui
caractérise tout contrat-organisation.
96.
Sans rentrer dans l’étude de la notion de pouvoir, il revêt deux acceptions :
Il peut s’agir d’une « maîtrise de fait,
force, puissance[78] » ou
tout simplement d’une « prérogative
juridique[79] ».
C’est la deuxième acception qu’il convient de retenir dans le cadre de ce
travail[80].
97.
Alors qu’en droit des sociétés, les pouvoirs des dirigeants sont légalement
définis[81], rien de tel n’est prévu dans la loi de 1901. Dès lors, en raison de
la liberté d’association, les parties déterminent librement l’exercice du
pouvoir au sein de l’organisation associative. C’est ainsi qu’elles déterminent
leurs instances sociales[82], mais aussi la répartition du
pouvoir au sein de ces instances[83]. Cela conduit inexorablement à
complexer les tiers qui contractent avec l’association[84].
98.
Mais la liberté statutaire n’interdit pas de recourir aux juges notamment en
cas de conflits. Ces derniers, une fois saisis, n’ont point hésité à recourir
au droit des sociétés, soit pour renforcer les pouvoirs des dirigeants (§1),
soit pour organiser la révocation des dirigeants (§2).
§ 1) Le renforcement des pouvoirs des dirigeants
99.
Le renforcement des pouvoirs ne concerne pas tous les dirigeants
d’associations. Certes, la jurisprudence affirme depuis longtemps la
souveraineté de l’assemblée générale même si cela devait aboutir à limiter de
façon drastique les pouvoirs et la liberté d’initiative du président[85].
Aujourd’hui,
c’est au président d’association que la jurisprudence de la Cour de cassation
vient d’accorder tous les honneurs, ce qui va certainement ravir les praticiens[86].
100.
Ce renforcement se traduit par une extension des pouvoirs du président (A),
qu’il convient d’évaluer (B) afin d’en tirer les conséquences.
A – L’extension des pouvoirs du président d’association
101.
L’examen de la jurisprudence permet de se rendre compte de l’alignement des pouvoirs propres du président
d’association sur ceux du directeur général de la S.A. qui a été réalisé. Cette
extension concerne aussi bien les pouvoirs internes du président (1) que ses
pouvoirs externes (2).
1°) Les pouvoirs internes du
président
102.
Au plan interne, l’extension des pouvoirs a été réalisée par la reconnaissance
du pouvoir de prendre des mesures conservatoires.
103.
En effet, dans un arrêt du 3 mai 2006[87], la Cour de cassation a rendu la
décision suivante :
« Mais attendu que dans le
silence des textes et des statuts relatifs au fonctionnement d’une association,
il entre dans les attributions de son président de prendre, au nom et dans
l’intérêt de celle-ci, à titre conservatoire et dans l’attente d’une décision
du conseil d’administration statutairement habilité ou de l’assemblée générale,
les mesures urgentes que requièrent les circonstances ; qu’en effet les
dispositions du Code civil, et à défaut du Code de commerce, régissant les
sociétés présentent une vocation subsidiaire d’application ; qu’en se référant
à de telles dispositions, en l’espèce celles de l’alinéa 1er de
l’article L 225-56 du Code de commerce, la Cour d’appel a légalement justifié
sa décision »
104.
En l’espèce, M. Kamara, président d’association reprochant à son secrétaire
général et à certains membres de n’avoir pas respecté ses décisions et d’avoir
gravement entravé le fonctionnement du groupement, les a suspendus de leurs
délégations de signature comptable ou de leur appartenance au bureau du conseil
d’administration.
105.
En statuant comme elle l’a fait, la Cour a incontestablement étendu les
pouvoirs du président d’association. En effet, en l’absence de stipulations
particulières dans les statuts de l’association, le président est présumé avoir
les pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances dans l’intérêt
de l’association. C’est ainsi qu’il peut prendre à titre conservatoire les
mesures qu’impose la situation.
106.
Il s’agit d’un alignement des pouvoirs du président d’association sur ceux du
directeur général de S.A. En effet, au sens de l’art. L 225-56, I du C. com. « Le
directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de
la société ». Désormais, avec cette décision, il semble que le président
d’association dispose de pouvoirs similaires.
107.
Cependant les juges vont beaucoup plus loin dans cette « extension-alignement »[88], en reconnaissant au président le
pouvoir de licencier un salarié, ce qui relève de ses pouvoirs externes.
2°) Les pouvoirs externes du
président
108.
En reconnaissant au président le pouvoir de licencier un salarié, les juges ont
étendu ses pouvoirs externes.
109.
Ainsi, dans un arrêt du 25 novembre 2003[89], la Cour de cassation a décidé,
par un attendu qu’il convient de rappeler, qu’un président d’association avait
le pouvoir de licencier un salarié :
« Dès lors qu’il est établi
que les statuts de l’association prévoyaient que le président en est le
représentant légal auprès des tiers pour tous les actes de la vie sociale,
celui-ci est habilité à mettre en œuvre une procédure de licenciement à l’égard
d’un salarié, à défaut d’une disposition spécifique des statuts attribuant
cette compétence à un autre organe ».
110.
Cet arrêt reprend une idée qui avait déjà été exprimée par les juges du fond[90].
Toutefois, en statuant ainsi, les juges suprêmes reconnaissent au président
d’association les mêmes pouvoirs que ceux du directeur général. En effet, c’est
non seulement en sa qualité de chef d’entreprise[91] mais aussi
en sa qualité de représentant légal que ce dernier s’est vu octroyer par la
Loi, le pouvoir de licencier un salarié.
111.
Le pouvoir de licencier, ici octroyé au président d’association, pose plus
largement la question de la représentation de l’association. Le président
d’association serait-il devenu par une « extension-alignement
» un directeur général de S.A. et par la même occasion un représentant légal ?
Si oui l’ « extension-alignement »
s’est-elle transformée par un subterfuge encore inconnu en « extension-assimilation [92] »?
112.
Pour y répondre, il est nécessaire d’apprécier cette transposition des
pouvoirs.
B – L’appréciation de la transposition des
pouvoirs
113.
Dérivant du latin pretium (prix), le
verbe apprécier signifie « déterminer la
valeur ou l’importance de[93] » quelque chose ou quelqu’un.
Apprécier
la transposition des pouvoirs reviendra donc à l’évaluer. Pour ce faire, la
balance sera faite entre ses mérites (1) et ses limites (2).
1°) Les mérites de la
transposition
114.
La transposition opérée a pour mérites de sécuriser les tiers et de respecter
la spécificité du groupement associatif.
115.
La situation des tiers qui contractent avec une association est
particulièrement délicate[94]. Face à la diversité des modèles
statutaires[95], les tiers sont tenus de vérifier la qualité de représentant du
dirigeant d’association avec lequel ils contractent. Faute d’une telle
vérification, les restrictions et répartitions statutaires du pouvoir lui sont
opposables[96]. On le voit, les tiers sont véritablement en disgrâce, faute pour la
loi de 1901 d’avoir désigné le représentant de l’association. Mais en
reconnaissant au président d’association le pouvoir de licencier un salarié
parce que les statuts lui conféraient la qualité de représentant légal, la Cour
de cassation a lancé aux tiers une bouée
de sauvetage. Bien plus, en se fondant sur l’art. 1134 du C. civ. pour conférer
aux statuts leur juste force, les juges n’ont pas dénaturé l’association.
116.
Dans les deux arrêts sus cités les juges ont pris le soin de ne point dénaturer
l’association en respectant les grands principes du droit associatif.
Le
premier est celui de la liberté statutaire. Les juges ont reconnu la qualité de
représentant légal à un président d’association parce que les statuts le
prévoyaient expressément[97]. C’est donc en interprétant les
statuts, que les juges ont reconnu le pouvoir de licencier un salarié. Quid alors d’un silence total des
statuts ?
En
cas de silence des statuts, les juges recourent au droit des sociétés, qui a
une vocation subsidiaire d’application[98]. Même si cette vocation est
critiquable elle n’en demeure pas moins utile : elle permet d’éviter un vide
juridique[99]. C’est en raisonnant ainsi que les juges ont transposé l’art. L 255-56
du C. com.
Le
second principe est celui de la souveraineté de l’assemblée générale[100]. Les
juges ne s’en sont pas démarqués. En effet, si le président d’association
dispose des pouvoirs les plus étendus pour prendre, dans l’intérêt de
l’association, les mesures urgentes que requièrent les circonstances, il ne
s’agit que de mesures conservatoires dans
l’attente d’une décision du conseil d’administration et de l’assemblée
générale.
117.
Cette transposition a bien des mérites, toutefois, elle doit être relativisée
car elle réalise une assimilation délicate entre les pouvoirs du directeur
général de S.A. et le président d’association.
2°) Les limites de la
transposition
118.
Alors que le directeur général de S.A. est un représentant légal qui tire ses
pouvoirs de la Loi, le président d’association est bien un mandataire. Même
s’il a parfois été avancé la thèse selon laquelle le président d’association
serait un représentant légal, soit pour justifier la responsabilité de
l’association du fait de ses dirigeants[101], soit pour empêcher la révocation
« ad nutum »[102] elle
n’est pas fondée[103].
119.
Toutefois, la transposition de l’art. L 255-56 conçu pour un représentant légal
et son application au président d’association mandataire conventionnel laisse
planer des doutes quant à l’avenir de cette décision.
120.
En effet, cette confusion de qualité pourrait emporter des conséquences
pratiques qu’il convient d’observer. Les qualités de mandataire et de
représentant légal ne produisent pas les mêmes effets.
A
l’égard de l’association, en tant que
mandataire conventionnel, le président d’association n’engage celle-ci que dans
les limites de son mandat. Il ne peut la représenter en justice que sur
habilitation spéciale. La situation n’est pas la même pour le directeur
général, qui représente la société à l’égard des tiers, signe les contrats au
nom de celle-ci, passe les commandes, assure les biens sociaux, agit en
justice…[104]
A
l’égard des tiers, alors que les limitations statutaires des pouvoirs du
directeur général sont inopposables aux tiers même de mauvaise foi[105], il n’en
est pas de même dans les associations. Contractant avec un mandataire, les
tiers sont tenus de vérifier au moins le principe de ses pouvoirs[106], ce qui
revient au final à en vérifier l’étendue. En l’absence d’une telle
vérification, les limitations
statutaires lui seront opposables sauf démonstration de la théorie du mandat
apparent[107].
121.
La distinction des qualités de mandataire et de représentant légal est
particulièrement importante dans la mesure où elle pose des problèmes
pratiques. Le président d’association doit être considéré comme un mandataire
conventionnel avec toutes les conséquences que cela implique. Son assimilation
à un représentant légal quant à elle, ne devrait être justifiée que par les
statuts. La vocation subsidiaire du droit des sociétés, même si elle est utile,
ne doit pas dénaturer l’association. Et c’est là le mérite des arrêts sus
étudiés.
122.
Mais, la jurisprudence organise aussi de manière cohérente le pouvoir au
travers de la révocation des dirigeants.
§ 2) La révocation des dirigeants
123.
La jurisprudence[108] et une grande partie de la doctrine[109] considèrent
que les dirigeants d’association sont des mandataires. Dès lors, par
application des dispositions du Code civil, le mandat prend fin par « la révocation du mandataire » (art.
2003) et « le mandant peut révoquer sa
procuration quand bon lui semble » (art. 2004). Cela signifie que le mandat
est révocable « ad nutum », sans
préavis, motifs et indemnités. Cette situation fait penser à celle de certains
dirigeants de sociétés[110]. Mais il semble que le parallèle doive s’arrêter là, puisque les
fondements des pouvoirs ne sont pas les mêmes[111].
124.
En tant que mandataires, la révocation des dirigeants d’associations doit-elle
survenir au cours d’une réunion de l’assemblée générale alors qu’elle n’était
pas inscrite à l’ordre du jour ?
125.
En transposant le principe de l’incident de séance aux associations, la
jurisprudence semble y répondre de façon positive. Cette prise en compte de
l’incident de séance (A), si elle est justifiée, doit cependant être
relativisée (B).
A – La prise en compte de l’incident de séance
126.
Le principe de l’incident de séance est prévu à l’art. L 225-105 du Code de
commerce qui dispose que : « L’assemblée
ne peut délibérer sur une question qui n’est pas inscrite à l’ordre du jour.
Néanmoins, elle peut en toutes circonstances, révoquer un ou plusieurs
administrateurs ou membres du conseil de surveillance et procéder à leur
remplacement ». La loi de 1901 n’ayant pas envisagé cette situation, les
juges ont transposé par trois arrêts[112] ces dispositions à des
associations.
127.
En statuant ainsi, les juges semblent faire de l’incident de séance un principe
de droit commun des groupements (2) qu’ils soumettent cependant à certaines
conditions (1).
1°) Les conditions de
l’incident de séance
128.
Bien que le débat ne relève que de la théorie[113], il
semble que la jurisprudence n’admette pas aussi facilement, en droit des
associations, l’incident de séance. Il convient peut-être de rappeler qu’en
droit des sociétés, on l’admet « en
toutes circonstances[114] ». En revanche, s’agissant des associations,
l’examen de la jurisprudence le soumet à certaines exigences. Peu importe
toutefois la nature de l’assemblée générale au cours de laquelle il est apparu[115].
C’est
ainsi que dans l’arrêt de 1970[116], elle exige pour admettre la
révocation sur incident de séance « des
révélations inattendues d’une telle gravité qu’il était impossible aux membres
de l’association de conserver leur confiance au comité de direction » ;
dans l’arrêt du TGI de 1987[117] les juges
admirent des incidents ayant conduit à « une
situation irrémédiable ».
129.
En revanche, dans l’arrêt de 1994[118], les juges se sont tout
simplement bornés à transposer l’art. 160 de la loi de 1966 (art. L 225-105 du
Code de commerce) sans aucune exigence particulière. Et en cela, ils
l’affirment comme un principe commun des
groupements.
2°) L’incident de séance :
principe commun des groupements
130.
Considérer l’incident de séance comme un principe commun de tous les
groupements revient à reconnaître l’existence de paralysie au sein de ceux-ci
et la nécessité d’y remédier. En effet, dans un groupement de personnes, la
révocation sur incident de séance permet d’éviter le maintien d’un dirigeant
indésirable pour des raisons formelles. Même si l’exigence de formalité (en
l’occurrence que l’assemblée générale ne délibère que sur les points inscrits à
l’ordre du jour) permet de lutter contre les révocations abusives, elle ne
saurait empêcher la révocation d’un dirigeant qui peut toujours résulter d’un incident
de séance.
131.
Toutefois, si le maintien de ce principe a pu être discuté[119]
c’est davantage sa réelle utilité pour
les associations qu’il convient d’examiner au travers de la relativité de cette
prise en compte.
B – La relativité de cette prise en compte
132.
La prise en compte de l’incident de séance en droit des associations revêt une
portée relative car elle nous semble inutile (2) dans la mesure où elle n’est
qu’une modalité de la révocation ad nutum
des dirigeants d’associations (1).
1°) L’incident de séance : Une
modalité de révocation ad nutum
133.
Les dirigeants d’association, cela a déjà été évoqué, sont révocables ad nutum[120]. Ce n’est
qu’une simple application de l’art. 2004 du C. civ.[121]
Par
conséquent, n’est-il pas normal que leur révocation puisse résulter d’une
décision de l’assemblée alors même qu’elle n’était pas inscrite à l’ordre du
jour ? Et finalement « l’incident de
séance » ne serait-il pas exigé qu’aux fins de lutter contre l’arbitraire
dans les révocations ?
Il
semble évident de répondre par l’affirmative. En effet, si le mandant peut
révoquer sa procuration « quand bon lui
semble », il ne faudrait pas qu’il en abuse. C’est pourquoi, la révocation
doit être au moins inscrite à l’ordre du jour. Et si l’on y déroge, il faut au
moins que cela soit justifié par des incidents de séance.
Dès lors, il convient peut-être de parler de révocation ad nutum sur incident de séance[122] en droit
associatif.
134.
En cela, le recours au droit des sociétés, dans ce cas, semble inutile.
2°) L’inutilité de la
transposition
135.
Comme l’a si bien démontré un auteur[123], le recours au principe de
l’incident de séance via l’art. L
225-105 pour justifier la révocation d’un dirigeant d’association est inutile.
Dans la mesure où il est révocable ad nutum, plutôt que le droit des sociétés
commerciales, le juge n’aurait-il pas pu invoquer la théorie du mandat,
beaucoup plus générale ? [124]. Ce qui aurait conduit à admettre
la révocation ad nutum du dirigeant d’association sans avoir à en justifier les
motifs, quitte à l’indemniser si cette révocation s’avère a posteriori
injustifiée et lui a causé un préjudice moral[125].
136.
Même si la transposition de la théorie des incidents de séances semble inutile
pour justifier la révocation des dirigeants d’associations, elle constitue
néanmoins un moyen par lequel les juges participent a posteriori à
l’organisation du pouvoir.
137.
Mais beaucoup plus que l’organisation du pouvoir, les juges reconnaissent
également la possibilité de contester le pouvoir au sein de l’organisation.
Section 2 :
La possibilité de contester le pouvoir
au sein de l’organisation
138.
La jurisprudence reconnaît également, la possibilité de contester le pouvoir au
sein de l’organisation. On l’a déjà démontré, les statuts organisent librement
la répartition des pouvoirs au sein d’organes. Il peut s’agir du président mais
aussi de l’assemblée générale par laquelle est assurée l’expression collective.
139.
Les décisions des assemblées sont alors des actes juridiques collectifs[126] en ce
qu’ils engagent même ceux qui n’y ont pas consenti. C’est ce qui justifie la
règle de la majorité dans tout contrat-organisation.
Au
nom de cette règle, les décisions prises par l’assemblée engagent même les
membres qui ne les ont pas votées. Certes il existe des exceptions à ce quorum, notamment, lorsque des
décisions viennent augmenter les engagements des membres, la règle devient
alors l’unanimité.
140.
Mais la vérité de Montesquieu[127] rattrape souvent trop vite les
sociétaires. En effet, les abus font souvent leur apparition dans un monde où
on ne les attendait pas. Que peuvent donc faire les sociétaires, si ce n’est
recourir aux juges ?
Ces
derniers une fois saisis n’ont pas hésité à appliquer un mécanisme classique du
droit des contrats : L’abus de droit (§1) qu’ils assortissent de sanctions (§2)
§ 1) L’abus de droit
141.
L’abus de droit est une notion civiliste reçue du droit romain. D’abord
élaborée en droit de la propriété, elle s’est progressivement étendue à toutes
les branches du droit. Après de longues querelles doctrinales, un auteur[128] a su se
distinguer en démontrant l’existence de l’abus dans la conscience juridique. Il
va ainsi distinguer quatre critères possibles de l’abus : L’intention de nuire
(critère intentionnel), la faute dans l’exécution (critère technique), le
défaut d’intérêt légitime (critère économique) et le fait de détourner le droit
de sa fonction sociale (critère social ou finaliste)[129].
142.
Le droit des sociétés n’a pas échappé à l’abus de droit : les abus de majorité,
de minorité et d’égalité, les abus de la personne morale…sont autant de
manifestations de l’abus en droit des sociétés. D’ailleurs, Josserand n’écrivait-il
pas « La vie des sociétés, donne matière,
elle aussi, à l’application de la théorie de l’abus […][130] » ?
143.
En droit des associations, dans le silence de la loi de 1901, les juges ont
reconnu à un sociétaire la possibilité d’invoquer l’abus de majorité (A). Cela
amène à réfléchir pour l’avenir aux autres abus du droit de vote (B).
A – L’abus de majorité
144.
Comme en droit des sociétés, l’abus de majorité en droit des associations est
le fruit de la jurisprudence[131].
La spécificité de l’association va-t-elle exiger une application
particulière de cet abus ?
145.
Pour y répondre, il convient de présenter les éléments constitutifs de cet abus
en droit associatif (1) puis d’envisager l’éventualité de son établissement en
tant que principe commun des groupements (2).
1°) Les éléments constitutifs
146.
En droit des sociétés, « l’abus de
majorité implique la réunion de deux éléments : La violation de l’intérêt
social et la rupture d’égalité entre les associés[132] […] ». Il
ne s’agit pas « […] d’un contrôle
d’opportunité mais d’un contrôle de légalité car il s’agit de rechercher si la
décision inopportune est destinée à rompre l’égalité entre associés,
c'est-à-dire la communauté d’intérêts qui doit exister entre eux en application
de l’art. 1833 du Code civil [133]».
147.
En droit des associations, il n’existe pas d’art. 1833 du C. civ. et pourtant
l’abus de majorité y a trouvé son application. En l’espèce, la Cour de
cassation a approuvé une Cour d’appel d’avoir retenu que la résolution prise
dans l’unique dessein de favoriser des membres majoritaires d’une association porte
atteinte à l’intérêt collectif de sorte qu’elle pourrait être annulée pour abus
de majorité. Pour retenir une telle solution, la Cour d’appel a pris le soin de
souligner que les statuts de l’association lui assignaient le but « de travailler à la défense des intérêts
communs à ses membres », ce que les juges suprêmes ne manquent pas de
relever.
148.
Partant de là, on aurait donc trois éléments constitutifs de l’abus de
majorité en droit des associations : La
violation de l’intérêt social (entendu comme intérêt commun des
associés/sociétaires) ; la rupture d’égalité et la mention expresse dans les statuts de l’intérêt commun.
149.
En effet, la Cour aurait-elle statué pareillement si les statuts n’avaient pas
rendu comme en l’espèce un « hommage à
l’intérêt commun[134]» ? La réponse à cette question amène à envisager l’éventualité d’un
principe commun.
2°) L’éventualité d’un principe
commun
150.
Une lecture furtive de l’arrêt du 4 avril 2006 pourrait signer la mort de la
possibilité d’établissement de l’abus de majorité en tant que principe commun
des groupements. On pourrait penser,
s’agissant des associations qu’il faut une mention expresse des statuts
faisant référence à l’intérêt commun. Une mention qui serait en fait le
fondement de l’abus semblable à l’art. 1833 du C. civ. pour les sociétés. Ce
qui reviendrait au final à dire que faute d’une référence statutaire ou légale
à l’intérêt commun, l’abus de majorité ne saurait être appliqué à un
groupement.
151.
Une telle analyse paraît trop simpliste pour plusieurs raisons.
L’abus
de majorité a été appliqué aux sociétés bien avant la rédaction de l’art. 1833
du C. civ. Il ne s’agit ni plus ni moins d’une transposition de la notion
civiliste de l’abus de droit avec certains nuances. Dans son ouvrage, Josserand[135] écrivait
déjà que la vie des sociétés « doit
s’orienter et se poursuivre socialement, en conformité du statut et du jus
fraternitatis, de l’affectio societatis, sinon, les manifestations en seront
abusives […] ».
Or
dans tout groupement de personnes, tel l’association ou la société ne
retrouve-t-on pas cette volonté commune, cet affectio? Tout groupement n’est-il pas constitué dans l’intérêt
commun de ses membres, peu importe que les statuts le précisent ou non? N’est
ce pas la particularité de tout contrat-organisation ?
152.
Il semble qu’on ne puisse que répondre par l’affirmative à toutes ces
interrogations. Dès lors, la construction de l’abus de majorité pourrait tout à
fait trouver à s’appliquer dans tout groupement de personnes, dès lors qu’une
décision favorable aux majoritaires est prise dans l’unique dessein de porter
atteinte aux minoritaires. Une telle décision rompt l’égalité entre associés et
est contraire à leur intérêt commun.
153.
L’abus de majorité peut donc être considéré comme un principe commun à tous les
groupements de personnes[136]. Cela conduit à examiner le cas
des autres abus du droit de vote.
B – Les
autres abus du droit de vote
154.
Par autres « abus du droit de vote[137] » il
convient d’envisager l’abus de minorité et sa variante, l’abus d’égalité[138]. S’ils
ont trouvé application en droit des sociétés, la jurisprudence ne s’est pas
encore prononcée sur ces questions en droit des associations. D’ailleurs
devrait-elle le faire ? La transposition de l’abus de majorité implique-t-elle
pour l’avenir celle des autres abus du droit de vote ?
155.
S’il existe des obstacles à leur transposition (1), il reste encore des raisons
d’espérer (2)
1°) Les obstacles à la
transposition
156.
Au plan politique, les nombreuses atteintes à la démocratie dans les
associations permettent –elles d’envisager une « tyrannie des faibles[139] » ?
157.
En effet, les nombreux obstacles au droit de vote en droit des associations ne
permettent peut-être pas d’envisager que des minoritaires puissent constituer
un « blocage » suffisant à empêcher la prise d’une décision importante.
158.
D’après M. Guyon[140], contrairement à ce qu’on pense, les associations sont en réalité des
gouvernements très autocratiques. La loi de 1901 ne reconnaît en réalité aucun
droit aux membres de l’association susceptible de garantir le fonctionnement
démocratique de la collectivité.
158-1. A l’image de M. Guyon, on pourrait signaler qu’une démocratie suppose
que les citoyens soient bien informés, qu’ils puissent choisir leurs
représentants, participer aux décisions collectives et qu’enfin les citoyens
les plus défavorisés soient protégés.
158-2. Alors qu’en droit des sociétés le droit à l’information est un
attribut essentiel de l’associé, il n’est pas prévu par la loi de 1901. En
droit des associations, la communication par avance des rapports (financier et
moral) aux sociétaires n’est pas exigée. Très souvent ceux-ci découvrent en
séance des documents d’interprétation complexes. Par ailleurs, la présence de
commissaires aux comptes n’est pas exigée par la loi de 1901.
158-3. S’agissant du droit de vote, les sociétaires n’ont pas toujours le
droit de participer aux assemblées et d’y voter. La liberté statutaire permet
une hiérarchisation des membres aux statuts et droits de votes différents
(droit de proposition, droit de veto, droit de vote plural…).
158-4. Enfin, outre le droit de retrait lorsque l’association est constituée
sans limitation de durée (art. 4 de la loi de 1901), aucune mesure de
protection des sociétaires minoritaires n’est prévue en droit des associations.
Comme le précise le Professeur Guyon : « sauf
stipulation contraire des statuts, les sociétaires ne peuvent ni provoquer la
réunion d’une AG ni demander l’inscription d’une question à l’ordre du jour.
Ils ne peuvent pas non plus demander une expertise de gestion […] Enfin en cas de faute des dirigeants, la
jurisprudence[141] ne leur reconnaît pas le droit d’exercer l’action sociale ut
singuli [142]»
159.
Au plan technique, l’abus de minorité n’est retenu en droit des sociétés que
dans des hypothèses strictes. Il s’agit pour la plupart du temps des décisions
relatives au capital social[143]. Or l’association, n’a pas de
capital social car elle n’a pas vocation à réaliser des bénéfices.
160.
Malgré ces obstacles, il subsiste tout de même des raisons d’espérer.
2°) Les raisons d’espérer
161.
L’abus de minorité reste une hypothèse difficilement vérifiable en droit des
associations. Il n’en est pas de même de l’abus d’égalité.
162.
En effet, on pourrait tout à fait imaginer le schéma suivant : Une association
composée de deux membres disposant d’un droit de vote s’exerçant à travers la
règle de l’unanimité. Un sociétaire pourrait alors utiliser son droit de veto
de manière abusive c'est-à-dire dans l’unique dessein d’empêcher une décision
nécessaire au fonctionnement de l’association. Il y’aurait alors atteinte à
l’intérêt commun.
163.
Toutefois, même si l’abus d’égalité pourrait trouver à s’appliquer il ne sera
pas d’un grand intérêt. En effet, les sociétaires pourront toujours, dans ce
cas, demander en justice la dissolution pour mésintelligence[144].
Reste
maintenant à envisager les sanctions de l’abus.
§ 2) Les sanctions de l’abus
164.
Selon Josserand, les manifestations abusives du droit des sociétés « détermineront les sanctions habituelles :
condamnation à des dommages-intérêts, nullité[145] ».
165.
Les fondements de ces actions sont différents[146], et la
jurisprudence commerciale n’hésite pas appliquer l’un ou l’autre selon les cas.
166.
En droit des associations, le seul arrêt connu à ce jour a fait la part belle à
la nullité. C’est pour cette raison qu’elle sera, seule envisagée dans cette
étude. Pour ce faire seront successivement étudiés le régime de l’action en
nullité (A) puis ses effets (B).
A – Le
régime de l’action en nullité
167.
Seront successivement étudiées la qualité pour agir (1) et la prescription de
l’action (2).
1°) La qualité pour agir
168.
En droit des sociétés, la qualité pour agir est sujette à de nombreux obstacles[147] tenant à
la question de la détermination des personnes susceptibles d’invoquer la
nullité d’une décision sociale.
169.
Il n’en est pas de même en droit des associations où tout membre, qui estime
qu’une assemblée générale a été irrégulière, a le droit de se pourvoir en
justice devant le TGI[148] pour faire annuler les décisions prises[149]. Toutefois,
il n’a pas le droit de convoquer une nouvelle assemblée générale avant que la
justice n’ait annulé l’assemblée antérieure.
170.
N’ont donc pas qualité pour agir[150] le membre exclu, à moins que son
exclusion soit irrégulière[151], et a fortiori la personne qui n’est pas membre de l’association[152].
171.
Dès lors, doit être examinée la question de la prescription de l’action en
nullité.
2°) La prescription de l’action
172.
Le délai de prescription est celui des nullités relatives prévu à l’article
1304 du Code civil et fixé à 5 ans à compter du jour où la nullité est encourue
(à compter de la date de réunion des assemblées). L’expiration du délai de
prescription de cet article rend les délibérations définitives[153].
173.
Néanmoins, une fois le délai de prescription expiré, il reste possible
d’invoquer l’exception de nullité qui, elle, est perpétuelle.
174.
Le régime de l’action en nullité en droit des associations semble plus souple
que celui du droit des sociétés, ce qui traduit une certaine opposition entre
les deux groupements. Cette opposition se retrouve également au niveau des
effets de la nullité.
B – Les effets de la nullité
175.
L’opposition se manifeste par l’application du principe de rétroactivité des
nullités en droit des associations. En effet, le prononcé de la nullité d’une
délibération anéantit rétroactivement l’assemblée générale qui est censée
n’avoir jamais eu lieu ; et les sociétaires doivent être remis dans la
situation où ils étaient avant l’assemblée.
176.
Mais dans un arrêt récent, la Cour de cassation[154] a
considéré que l’annulation d’une délibération d’assemblée générale
d’association n’avait pas d’effet rétroactif. Les juges suprêmes ont-ils voulu
faire de la non-rétroactivité des nullités un principe commun des groupements ?
Il convient de répondre par la négative car cette transposition est illogique
(1) et isolée (2).
1°) L’illogisme de la
transposition
177.
Dans l’arrêt du 19 novembre 1991, la Cour de cassation affirme : « à défaut de stipulation législative,
réglementaire ou statutaire contraire, l’annulation d’une délibération prise
par l’assemblée générale d’une association régie par la loi du 1er
juillet 1901 ne peut avoir d’effet rétroactif ». En statuant ainsi les
juges ont adopté une position de principe qui semble aligner le régime de la
nullité en droit associatif sur celui du droit des sociétés, ce qui conduirait
inexorablement à considérer l’article 1844-15 C.civ. comme principe du droit
commun des groupements.
178.
Pourtant, en droit des sociétés il existe bien une exception au principe posé
par l’article 1844-15 C.civ. : la nullité d’une délibération sociale,
contrairement à celle de la société, est rétroactive. C’est donc en exception à
l’exception prévue en droit des sociétés que la Cour de cassation a rendu cette
décision en droit des associations. Il serait donc illogique de penser qu’elle
se fonde sur le principe du droit des sociétés.
179.
D’ailleurs l’arrêt lui-même ne fait aucune référence au droit des sociétés et
repose plutôt sur des arguments d’équité : « la vie associative qui existait avant les assemblées générales s’est
poursuivie, … et les membres qui avaient adhéré au comité de soutien
postérieurement à celles-ci et qui paient leur cotisations ne sauraient se voir
écartés de la constitution du bureau au profit de personnes qui étaient membres
du comité en 1984, et dont certaines ont pu, depuis lors, se désintéresser de
l’association ».
180.
Cette jurisprudence ne permet donc pas d’affirmer que la non-rétroactivité est
devenu un principe commun du droit des groupements, et ce d’autant plus qu’il
s’agit d’une décision isolée.
2°) L’isolement de la
transposition
181.
La Cour de cassation tient à conserver l’originalité du droit associatif.
S’agissant particulièrement de la nullité, elle a décidé, dans un arrêt du 27
juin 2000[155], que : « la nullité de la
délibération d’une assemblée générale d’association résulte du seul fait que
cette assemblée n’a pas respecté les règles statutaires relatives aux modalités
de vote ». En statuant ainsi, la Cour rejette la théorie dite du vote utile
qui prévaut en droit des sociétés. La nullité d’une délibération irrégulière
est indépendante de l’absence d’incidence de l’irrégularité. Le non-respect des
dispositions statutaires suffit à obtenir l’annulation de la délibération prise
par l’assemblée générale. La solution s’impose au sein des groupements
contractuels[156].
182.
Cet arrêt vient confirmer l’isolement de la décision du 19 novembre 1991.
Conclusion du Chapitre 2
183.
Au final, l’association est bien un acte d’organisation. Les parties organisent
librement la répartition des pouvoirs. Toutefois, en cas de conflits, et de
carence des statuts, les juges n’hésitent pas à appliquer les règles du droit
des sociétés. En le faisant, ils participent a posteriori à l’organisation du pouvoir et à l’organisation des
moyens de contestation du pouvoir.
Conclusion du Titre 1
184.
L’association est bien un acte juridique : son fonctionnement, comme sa
disparition sont régis par l’acte juridique qui l’a créé. L’examen de la
transposition jurisprudentielle, au regard de la théorie de l’acte juridique
n’est pas vain. Elle permet de faire apparaître derrière la « mystique théorie institutionnelle [157]», que la
société est bien comme l’association, un acte juridique. Dès lors, l’application du droit des sociétés
aux associations permet de démontrer que les règles transposées sont en réalité
des principes issus pour la plupart de la construction de l’acte juridique :
L’intangibilité des engagements, la dissolution pour justes motifs, la
révocabilité ad nutum des mandats, l’abus de majorité…
185.
Toutefois l’association n’est pas qu’un acte juridique, elle peut devenir,
comme la société une personne morale.
Titre II : L’application du droit des sociétés à
l’association personne morale
186.
L’association est licite dès sa constitution, en vertu du principe de liberté
d’association[158]. Dès lors, l’association non déclarée, ou déclarée mais non publiée,
dispose d’une capacité « de fait »
qui lui est reconnue par la pratique ou la jurisprudence[159].
Toutefois, en dépit de cette reconnaissance, l’association non déclarée ne
constitue qu’un groupement de fait, elle n’est pas véritablement une entité en
droit[160]. A l’égard des tiers, les actes accomplis par cette association sont
en principe nuls[161] ; de même elle ne peut assigner ni être assignée en justice[162].
187.
Cette situation de l’association non déclarée, rappelle étrangement celle des
sociétés non personnifiées[163]. En effet, nonobstant l’absence
de personnalité juridique, elles existent par la force de l’acte juridique qui
les crée. Certaines de ces sociétés sont occultes[164] car la
société a vocation à acquérir la personnalité morale[165]. Au
demeurant, ces sociétés existent dans leurs rapports internes, mais leurs actes
sont inopposables aux tiers. Elles se retrouvent donc dans la même situation
que l’association non déclarée : existence interne mais inopposabilité du
groupement aux tiers.
188.
L’attribution de la personnalité morale devient alors dans un cas comme dans
l’autre une nécessité aux fins d’opposabilité du groupement aux tiers[166].
Désormais, la personne morale est représentée auprès des tiers par des
dirigeants dont la responsabilité personnelle peut être engagée par ces
derniers.
189.
Il a été justement démontré que la personnification du groupement ne vient pas
modifier son régime juridique[167]. « Cela
signifie donc que la personnalité morale n’est pas source des règles gouvernant
la personne morale. Plus exactement, l’ensemble de son régime juridique trouve
sa source dans l’acte constitutif […] du
groupement personnifié »[168].
190.
En attribuant la personnalité morale à l’association et à la société le
législateur en a fait des personnes morales. Toutefois la personnalité
juridique dans un cas comme dans l’autre n’a malheureusement pas la même portée[169].
En
effet, à la différence de la société, l’association personnifiée dispose
toujours d’une capacité limitée[170]. C’est en ce sens qu’on a pu dire
qu’elle ne disposait que d’une « petite
personnalité[171] ». Mais
est-ce bien la personnalité juridique qui est effectivement réduite et variable
d’un groupement à l’autre ?
191.
Répondant à cette question, un auteur[172] a justement démontré que la
personnalité juridique en soi ne varie pas, seule la capacité de la personne
morale peut se trouver réduite par le législateur pour des raisons d’ordre
public.
192.
Dès lors, la personnalité juridique emporte bien des conséquences identiques
quelque soit la personne morale considérée. L’examen de la transposition
jurisprudentielle qui va suivre permet de rendre compte des conséquences de la
personnification. Il s’agit certes d’appliquer le droit des sociétés dans le
silence de la loi de 1901 aux associations, mais il s’agit surtout de relever
que ces groupements sont aussi des personnes morales auxquelles les mêmes règles
ou principes[173] trouvent ou peuvent trouver à s’appliquer.
193.
La jurisprudence reconnaît ainsi des effets liés à la personnification de
l’association (Chapitre 1) et l’existence d’un régime de responsabilité civile
des dirigeants de l’association personnifiée (Chapitre 2).
Chapitre 1 : Les effets
liés à la personnification de l’association
194. L’attribution de la personnalité morale pour l’association comme pour
la société se réalise après accomplissement d’une formalité légale[174].
195.
Dans le même temps, leur personnification emporte un certain nombre
d’attributs, dont le plus important est certainement l’individualisation de la
personne morale. Le groupement devient alors un être à part entière, distinct
de ses membres. Il aura dès lors un intérêt distinct de l’intérêt de ses
membres.
195-1. L’individualisation de la personne morale suppose qu’elle puisse
conclure des actes avec des tiers. Pour ce faire, elle va se doter de
représentants, qui vont ainsi l’engager, dans les limites connues[175]. Ceci
permet d’affirmer que la personne morale ne saurait être engagée par des actes
qui lui sont antérieurs. Toutefois, ne serait-il pas possible qu’elle reprenne
à son compte des actes conclus en son nom parce que son arrivée était imminente
?
195-2. L’individualisation de la personne morale suppose aussi que sa
disparition puisse être indépendante de celle de l’acte juridique fondateur du
groupement. Dès lors, la personnalité morale survit-elle à la dissolution du
groupement ?
196.
En droit des sociétés, la personne morale peut reprendre des engagements qui
lui sont antérieurs à certaines conditions[176]. De plus,
la personnalité morale survit pour les besoins de liquidation[177]. Rien de
tel n’a été prévu dans la loi de 1901. C’est dans ce contexte que la
jurisprudence a transposé ces règles aux associations. En statuant ainsi, elle
reconnaît des effets à la personnification de l’association, tant au moment de
sa constitution (Section 1) qu’au moment de sa disparition (Section 2).
Section 1 :
L’effet sur la constitution de l’association : La reprise des engagements
197.
En droit des sociétés, on admet la reprise des engagements dans des conditions
strictes. En droit des associations, le principe n’est pas affirmé dans la loi de 1901, mais pourtant
les associations, encore plus que les sociétés, connaissent cette période de
non personnification dans la mesure où elles existent de plein droit avant leur
déclaration en vertu de la liberté d’association.
198.
La jurisprudence, avec beaucoup de pudeur, semble admettre l’existence de
principe de la reprise (§1). Mais il existe des obstacles à l’admission
définitive du principe de la reprise en droit associatif (§2).
§ 1) L’admission de principe de la reprise en
droit associatif
199.
La reprise des engagements ne connaît pas en droit associatif une grande
importance. Ignorée de la Loi, elle n’est que très peu envisagée par la
jurisprudence[178].
En
pratique, les fondateurs d’associations recourent alors à certains mécanismes
du droit des contrats : Clause résolutoire et condition suspensive[179]. Mais ces
mécanismes étant limités[180], les juges ont fini par admettre
progressivement la reprise, d’abord de manière indirecte (A) puis de manière
directe (B).
A – L’admission indirecte
200.
Dans l’arrêt du 3 mai 1990[181], la jurisprudence a admis de
façon indirecte, l’existence de la reprise (2) par la motivation retenue (1).
Mais il ne s’agit que d’une admission indirecte, les juges ne faisant pas
expressément référence à la règle de la reprise.
1°) La motivation retenue
201.
Dans cette affaire, la Société des Centres Commerciaux (S.C.C.) avait ouvert un
centre à Suresnes. Afin d’assurer la promotion de ce centre, le « délégué de
gestion » de la société engagea une campagne de publicité. Par ailleurs, les
commerçants prenant à bail un local situé dans le centre avaient souscrit une
clause « essentielle » aux termes de laquelle ils adhéraient à l’Association
des Commerçants du Centre (A.C.C.) dont l’objet était de favoriser la publicité
des commerçants dudit centre. La S.C.C. envoya alors à l’A.C.C. ses factures,
et celle-ci régla seulement deux d’entre elles en estimant qu’elle n’était pas
encore déclarée au moment de la passation du contrat de publicité.
Mais
en réalité, la Cour estima que l’association était redevable des sommes
restantes, en se fondant sur la théorie de la
croyance légitime[182] et celle du mandat apparent[183].
202.
Un auteur[184] commentant cet arrêt émit de fortes réserves à l’égard de cette
motivation. Considérant que la théorie du mandat apparent n’a été utilisée que
pour engager une association non déclarée, aboutir par ce moyen à traiter une
association non déclarée comme si elle avait la personnalité morale lui paraît
une fiction exagérée.
203.
Au demeurant, les juges semblent admettre en réalité l’existence de la reprise
des engagements par une association déclarée.
2°) La reconnaissance implicite
de la reprise
204.
Un autre argument semble justifier la décision de la Cour de Versailles. La
deuxième facture avait été réglée par l’association après accomplissement de la
formalité de déclaration. Ne s’agissait-il pas alors d’une ratification des
engagements souscrits par le mandataire apparent, ce qui correspond à la
reprise des engagements telle qu’on la connaît en droit des sociétés ? Il
semble possible de le croire.
205.
Dès lors, même si la décision de la Cour ne fait aucune allusion expresse à la
reprise, elle l’admet au moins de façon indirecte. Il ne reste plus qu’à
envisager l’admission directe.
B – L’admission directe
206.
Plus directement, la Cour de cassation admet l’existence de principe de la
reprise. Cette fois les juges font directement référence à la possibilité de
reprendre des actes antérieurs. Pour ce faire, ils envisagent le sort du cautionnement
(1) et le sort des autres actes (2).
1°) Le sort du cautionnement
souscrit par l’association non personnifiée
207.
Dans un arrêt du 5 mai 1998, la Cour de cassation s’est prononcée sur la
question de la validité de l'acte de cautionnement souscrit en garantie des
engagements contractés par une association en formation. La solution qu'elle
adopte ne manque pas d'intérêt.
Elle
a en effet précisé que « la caution qui
garantissait le remboursement d'un prêt contracté par une association non
déclarée, et dépourvue de ce fait de la capacité juridique n'était pas tenue
d'exécuter ses engagements [185][…] ».
208.
Par cette décision, la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel de
Versailles du 8 mars 1996 et fait une très exacte application des textes de
loi. Elle rappelle en effet que le prêt contracté au nom d'une association non
déclarée n'engage que celui qui se présente comme son représentant et non
l'association elle-même, celle-ci n'ayant pas la capacité de contracter.
L'obligation de restituer les fonds prêtés incombe donc au
"représentant" de l'association et non à l'association elle-même.
C'est la raison pour laquelle, dans ce cas, la caution qui s'était seulement
engagée à garantir les dettes de l'association ne pouvait être tenue des dettes
contractées par son "représentant", personne distincte de
l'association. En effet, aux termes de l'ancien article 2015 du code civil[186], on ne
peut étendre le cautionnement au-delà des limites dans lesquelles il a été
contracté.
209.
En l'espèce, l'acte de cautionnement avait été souscrit dans le but de garantir
un prêt octroyé à l'association et non à celui qui se prétendait son dirigeant.
La Cour de cassation en a donc déduit à juste titre que celui qui s'était porté
caution pour garantir les engagements d'une personne juridique qui n'existait
pas (l'association) ne pouvait être tenu de ses obligations de caution.
210.
En statuant ainsi, les juges ont envisagé directement la question de la reprise
des engagements même si c’est pour exonérer la caution. Plus directement encore
elle a envisagé la reprise des autres actes.
2°) La sort des autres actes
conclus avant la personnification de l’association
211.
La Cour de cassation a décidé qu'après avoir été déclarée à la préfecture, une
association peut, avec l'accord des fondateurs, reprendre à son compte les
droits et obligations résultant d'une convention conclue par son représentant
avant cette déclaration[187]. En l’espèce, une association avait intenté une action tendant à la
déclarer possesseur de biens qui lui auraient été cédés alors qu’elle n’était
pas encore déclarée. La Cour de cassation rejeta son pourvoi aux motifs que « La Cour d’appel a retenu qu’à la date de la
convention du 7 janvier 1985, l’association n’avait pas la capacité juridique
pour acheter les matériels litigieux, et qu’après cette date, elle n’a pas repris à son compte les droits
et obligations afférents à cette convention […] ».
212.
En statuant ainsi, les juges reconnaissent qu’une association déclarée peut
reprendre les actes qui lui sont antérieurs. Cet arrêt a été salué par une
doctrine majoritaire et a même été considéré comme établissant le principe de
la reprise en droit associatif[188]. Il s’agit d’un raisonnement
hâtif quand on voit les nombreux obstacles qui viennent contester une telle
affirmation.
§ 2) Les obstacles à l’admission définitive de la
reprise en droit associatif
213.
Le principe de la reprise tel qu’il existe en droit des sociétés a-t-il été
reconnu comme tel en droit associatif ? Peut-on espérer que la reprise a été
définitivement admise en droit associatif ?
Malgré
la ferveur que les arrêts sus évoqués ont entraîné en doctrine[189], il sera
démontré qu’on doit relativiser leur portée (B) et ce, à cause de leurs
incertitudes (A).
A – Les incertitudes de la solution
214.
La solution développée par la jurisprudence et qui a consisté à admettre le
principe de la reprise en droit associatif est incertaine.
En effet, son contenu ne nous révèle rien sur
les modalités (1) et les effets (2) de
la reprise.
1°) Les modalités de la reprise
215.
La jurisprudence ne dit rien sur les modalités de la reprise. La doctrine
semble admettre qu’il faille recourir au droit des sociétés et notamment à l'article 6
du décret du 3 Juillet 1978.
216.
La reprise pourrait alors intervenir après déclaration à la préfecture et
insertion de cette déclaration au Journal officiel, à la suite d'une décision
spéciale expresse des associés, et ce quelle que soit la date à laquelle les
actes auront été accomplis pour le compte de l'association en formation[190].
217.
Toutefois, cette analyse ne saurait être convaincante car rien ne permet de
croire que les juges vont recourir de lege
ferenda au droit des sociétés via
l’article 1843 du C. civ. Ils auraient pu recourir à celui-ci pour préciser les
modalités de la reprise. Comment considérer alors ce silence : Acceptation ou
refus ?
218.
Un autre argument plaide en la défaveur d’un recours systématique au droit des
sociétés pour fonder les modalités de la reprise. La « décision expresse des associés[191] » sera–t-elle
soumise à un vote majoritaire ou unanimitaire ? La doctrine penche pour un vote
majoritaire par analogie au droit des sociétés[192]. C’est
peut-être vite oublier que les associations sont des groupements dans lesquels
il est possible d’imaginer toutes sortes de combinaisons possibles[193].
219.
Cette même incertitude subsiste quant aux effets de la reprise.
2°) Les effets de la reprise
220.
De même la jurisprudence n’a pas précisé les effets de la reprise. Là encore la
doctrine est encline à considérer qu’il faille recourir au droit des sociétés
pour considérer que « les actes seront réputés avoir été contractés par
l’association dès l’origine[194] ».
221.
Ces incertitudes, liées au contenu de la solution, lui confèrent alors une
portée relative. Laquelle constitue un obstacle à l’admission définitive de la
reprise en droit associatif.
B – La portée relative de la solution
222.
La solution adoptée par les juges mérite d’être approuvée en ce qu’elle
reconnaît la possibilité pour une association déclarée de reprendre à son
compte les actes qui sont antérieurs à sa personnification.
223.
Mais la solution pêche par son contenu, et en cela sa portée ne peut qu’être
relative. En effet elle fragilise la construction du principe de la reprise en
droit associatif (1). De plus, elle refuse de reconnaître l’art. 1843 comme
fondement commun du principe de la reprise (2).
1°) Le principe de la reprise
en droit associatif : une construction fragile
224.
La solution des juges ne permet pas de cerner les contours du principe de la
reprise, en cela la construction jurisprudentielle est fragile.
225.
En effet, en refusant (oubliant ?) de préciser les modalités et les effets de
la reprise, les juges ont affirmé un principe creux. Le principe de la reprise,
tel qu’il ressort des arrêts étudiés, est une coquille vide. Certes,
l’association déclarée peut reprendre des actes antérieurs mais quelles
conditions ?
226.
L’association se caractérisant par un vent de liberté, les juges auraient dû
préciser au moins les modalités de ce principe important des personnes morales.
Le principe de la reprise est donc bien une construction fragile en droit
associatif. De plus les juges n’ont pas voulu faire de l’art. 1843 du C. civ.
le fondement commun du principe de la reprise.
2°) Le refus de l’article 1843 comme fondement commun du
principe de la reprise
227.
En ne se fondant sur aucun texte pour justifier l’existence de la reprise en
droit associatif, les juges semblent la reconnaître comme principe commun des
groupements[195]. Toutefois, rien ne permet d’assurer qu’elle aura les mêmes modalités
qu’en droit des sociétés[196]. En effet, même si l’on considère
qu’il puisse servir de socle à l’élaboration d’un droit commun des groupements,
il faut encore que par analogie, les juges y fassent expressément référence.
228.
Partant de là, il est permis de croire que la reprise pourra connaître des
modalités particulières en droit des associations. Et quand on connaît la
relative protection dont bénéficient les tiers face aux associations[197], on ne
peut que déplorer le manque de précision des modalités de la reprise. Une
simple référence à l’art. 1843 du C. civ. aurait cependant suffi. Mais les
juges s’en sont bien gardés. Dès lors, ils n’affirment pas expressément que le
droit des sociétés constitue le socle commun d’édification du principe de la reprise pour les personnes
morales.
229.
Le principe de la reprise en droit associatif est encore une construction
fragile. Il n’est pas encore admis définitivement par la jurisprudence. Décider
que les juges ont voulu lui attribuer les mêmes modalités qu’en droit des
sociétés, trahit en réalité une forte espérance. Le principe de la reprise ne
sera définitivement admis en droit associatif que lorsque ses modalités auront
été clairement précisées soit par référence au droit des sociétés, soit d’une
autre façon.
330.
Au demeurant, la personnification de l’association emporte également un effet
sur sa disparition.
Section 2 :
L’effet sur la disparition de l’association : La survie de la personnalité
juridique pour les besoins de liquidation
331.
La disparition de l’association ou de la société peut résulter de la nullité du
contrat ou de la dissolution. Dans les deux cas, en droit des sociétés, il est
clairement admis que la personnalité juridique subsiste pour les besoins de
liquidation jusqu’à la publication de la clôture de celle-ci[198]. Rien de
tel ne figure dans le droit associatif, à l’exception de l’art. 14 du décret
qui vise expressément la liquidation[199].
332.
L’examen de cet article permet de relever la liberté d’organisation des
conditions de la liquidation qui est reconnue par le législateur aux
sociétaires. Et quand on sait les dérives occasionnées par cette liberté, il
est permis de douter de l’opportunité de l’application de la règle aux
associations (§1). Mais il ne s’agit que d’un doute méthodique puisque les
juges appliquent bien la règle de la survie aux associations (§2).
§ 1) L’opportunité de l’application de la règle
aux associations
333.
La détermination de l’opportunité pose en réalité la question de savoir si « toute dissolution d’association, et plus
particulièrement la dissolution décidée par les sociétaires réunis en assemblée
générale est-elle obligatoirement et nécessairement suivie d’une phase de
liquidation ?[200] »
334.
La réponse à cette question permettra d’envisager les obstacles qui se dressent
à l’application ne varietur de la
règle aux associations (A). Il sera ensuite précisé que ces obstacles
n’éliminent pas pour autant la nécessité d’appliquer la règle aux associations
(B).
A – Les obstacles à l’application ne varietur de
la règle aux associations
335.
De nombreux obstacles empêchent une application ne varietur de la règle de la survie telle qu’on la conçoit en
droit des sociétés aux associations. Ces obstacles peuvent être juridiques (1)
ou factuels (2).
1°) Les obstacles juridiques
336.
Ces obstacles tiennent à la spécificité du droit associatif avec le principe de
liberté statutaire et l’interdiction de partager les bénéfices.
336-1. En vertu du principe de liberté statutaire les sociétaires organisent
librement leur fonctionnement. La liquidation de l’association dissoute n’a pas
échappé à ce principe. En effet, au sens de l’article 14 du décret[201], les
sociétaires organisent librement les conditions de liquidation et de dévolution
des biens. Poussant plus loin le raisonnement, un auteur[202] s’est
demandé si dans certains cas les sociétaires pouvaient éviter l’ouverture d’une
période de liquidation après la dissolution. Ainsi, lorsque l’article 14
suscité reconnaît aux sociétaires le pouvoir de régler librement les conditions
de la liquidation, cette liberté porte-elle sur le principe même de l’existence
d’une phase de liquidation ?
336-2. Le second obstacle tient à la définition de la notion de liquidation
et sa portée en droit des associations. En droit des sociétés, il ressort « de la définition généralement retenue, que
l’issue normale de la liquidation d’une société dissoute réside dans le partage
du produit de la liquidation envisagée comme une opération indispensable pour
parvenir à un tel partage[203] ».
Or
l’association n’a pas vocation à partager des bénéfices. Par conséquent, « une liquidation qui n’aurait de raison
d’être que de préparer les opérations de partage, non seulement ne serait pas
nécessaire en matières d’associations, mais bien plus encore y serait interdite[204] ».
337.
Il convient alors de définir la liquidation en matière d’association comme
étant « l’ensemble des opérations qui sont nécessaires afin de terminer les
affaires dans lesquelles l’association est engagée, de réunir les éléments de
son actif et d’éteindre son passif, de sorte que le cas échéant soit dégagé
l’actif net qui pourra être attribué à un, ou plusieurs nouveau(x)
titulaire(s), qui n’étai(en)t pas membres de l’association dissoute [205] ».
338.
Outre ces obstacles juridiques, il existe des obstacles factuels.
2°) Les obstacles factuels
339.
Il peut exister des associations pour lesquelles la dissolution s’avère
inutile. C’est ainsi qu’un auteur[206] a récemment démontré qu’il était
possible d’envisager des associations dissoutes sans que la dissolution ne soit
suivie d’une liquidation. Il envisage deux situations qu’il convient ici de
reproduire.
339-1. Tout d’abord, il est possible que les associations ne possèdent plus,
au moment de leur dissolution, aucun contrat en cours avec des tiers et ni
aucun créancier[207].
339-2. Il est aussi possible de rencontrer des associations dans lesquelles
il existe bien des éléments à liquider mais dont la liquidation peut
s’effectuer très rapidement au cours de la seule assemblée qui arrête la
décision de dissolution. Cette assemblée générale peut alors, tout en
dissolvant l’association, décider de transmettre, par le biais d’une fusion,
l’ensemble des éléments actifs et passifs de son patrimoine à un bénéficiaire
déterminé.
340.
Dans ces hypothèses, l’ouverture d’une liquidation s’avèrerait inutile[208]. Pour
autant, la survie de la personnalité morale pour les besoins de liquidation
reste bien une nécessité.
B – La nécessité de l’application de la règle aux
associations
341.
La survie de la personnalité morale pour les besoins de la liquidation reste
bien une nécessité pour les associations malgré les obstacles sus envisagés. En
effet, en reconnaissant aux sociétaires une liberté d’organisation de la
liquidation, le législateur n’a pas entendu supprimer le principe même de
l’existence d’une phase de liquidation. La règle s’impose donc toutes les fois
qu’il est nécessaire de liquider (1), mais aussi de garantir les intérêts des
différents protagonistes à la liquidation (2).
1°) La nécessité de liquider
342.
L’association étant une personne morale, sa personnalité juridique ne saurait
disparaître dès la décision de liquidation. Il est très peu probable en effet
que les sociétaires aient la certitude, au moment de la dissolution, que la
liquidation est inutile du fait de l’absence de tout élément à liquider[209]. La
liquidation est donc nécessaire pour s’assurer de l’absence de tout contrat en
cours et créancier, mais aussi de fraude[210].
343.
Mais la liquidation reste également une nécessité pour une raison technique :
l’indivision serait en effet d’une rigidité excessive dans la mesure où elle
requiert l’unanimité[211].
344.
L’application de la règle de la survie est surtout une nécessité pour les
différents protagonistes dont les intérêts peuvent être garantis.
2°) La nécessité de garantir
les intérêts des différents protagonistes
345.
Qu’il s’agisse des sociétaires, des créanciers ou de l’entreprise, la
liquidation met en jeu différents intérêts[212].
345-1. D’abord, les sociétaires seraient contraints de se retrouver en
indivision. Ce qui pour une raison technique est assez rigide, pour procéder à
la dévolution des biens. Quant aux créanciers, ils perdraient avec la
disparition de la personnalité morale au jour de la dissolution, leur « droit de gage exclusif sur les biens de la
personne morale[213] ». Enfin, l’entreprise associative étant aujourd’hui une réalité, il
est nécessaire d’ouvrir une période de liquidation afin d’éviter « un arrêt, ou même un fâcheux ralentissement
de la vie économique et sociale de l’entreprise […] [214]».
345-2. Pour toutes ces raisons, il est nécessaire d’appliquer la règle de la
survie de la personnalité morale aux associations. Et la jurisprudence l’a
justement compris.
§ 2) L’application de la règle aux associations
346.
Il est de jurisprudence constante que la personnalité morale de l’association
dissoute subsiste pour les besoins de la liquidation[215].
L’association dissoute continue d’être une personne morale distincte des
personnes physiques qui la composent[216]. Toutefois, sa personnalité
juridique est limitée quant aux actes (A) et dans le temps (B).
A – La limitation de la personnalité juridique
quant aux actes
347.
La personnalité juridique des associations dissoutes subsiste donc pour les
besoins de leur liquidation. Dès lors, l’association n’aura de personnalité
juridique, et donc de capacité juridique, qu’autant que les actes qu’elle
passera seront nécessaires à la liquidation[217]. Ces
actes peuvent être antérieurs (1) ou postérieurs à la liquidation (2).
1°) Les actes antérieurs
348.
L’association survit pour l’exécution de tous les contrats qu’elle a passés
antérieurement à sa dissolution[218].
Il
en va ainsi notamment pour les contrats de travail avec ses salariés, pour les
baux conclus avec les propriétaires des immeubles où elle exerce son activité,
pour les marchés avec des fournisseurs ou des clients.
349.
Elle peut aussi conclure des actes postérieurement à sa dissolution.
2°) Les actes postérieurs
350.
L’application de la règle de la survie signifie également que l’association
dissoute pourra aussi accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à sa
liquidation. Elle peut ainsi vendre ses biens. En revanche, une association
dissoute ne peut faire des opérations qui seraient en contradiction avec le but
de la liquidation. Elle ne pourra donc plus ni acquérir de nouveaux biens, ni
encaisser de nouvelles cotisations[219].
351.
L’application de la règle de la survie entraîne une limitation de la
personnalité juridique de l’association quant aux actes. Désormais, elle ne
pourra qu’effectuer des actes nécessaires à la liquidation. C’est ainsi qu’elle
peut ester en justice[220].
352.
Mais l’application de la règle va également limiter la personnalité juridique
de l’association dans le temps.
B – La limitation de la personnalité juridique
dans le temps
353.
L’étude qui va suivre pose la question du terme de la survie de la personnalité
juridique de l’association dissoute.
354.
En droit des sociétés, la clôture des opérations de liquidation marque la fin
de la période de liquidation[221].
355.
Aucune disposition n’étant prévue dans la loi de 1901, les juges ont décidé « qu’une association perd son existence
juridique à partir de sa liquidation et de la dévolution de ses biens[222]». La
dévolution des biens marque donc la fin de la personnalité juridique de
l’association (1). Mais, celle-ci peut renaître même après la dévolution des
biens (2).
1°) La fin de la personnalité
juridique avec la dévolution des biens
356.
La fin des opérations de liquidation, marque donc la fin de la personnalité
juridique. Mais un problème s’est posé de façon récurrente aux juges : A partir
de quel moment doit-on considérer que les opérations de liquidation sont
terminées ?
357.
La jurisprudence semble s’accorder sur le principe du parallélisme des formes
qui supposerait que la personnalité juridique disparaisse avec la publication
de la dissolution au Journal officiel[223]. Mais en pratique, une telle
analyse est limitée quand on voit la grande désaffection de cette formalité par
les associations[224].
358.
Que décider alors lorsqu’il n’y a pas eu publication ? La jurisprudence a
considéré que la dévolution des biens marquait la fin de la personnalité
juridique[225].
359.
Mais il semble que la personnalité juridique de l’association puisse renaître
après la dévolution.
2°) La renaissance de la
personnalité juridique après dévolution des biens
360. La jurisprudence[226] a admis qu’un liquidateur dont la
mission était terminée, pouvait exercer au nom de l’association, après
dévolution de ses biens, une action en révocation de ladite dévolution. La
doctrine en examinant cet arrêt considère d’une part que la personnalité juridique
ne disparaît pas avec la dévolution et d’autre part qu’ayant disparu, elle peut
renaître pour les besoins de l’action en justice.
361.
Il convient de s’attacher à la seconde analyse[227]. En effet
considérer que la personnalité morale survive à la dévolution c’est affirmer
qu’elle n’a pas de fin. Mais c’est
également affirmer qu’elle existe par elle-même et pour elle-même. Or la
personnalité morale existe par la personne morale, et peut subsister après
dissolution de celle-ci pour les besoins de la liquidation uniquement. Dès
lors, on ne saurait imaginer qu’elle puisse subsister à la dévolution
puisqu’alors il n’y a plus de personne morale, ni d’intérêt à ce qu’elle
existe.
362.
La personnalité juridique disparaît avec la dévolution mais peut renaître pour
les besoins d’une action en justice nécessaire à la liquidation (en l’espèce,
la validité de la dévolution était contestée, il était donc normal que
l’association ayant récupéré ses biens procède à une nouvelle dévolution).
363.
Cette solution permet d’établir le parallèle avec les développements qu’il y a
eu en droit des sociétés sur la durée de la personnalité morale[228].
364.
Finalement, la personnalité juridique est-elle un phoenix qui renaît toujours
de ses cendres ? L’arrêt du 11 décembre 1973 permet de répondre par
l’affirmative. La personnalité juridique renaîtra autant de fois que la
dévolution fera l’objet d’une contestation.
Conclusion du chapitre 1
365.
L’attribution de la personnalité morale à l’association emporte un certain
nombre d’effets. Désormais, elle est une personne morale distincte des membres
qui l’ont créée, c’est le principe d’autonomie. Elle peut donc reprendre les
actes conclus pour son compte avant son apparition et elle survit à la
dissolution « pour les besoins de la
liquidation ». En transposant ces règles du droit des sociétés aux
associations, la jurisprudence reconnaît à la personnalité morale les mêmes
effets quel que soit le groupement auquel elle s’applique.
366.
Toutefois, on l’a vu, la spécificité de l’association et la timidité de la
jurisprudence permettent de considérer que l’association est une personne
morale particulière et l’application des règles découlant de sa
personnification ne saurait se faire ne
varietur.
367.
Au demeurant, l’association personne morale ne peut faire entendre sa voix que
par l’intermédiaire de ses dirigeants. La jurisprudence y accorde une
importance non négligeable. Cela sera envisagé à travers l’examen de la
responsabilité civile des dirigeants de l’association personnifiée.
Chapitre 2 : La
responsabilité civile des dirigeants de l’association personnifiée
368.
Envisager la responsabilité civile des dirigeants d’une personne morale est une
entreprise périlleuse.
369.
En théorie, l’écran[229] de la personne morale ne permet pas d’envisager a priori la responsabilité du dirigeant de la personne morale à
l’égard des tiers. Le dirigeant représente la personne morale, il agit pour son
compte et dès lors, les fautes qu’il commet dans l’exercice de ses fonctions
engagent la personne morale. En pratique, les recours sont souvent dirigés
contre la personne morale, considérée comme beaucoup plus solvable que ses
dirigeants. La responsabilité des dirigeants des personnes morales à l’égard
des tiers est bien une situation exceptionnelle[230].
370.
A l’égard des membres du groupement, la responsabilité des dirigeants des
personnes morales est considérée comme étant ordinaire[231]. En
effet, la personnification du groupement n’influence pas le régime de
responsabilité des dirigeants à l’égard des membres du groupement[232]. C’est ce
qui explique que l’on puisse envisager un régime de responsabilité des
dirigeants à l’égard des membres de groupements non personnifiés, telle la
société en participation. Toutefois, l’octroi de la personnalité juridique facilite
matériellement la réparation du préjudice social[233].
371.
Deux théories[234] ont tenté d’expliquer la responsabilité des dirigeants de la personne
morale. Il convient de les reprendre ici pour cerner les fondements de cette
responsabilité.
371-1. La première théorie est fondée sur le mandat. Les dirigeants de la
personne morale sont des mandataires. En tant que tels, ils doivent rendre
compte de leur mission et sont responsables vis-à-vis de l’association dont ils
ont reçu mandat. Il a été majoritairement admis que cette théorie, si elle
justifie la responsabilité du dirigeant à l’égard de la personne morale, ne
permet pas d’expliquer la responsabilité de l’association à l’égard des tiers.
371-2. Cette critique a justifié la seconde théorie, dite organique, selon
laquelle les dirigeants, en participant de la structure même de la personne
morale, s’identifieraient à elle jusqu’à s’y confondre. Cette théorie présente
elle aussi ses limites car, si les dirigeants sont la personne morale comment
justifier qu’ils soient responsables envers elle ?
372.
La doctrine ne s’accorde guère sur la question et la jurisprudence ne fait pas
mieux[235]. Le bilan est donc celui de l’incertitude[236]. Il est
préférable de s’en tenir à la casuistique des décisions pour mesurer l’étendue
réelle de cette responsabilité plutôt que de se lancer dans la recherche d’une
certaine cohésion[237].
373.
L’examen de cette casuistique en droit associatif permet de se rendre compte de
l’ambiguïté des solutions jurisprudentielles. Tantôt les juges transposent les
règles du droit des sociétés, comme c’est le cas pour la faute détachable des
fonctions ; tantôt ils refusent de transposer des règles, notamment l’action
sociale ut singuli. En statuant
ainsi, les juges affichent une fâcheuse tendance à déresponsabiliser de fait
les dirigeants d’associations tant à l’égard des sociétaires (Section 1) qu’à
l’égard des tiers (Section 2).
Section 1 : La
déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des
sociétaires
374.
Lorsqu’ils exercent leurs missions, les dirigeants peuvent commettre des fautes
causant un préjudice tant à l’association qu’aux sociétaires.
375.
En droit des sociétés, lorsque le préjudice est social, l’action en
responsabilité du dirigeant fautif peut être exercé au moyen de deux actions :
les actions sociales ut universi[238]et ut singuli[239]. En revanche, l’associé ayant
été personnellement lésé peut intenter une action individuelle[240].
376.
En droit des associations, les juges admettent également les actions ut universi et individuelle. Toutefois
ils ont refusé le bénéfice de l’action sociale ut singuli aux sociétaires, ce qui conduit à déresponsabiliser de
fait les dirigeants d’associations. Il convient donc d’évaluer ce refus
jurisprudentiel (§1) afin de démontrer l’opportunité de la reconnaissance de
l’action sociale ut singuli en droit associatif (§2).
§ 1) L’évaluation du refus jurisprudentiel de
l’action sociale ut singuli en droit
associatif
377.
La Cour de cassation a exclu, en droit des associations, la possibilité
d’exercer l’action sociale ut singuli, dans un arrêt du 13 février
1979[241]. Si l’arrêt a été rendu dans le cadre d’un groupement obligatoire,
échappant au régime de droit commun des associations tel qu’il est défini par
la vieille loi de 1901, son intérêt pratique dépasse largement ce cadre. En
effet, « les principes énoncés par la
Cour de cassation peuvent valoir également pour les associations à statut non
dérogatoire et […] pour l’ensemble des groupements titulaire de la personnalité
morale[242] ».
378.
Cette précision faite, il apparaît nécessaire d’examiner le fondement de ce
refus (A) pour en faire ressortir les limites de cette décision (B).
A – Le fondement du refus : Le défaut
d’autorisation légale
379.
Les juges ont rendu dans cette affaire un attendu qu’il convient de reproduire
: « Sauf exception prévue par la loi,
seules les personnes habilitées à représenter une personne morale peuvent
intenter une action en justice au nom de celle-ci. Dès lors, viole les
dispositions de l’article 32 du NCPC la Cour d’appel qui déclare recevable
l’action en dommages-intérêts exercée par un membre d’une fédération
départementale de chasseurs, au nom de cet organisme, contre le président de fédération
[…] ».
380.
En statuant ainsi, les juges subordonnent l’exercice de l’action sociale ut singuli à une autorisation légale.
L’action sociale ut singuli est donc
une action exceptionnelle (2), et l’action sociale ut universi le principe de mise en œuvre de la responsabilité des
dirigeants à l’égard de la personne morale (1).
1°) Le principe de mise en
œuvre de la responsabilité des dirigeants sociaux à l’égard de la personne
morale : L’action sociale ut universi
381.
Selon les termes de l’arrêt, seules les personnes investies, à raison d’une
disposition légale expresse ou de la règle organique du groupement, du pouvoir
de représenter celui-ci en justice, peuvent être admises à le faire[243]. Il a été
démontré que l’exercice de cette action relevait bien des pouvoirs normaux des
mandataires sociaux[244]. Les associés/sociétaires n’ont-ils pas abdiqué la possibilité
d’exercice de leurs prérogatives en faveur de leurs représentants ?
382.
Le raisonnement de la Cour relève donc a priori de la pure logique. L’action
sociale ut singuli est une action en
justice pour laquelle il faut, en plus d’un intérêt, une qualité pour agir. Or,
cette qualité pour représenter la personne morale en justice appartient à ses
mandataires. L’action sociale ne peut être admise ut singuli que lorsque le législateur le décide expressément pour
un groupement précis[245].
383.
Par conséquent, l’action sociale ut
singuli est donc une action exceptionnelle de mise en œuvre de la
responsabilité des dirigeants à l’égard de la personne morale.
2°) L’action exceptionnelle :
L’action sociale ut singuli
384.
L’action sociale ut singuli est donc
une action exceptionnelle qui déroge aux principes classiques de procédure
civile.
C’est
ainsi qu’en droit des sociétés elle suppose au moins l’inertie des dirigeants.
Il s’agit donc d’une action particulière dont
la raison d’être réside à la fois dans les effets attendus de sa mise en
œuvre et dans les conséquences de l’inertie des organes du groupement à
l’exercer[246].
385.
S’agissant des associations et des groupements autres que les sociétés,
l’action sociale ut singuli est
proscrite faute d’autorisation légale. Et quand bien même le législateur
l’autoriserait, elle serait comme en droit des sociétés conditionnée à
l’inaction des mandataires sociaux. C’est
pourquoi, l’on peut considérer qu’en droit associatif, en l’état actuel du
droit positif, l’action sociale ut
singuli est une action doublement exceptionnelle.
386.
Cette décision est donc en conformité avec la caractéristique essentielle des
groupements personnifiés[247]. Pour autant faudrait-il exclure
l’action sociale ut singuli à défaut
d’autorisation légale ? D’autant plus que, postérieurement à cet arrêt, la
jurisprudence[248] puis le législateur ont reconnu que l’action sociale ut singuli était d’application générale
en droit des sociétés.
387.
Cette décision peut et doit aujourd’hui être critiquée.
B – La critique de la décision
388.
Comme l’a si bien démontré un auteur présentant le contexte dans lequel a été
rendu cet arrêt, la Cour de cassation a juste voulu endiguer toutes les
velléités d’actions provenant d’une initiative individuelle[249]. Cette
décision peut donc être critiquée car elle contribue à déresponsabiliser le
dirigeant fautif (1) et est aujourd’hui obsolète (2).
1°) Une solution
déresponsabilisant le dirigeant fautif
389.
La solution de principe posée par les juges suprêmes contribue à
déresponsabiliser le dirigeant fautif dans les groupements considérés. Selon
les différents groupements personnifiés, la possibilité d’agir en justice pour
le compte de la personne morale est, soit partagée entre un certain nombre de
représentants, soit dévolue à un seul et même organe[250].
390.
En droit associatif, la dévolution du pouvoir de représenter l’association en
justice est statutaire. Elle n’appartient au dirigeant d’association que sur
habilitation expresse. A défaut de celle-ci, le dirigeant fautif ne peut faire
échec au jeu de sa responsabilité en refusant d’exercer l’action sociale ut universi contre lui-même. Mais
lorsque ce même dirigeant pourra sur habilitation expresse, représenter
l’association en justice, rien ne permet de croire qu’il exercera l’action
sociale. En pratique donc, seuls les nouveaux dirigeants habilités ou les
autres organes habilités pourront, s’ils
le veulent et ne sont pas inertes, véritablement engager la responsabilité
du dirigeant fautif. Malheureusement, en cas d’inaction, les sociétaires ne
pourront même pas poursuivre le dirigeant fautif. Ce dernier bénéficie alors
d’une relative immunité, qui aboutit à le déresponsabiliser de fait.
391.
Cette décision est aussi critiquable par son obsolescence.
2°) Une solution obsolète
392.
La solution est aujourd’hui obsolète. Pour s’en convaincre il suffit de
remonter au contexte de l’arrêt. A une époque où l’action sociale ut singuli n’était pas encore admise
dans toutes les sociétés[251], la Cour d’appel de Paris[252] décida de
reconnaître celle-ci comme étant d’application générale à toutes les sociétés.
Dès lors, elle décida que les membres d’une SCI étaient tout à fait en droit de
l’exercer. Cette décision, dont l’approbation ministérielle fut fortement
critiquée, connut finalement une consécration législative[253].
Aujourd’hui l’action sociale ut singuli
est unanimement admise en droit des sociétés[254].
393.
Il est alors permis de croire que, si cet arrêt avait été rendu après la
généralisation législative de l’action sociale ut singuli à toutes les sociétés, les juges n’auraient pas raisonné
pareillement. D’autant plus que, cette décision étant demeurée isolée, « force est de constater que le scepticisme
exprimé quant à l’exercice de l’action sociale ut singuli au sein des
groupements autres que les sociétés résulte davantage du désintérêt des
plaideurs que d’une ferme politique jurisprudentielle[255]».
394.
Désormais, rien n’empêche donc de considérer que l’action sociale ut singuli pourrait trouver une
application opportune à d’autres personnes morales et notamment aux
associations.
§ 2) L’opportunité de la reconnaissance de
l’action sociale ut singuli en droit associatif
395.
L’extension de l’action sociale ut
singuli aux associations est bien une question d’opportunité. D’abord par
ce qu’elle est nécessaire au bon fonctionnement de l’association (A), ensuite
parce qu’aucun obstacle technique ne se dresse contre son extension aux
associations (B).
A – L’action sociale ut singuli, une nécessité
pour le bon fonctionnement de l’association
396.
En l’état actuel du droit positif, tout milite en faveur de l’extension de
l’action sociale ut singuli aux associations. L’absence de
démocratie dans les associations est de plus en plus accrue. L’action sociale ut singuli permettrait de protéger la
minorité (1) et de lutter contre la dictature de la majorité (2).
1°) Protéger la minorité
397.
En droit associatif, les minoritaires bénéficient d’une protection relative
voire inexistante[256]. Toutefois, en l’état actuel du droit, ils ne peuvent exercer l’action
sociale ut singuli. Cette action,
dont le but est de pallier l’inertie d’une majorité dirigeante, est un
véritable atout pour les minoritaires, et même pour le plus petit des
minoritaires.
398.
L’extension de cette action aux associations permettrait à tout sociétaire ou
groupe de sociétaires, quelque soit son droit de vote (fut-il réduit par des
clauses statutaires), d’engager en justice la responsabilité du dirigeant
fautif envers la personne morale. La minorité se trouverait donc véritablement
renforcée, ce qui conduirait à lutter contre la dictature de la majorité.
2°) Lutter contre la dictature
de la majorité
399.
L’action sociale ut singuli
permettrait également de lutter contre une majorité généralement solidaire et
autoritaire en droit associatif. Lorsqu’un dirigeant a causé un préjudice
social, sa responsabilité n’est en pratique que très peu engagée par les
personnes habilitées dans les associations. Cette situation aboutit
malheureusement à conférer au dirigeant fautif une réelle immunité dans les
associations.
400.
Dans ces groupements, on sait que la plupart du temps la dévolution des fonctions
s’opère de manière statutaire entre des fondateurs, qui sont généralement de «
bons copains ». Dès lors, il est difficilement envisageable que l’un d’eux (ou
plusieurs d’entre eux), investi(s) du pouvoir de représenter l’association en
justice, engage la responsabilité du dirigeant fautif. Cette réalité est
néanmoins beaucoup plus avérée dans les petites associations que dans les
grosses structures associatives.
401.
L’extension de l’action sociale ut
singuli aux associations est donc bien une nécessité pour instaurer un peu
de démocratie dans les associations. De plus, il n’existe aucun obstacle
technique à son extension aux associations.
B – L’absence d’obstacle technique à l’extension
de l’action sociale ut singuli aux associations
402.
Il s’agira ici de rechercher le fondement de l’action sociale ut singuli[257]. Et si
cette étude permet de démontrer que ce fondement est le même quelque soit le
groupement considéré, on pourra affirmer qu’il n’existe aucun obstacle
technique à l’extension de l’action sociale ut
singuli aux associations.
403.
De récents travaux sur la matière[258] ont révélé que l’action sociale ut singuli était en fait un droit propre
du membre du groupement (1) et était recevable en vertu de son caractère
conservatoire (2).
1°) L’action sociale ut singuli, un droit propre du membre du groupement
404.
Partant du constat que le mandataire social ne fait qu’exercer les prérogatives
appartenant à la collectivité des associés, un auteur[259] a pu
démontrer qu’il doit répondre des fautes commises dans sa gestion et peut
engager sa responsabilité envers chacun de ses mandants. « On peut donc déduire que chacun des membres du groupement peut exercer
ut singuli l’action sociale en vertu d’un droit propre[260]». Ce
droit propre est en fait le droit conféré par tout mandant en vertu de l’art.
1992 du C. civ.
405.
Le titulaire de l’action sociale ut
singuli n’est donc pas la personne morale elle-même mais bien chacun des
mandants[261]. Il semblerait même que le fait que les dommages-intérêts soient
versés à la caisse du groupement ne constitue point un obstacle à ce constat,
puisqu’elle est justifiée par l’atteinte à l’intérêt commun[262].
406.
Dès lors, l’action sociale ut singuli
doit pouvoir être reconnue aux sociétaires puisqu’ils en sont les véritables
titulaires. Toutefois, elle ne peut être exercée qu’à titre conservatoire.
2°) L’action sociale ut singuli, une action à caractère conservatoire
407.
La mise en œuvre de l’action sociale ut
singuli se heurte nécessairement aux règles d’organisation du groupement,
qui confèrent aux représentants le pouvoir d’exercer les prérogatives des
membres[263]. Dès lors, l’action en justice appartient initialement aux personnes
habilitées.
408.
Mais qu’est-ce qui justifie qu’un membre puisse quand même exercer cette action
?
L’exercice
de l’action sociale ut singuli n’est
possible qu’en cas d’inertie des personnes habilitées. C’est leur inertie, et
surtout la crainte de cette inertie, qui justifie qu’un membre puisse exercer ut singuli une action en justice. D’où
on a pu dire que « Cet exercice isolé de
l’action en responsabilité […] est recevable à raison de son caractère
conservatoire, l’associé se prévalant du danger imminent d’extinction de son
droit du fait de l’inertie des organes sociaux[264]».
Ce
raisonnement est admissible en droit associatif. Les sociétaires pourraient
également exercer à titre conservatoire l’action sociale ut singuli.
409.
Malheureusement, en l’état actuel du droit positif, l’action sociale ut singuli n’est toujours pas admise en
droit associatif. Cela conduit à une déresponsabilisation de fait des
dirigeants d’association à l’égard des membres de la personne morale. Le même
constat est possible à l’égard des tiers.
Section 2 : La
déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des
tiers
410.
Généralement admise en droit des sociétés, la construction prétorienne de la
faute détachable des fonctions vient d’être étendue aux associations[265].
Désormais, les dirigeants d’associations ne seront responsables personnellement
à l’égard des tiers qu’en cas de faute détachable des fonctions. Comme certains
dirigeants des sociétés[266], les dirigeants d’associations sont intégrés dans le domaine de cette
faute détachable.
411.
Dès lors, il s’en suit que les dirigeants concernés par la faute détachable
bénéficient d’une « relative immunité » à l’égard des tiers. Cela est
particulièrement vrai pour les dirigeants d’associations qui sont des
mandataires et pour lesquels elle aboutit à les déresponsabiliser à l’égard des
tiers.
412.
Par conséquent, cette transposition qui exige l’établissement d’une faute
détachable des fonctions (§1) pour engager la responsabilité des dirigeants à
l’égard des tiers est en réalité limitée (§2).
§ 1) L’exigence d’une faute détachable des
fonctions
413.
La faute détachable des fonctions est donc la condition sine qua non pour engager la responsabilité des dirigeants
d’associations à l’égard des tiers. Mais à quelles conditions ?
414.
En droit des sociétés, on a longtemps déploré l’absence de définition de la
faute détachable des fonctions[267]. Cela n’est plus vrai depuis
l’arrêt du 20 mai 2003[268] qui a proposé une définition de cette notion.
415.
En droit des associations, en transposant la notion de faute détachable, les
juges ont certainement reçu la définition proposée par la jurisprudence
commerciale. Toutefois, il sera démontré qu’ils tiennent également compte de la
spécificité de l’association.
416.
La définition de la faute détachable en droit des associations tient par
conséquent compte de la définition classique (A), qui est complétée par un
élément nouveau tiré de la spécificité de l’association (B).
A – La définition classique de la notion de faute
détachable des fonctions
417.
Dans l’arrêt du 2003, les juges ont rendu l’attendu suivant : « La responsabilité personnelle d’un dirigeant
à l’égard des tiers ne peut être retenue que s’il a commis une faute détachable
des fonctions […] qu’il en est ainsi lorsque le dirigeant commet intentionnellement
une faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des
fonctions sociales ».
418.
Si la Cour semble donner trois critères de définition de la faute détachable
des fonctions[269], un examen approfondi de la solution[270] permet de
rendre compte qu’elle fournit deux éléments de définition de la notion : Le
caractère intentionnel de la faute (1) et sa particulière gravité (2), dans la
mesure où la faute détachable est nécessairement incompatible avec l’exercice
normal des fonctions de dirigeant[271].
1°) Le caractère intentionnel
de la faute
419.
Il y a faute intentionnelle dès lors qu’un dirigeant – auteur du dommage – a su
en agissant comme il l’a fait, qu’il causerait ce dommage, même s’il n’a pas
agi dans l’unique dessein de nuire à la victime. Il n’y a pas nécessairement
intention de nuire à autrui mais il y a volonté de causer un dommage[272].
420.
Comme conséquence du caractère intentionnel, il faudrait relever que la faute
du dirigeant fera l’objet d’une
appréciation in concreto. De plus, est exclue la faute de négligence qui est une
faute de gestion au grand damne de la doctrine[273].
421.
En droit des associations aucune mention expresse n’a été faite du caractère
intentionnel de la faute détachable mais l’on suppose que l’admission de la
notion même de faute détachable suffit à exiger ce caractère. Dans un arrêt du
19 février 1997, les juges ont simplement retenu que le seul fait pour un
dirigeant de prêter sa notoriété à la personne morale (association) n’était pas
suffisant pour caractériser la faute détachable, si toutefois cette notoriété
n’a pas été utilisée par l’intéressé comme un engagement à l’appui d’une
intervention personnelle en vue d’amener le partenaire à conclure le contrat[274].
422.
Au demeurant, la faute détachable doit aussi être d’une particulière gravité.
2°) La particulière gravité de
la faute
423.
Ce critère a été repris de la proposition du Haut Conseiller Métivet, pour qui
« seules les fautes commises pour des
mobiles personnels (recherche de son propre intérêt, animosité à l’égard de la
victime, vengeance…) ou peut-être encore une gravité exceptionnelle excluant l’exercice
normal des fonctions, sont susceptibles d’engager la responsabilité personnelle
du gérant ou de l’administrateur [275]».
424.
L’handicap de ce critère est qu’il est particulièrement difficile à établir. La
doctrine ne s’accorde guère sur une définition[276]. Et la
jurisprudence en droit des associations ne nous renseigne malheureusement pas
plus[277].
425.
Toujours est-il qu’il faudrait considérer que les tiers doivent établir que la
faute du dirigeant d’association était intentionnelle et d’une particulière
gravité. A cela s’ajoute désormais un élément nouveau tiré de la spécificité de
l’association.
B – L’élément nouveau tiré de la spécificité de
l’association
426.
Dans un arrêt du 7 octobre 2003[278] la Cour de cassation a estimé que
: « La responsabilité personnelle des
administrateurs d’une association n’est engagée que s’ils ont commis une faute
détachable de leurs fonctions ; Et attendu que l’arrêt retient qu’aucune faute
personnelle précise n’est démontrée à l’égard des administrateurs qui ont agi dans le cadre des statuts des
associations […] ».
Doit
donc être considérée, aux termes de cet arrêt, comme détachable des fonctions
du dirigeant d’association, la faute commise par le dirigeant d’association qui
n’a pas respecté les missions assignées par les statuts (1). Le mérite de cet
arrêt est certainement d’avoir respecté la spécificité de l’association, sa
portée doit cependant être relativisée (2).
1°) La faute commise par le
dirigeant d’association hors ses missions statutaires
427.
Comme il a déjà été démontré, les dirigeants d’association sont des mandataires
conventionnels. En tant que tels ils tiennent leurs pouvoirs des statuts, et ne
peuvent agir au-delà des limites statutaires. Allant dans ce sens, la Cour de
cassation estime qu’une faute est détachable des fonctions si et seulement si
elle ne rentre pas dans le cadre de la mission du dirigeant d’association. En
l’espèce[279], deux associations de défense de l’environnement ayant agi contre une
société de construction en vue de l’empêcher de réaliser un programme
immobilier, celle-ci leur avait reproché un excès d’ardeur processive et avait
alors assigné ensemble les associations et leurs dirigeants en vue d’obtenir
des dommages-intérêts pour procédure abusive.
428.
Par cette analyse, les juges ont-ils voulu
exclure du champ de la faute détachable toutes les fautes de gestion des
dirigeants d’associations, mais aussi toutes les fautes intentionnelles
rentrant dans le cadre des missions statutaires des dirigeants ? Sans aller
jusque là, il apparaît que la portée de cette nouvelle exigence doit être
relativisée.
2°) La portée relative de la
nouvelle exigence
429.
Il s’agit ici de s’interroger sur la valeur qu’on pourrait attribuer à ce
nouveau critère. S’agit-il vraiment d’un nouveau critère ?
Une
analyse un peu poussée permet peut-être d’entrevoir derrière ces limitations
statutaires propres aux associations, l’hypothèse du dépassement de pouvoir. Il
s’en suit que le dirigeant qui n’aurait pas excédé ses pouvoirs (statutaires ou
légaux) ne saurait voir sa responsabilité personnelle engagée par des tiers. La
faute détachable des fonctions n’implique-t-elle pas implicitement que la faute
soit commise hors les limites du pouvoir du dirigeant concerné ?
430.
Dans le cadre de cette étude, il sera considéré que le Cour n’a pas élargi les
critères classiques de la notion de faute détachable des fonctions[280]. Elle a
tout simplement voulu marquer son désir de ne pas dénaturer l’association. Dès
lors, il existe une seule définition de la faute détachable des fonctions pour
tous les dirigeants concernés et ce quelque soit la personne morale considérée.
431.
Plutôt que d’exalter cette soi-disant adaptation de la faute détachable des
fonctions aux associations, c’est l’étendue de ses limites qu’il convient
d’envisager.
§ 2) Les limites de cette transposition
432.
La transposition de la faute détachable aux associations pose un certain nombre
de problèmes, et en cela elle est limitée. Ces limites tiennent tant à la
notion de faute détachable elle-même (A) qu’au statut particulier du dirigeant
d’association (B).
A – Les
limites tenant à la notion de
faute détachable
433.
La notion de faute détachable des fonctions présente de réelles incertitudes.
Certes, la Cour de cassation doit être approuvée dans sa tentative de
définition de cette notion[281]. Mais l’approbation ne saurait
exclure, lorsqu’elle est nécessaire, la critique. Dès lors, la construction de
la faute détachable doit être relativisée car elle est limitée tant en ce qui
concerne la preuve du caractère « détachable » de la faute du dirigeant (1) que
sa mise en œuvre (2).
1°) Les limites liées à la
preuve du caractère « détachable » de la faute du dirigeant
434.
Il semble impossible de déterminer le caractère détachable de la faute du
dirigeant. En effet, le comportement fautif n’est jamais totalement indépendant
des fonctions[282]. Il existe une catégorie d’actes qui, tout en ayant été accomplis à
l’occasion de l’exercice des fonctions, se détachent plus ou moins nettement de
la poursuite de l’œuvre commune et causent aux tiers un préjudice, par
imprudence, maladresse, négligence ou même en connaissance de cause[283].
Que
fera alors le tiers ? Doit-il engager individuellement la responsabilité du
dirigeant ou alors celle de la personne morale ? Doit-il engager conjointement
les deux ?
435.
Suite à ces difficultés qu’il y a à établir le caractère détachable de la faute
du dirigeant, diverses solutions ont été proposées en doctrine.
435-1. Il a ainsi été proposé de remplacer purement et simplement la notion
de faute détachable par celle de faute
lourde ou dolosive[284]. Cette démarche aurait l’avantage de ne plus avoir comme référence
principale les fonctions du dirigeant.
435-2. Il a aussi été proposé de se fonder sur la gravité de la faute commise
par le dirigeant[285]. Lorsque ce dernier aura commis une faute légère, l’association sera
engagée et en cas de faute lourde, sa responsabilité personnelle doit pouvoir
être retenue à l’égard des tiers.
436.
Malgré ces propositions doctrinales, la notion de la faute détachable reste
encore incertaine à mettre en œuvre.
2°) Les limites liées à la mise
en œuvre de la faute détachable
437.
Il s’agit ici de supposer que la faute du dirigeant soit effectivement «
détachable » de ses fonctions. Comment le tiers pourra-t-il la mettre en œuvre
et engager la responsabilité du dirigeant ?
En
principe il lui suffira d’établir que cette faute a été intentionnelle et/ou
d’une particulière gravité. Mais le Cour ne nous dit pas si ces critères sont
alternatifs ou cumulatifs.
438.
De plus ces critères sont difficiles à mettre en œuvre. En effet, alors que la
faute intentionnelle exclut la faute de gestion et a pour corollaire que le
dirigeant ne puisse être mis en cause au titre de sa gestion que dans le cadre
d’une procédure collective, la faute d’une particulière gravité n’est pas simple
à définir.
439.
Les propositions pour pallier ces incertitudes abondent. Certaines d’entre
elles tendent à considérer que le tiers n’aurait qu’à établir la faute lourde
pour mettre en œuvre la responsabilité du dirigeant[286]. D’autres
en revanche proposent que les tiers établissent la fraude du dirigeant[287].
440.
On le voit, le critère de faute détachable des fonctions, apparemment souple,
se révèle complexe à l’analyse. Parce qu’elle est particulièrement difficile à
établir, elle confère une immunité réelle aux dirigeants.
441.
Au-delà, la construction de la faute détachable ne sied pas parfaitement au
dirigeant d’association. Il existe donc des limites tenant au statut
particulier du dirigeant d’association.
B – Les
limites tenant au statut particulier du dirigeant d’association
442.
Le dirigeant d’association étant un mandataire (1), sa rémunération est
facultative (2). L’application de la faute détachable à ces dirigeants doit
donc être limitée.
1°) Les limites découlant de la
qualité de mandataire du dirigeant
443.
On l’a vu le dirigeant d’association est bien un mandataire conventionnel à la
différence du dirigeant de société que l’on considère souvent comme un
représentant légal.
Au
sens de l’art. 1992 al. 1er du C. civ. « Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il
commet dans sa gestion ». Aucune distinction n’est donc faite entre les
fautes détachables de ses fonctions et celles qui ne le seraient pas. Dès lors,
le dirigeant d’association devrait être responsable de toutes les fautes qu’il
commet au cours de sa mission à l’égard des tiers. La Cour de cassation fait
une application constante de ces principes directeurs de la responsabilité des
mandataires[288].
444.
L’application de la faute détachable trouve donc ici, une application délicate.
Pris comme mandataires, les dirigeants d’associations ont un régime de
responsabilité plus favorable aux tiers. La faute détachable des fonctions,
appliquée aux dirigeants d’associations les déresponsabilise sérieusement à
l’égard des tiers.
445.
D’autres limites découlent aussi du caractère facultatif de sa rémunération.
2°) Les limites découlant du
caractère facultatif de la rémunération du dirigeant
446.
Au sens de l’al. 2 de l’art. 1992 du C. civ. « Néanmoins la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins
rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un
salaire ». En pratique la plupart des dirigeants d’associations sont des bénévoles
qui exercent leurs missions à titre gratuit.
447.
Or la faute détachable des fonctions a initialement été construite pour des
personnes qui perçoivent une rémunération : fonctionnaires, dirigeants des
sociétés. Dès lors, l’application de la faute détachable des fonctions aux
dirigeants d’associations est encore limitée.
Pour
ces raisons, la construction de la faute détachable en matière d’associations
aboutit à déresponsabiliser les dirigeants de ces personnes morales à l’égard
des tiers.
448.
C’est donc un véritable parcours du combattant pour le tiers que de chercher à
engager la responsabilité des dirigeants d’association : Outre les difficultés
à établir le caractère détachable de la faute, il leur faut surtout la
caractériser (ce qui n’est pas moins difficile).
449.
Tout cela alors même que les dirigeants d’associations sont des mandataires
dont on pourrait engager la responsabilité pour toutes les fautes commises dans
l’exercice de leurs missions.
Conclusion du chapitre 2
450.
L’analyse du régime de responsabilité des dirigeants de l’association
personnifiée permet de rendre compte qu’en dépit des faits générateurs de la
responsabilité, les dirigeants fautifs bénéficient d’une relative immunité. Ce
constat aboutit à une véritable déresponsabilisation de fait des dirigeants de
l’association personnifiée tant à l’égard des sociétaires que des tiers.
451.
Pourtant, si l’on revenait au contrat de mandat, pour considérer les dirigeants
des personnes morales comme des mandataires sociaux, l’on pourrait mettre fin à
cette déresponsabilisation de fait. En effet, le contrat de mandat permet de
justifier la responsabilité des dirigeants à l’égard de la personne morale et
l’exercice de l’action sociale ut singuli
par les membres de cette personne morale. Le contrat de mandat permettrait
aussi de justifier la responsabilité à l’égard des tiers et la faute détachable
des fonctions. Cette dernière pourrait alors être exigée uniquement pour les
tiers ayant contracté avec le mandant sans l’intermédiaire du mandataire. En
revanche, les tiers qui auraient contracté avec le mandant par l’intermédiaire
de son mandataire ne seraient tenus que d’établir la faute simple de ce dernier
pour engager sa responsabilité.
Conclusion du Titre 2
452.
L’attribution de la personnalité morale à l’association emporte, comme c’est le
cas pour la société, un certain nombre de conséquences. Ces conséquences, on
l’a vu, se retrouvent tant au niveau de sa constitution, de sa dissolution que
de la responsabilité civile de ses dirigeants.
L’application
du droit des sociétés aux associations, à ce stade du raisonnement, peut être
considéré comme étant la reconnaissance de l’existence de principes communs aux
personnes morales. Toutefois, certains de ces principes (la survie de la
personnalité juridique pour les besoins de liquidation ; la reprise des
engagements) ne sauraient s’appliquer ne
varietur d’une personne morale à l’autre, car si le concept de la
personnalité morale est unique, les personnes morales sont distinctes.
CONCLUSION GENERALE
453.
L’étude de l’application du droit des sociétés aux associations permet de
retrouver derrière les règles qui sont transposées une identité de régime entre
l’association et la société. Elles sont en effet créées par des actes
juridiques et peuvent être dotées de la personnalité juridique par le
législateur. En reconnaissant cela, les juges ne dénaturent point
l’association. Ils recourent simplement par analogie au droit des sociétés,
lorsque cela est nécessaire pour l’appliquer à des situations identiques.
Malgré l’opposition que laisse supposer la lecture des articles 1er
de la loi de 1901 et 1832 du C. civ., l’association ne se situe pas aux
antipodes de la société. Aussi, en dépit de leurs finalités différentes, les fondements
de l’acte juridique et de la personnalité morale révèlent l’existence de règles
communes : L’interdiction d’augmenter les engagements d’un membre sans son
consentement, la dissolution pour justes motifs, l’incident de séance, l’abus
de majorité, la nullité des délibérations, la reprise des engagements, la
survie de la personnalité juridique pour les besoins de liquidation, l’action
sociale ut singuli et la faute détachable des fonctions.
454.
Plus subtilement, l’application du droit des sociétés aux associations permet
aussi d’imaginer pour l’avenir les voies de rapprochement des groupements
volontaires de droit privé. Ce rapprochement pourra être direct à travers
l’élaboration d’un droit commun des groupements. Il pourra aussi être indirect
en réformant envers et contre tous, la loi de 1901. Celle-ci, sans totalement
être enterrée, peut être modernisée en supprimant, par exemple, les entraves
obsolètes à la capacité de l’association personnifiée, en tenant compte de la
représentation des victimes de dommages de masse par les associations au moyen
de l’instauration en France de l’action de groupe.
Puisque
ce travail relève du domaine du législateur, il ne reste plus qu’à attendre.
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- Civ. 1re,
20 juin 2001, Rev. Sociétés 2002, p.
321, note E. Alfandari.
- Com. 13
nov. 2003, JCP E 2004, 601, n° 7,
obs. J. J. Caussain, F. Deboissy et G. Wicker.
Ø La
dissolution pour justes motifs
- Civ. 1re,
17 oct. 1973, Bull. Civ. I, n° 74.
- Civ. 1re,
10 mai 1978, 2ème esp., JCP 1979, II,
19245, note R. Savatier.
- CA
Poitiers, 2ème Ch. Civ., 24 sept. 2002, Gamaury c/ Club régional de
parachutisme du Poitou : Juris-data n° 2002-190318 ; Dr. Sociétés 2003, n° 26.
- Com. 8 juill. 2003, RDCO 2004, 01 avril 2004, n° 2, p. 399, obs. F-X Lucas.
- Civ. 1re,
13 mars 2007, pourvoi n° V 05-21, 658, Arrêt n° 351 F-D.
Ø Les pouvoirs
du président d’association
- Soc. 25
nov. 2003, Bull. Joly sociétés, 1er
mars 2004, n° 3, p. 422, note C.-M. Bénard.
- Civ.1re,
3 mai 2006, JCP éd Entreprise, n° 47,
23 nov. 2006, note F-X Lucas ; Rev.
Sociétés, p. 855, note D. Randoux.
Ø La
révocation des dirigeants d’associations sur incident de séance
- Civ. 1re,
19 janv. 1970, Bull. Civ. 1970, I, n°
17, p. 13.
- TGI
Bourg en Bresse, 26 nov. 1987, n° 1858/87 Inédit.
- Civ. 1re,
29 nov.1994, Rev. sociétés 1994,
p.318, note Y. Guyon ; Bull. Joly, févr. 1995, 182, obs. M. Jeantin.
Ø L’abus de
Majorité
- Com. 18
avril 1961, JCP G 1961, p. 12164,
note D. B.
- Civ. 1re,
4 avril 2006, JCP éd Entreprise, n°
40, 5 oct. 2006, note F-X Lucas.
Ø La nullité
des décisions d’AG d’associations
· La non-retroactivité
- Civ. 1re,
19 nov. 1991, RTDcom. 1992, p.413, no
18 obs. E Alfandari.
· Le rejet de la théorie du vote utile
- Civ. 1re,
27 juin 2000, Rev. sociétés 2001,
p.105, note D. Randoux.
Ø La reprise
des engagements
- CA
Versailles, 3 mai 1990, Bull. Joly,
1990, p. 648, obs. M. Jeantin.
- Civ. 1re,
4 juill. 1995, BAF, 1/95 Inf. 2, 2ème
esp.
- Civ. 1re,
5 mai 1998, n° 96-13610, Juris-associations
n° 185/1998, p. 5 cité dans « le sort des actes conclus pour une association en
formation », J. V. Prévost et F. Grillier.
Ø La survie de
la personnalité morale pour les besoins de liquidation
- Civ. 1ère,
29 juin 1971, Bull. Civ. I, n°216.
- Civ. 1ère,
11 déc. 1973, Bull. Civ. I, n°344, p.
305.
- Civ. 1re,
5 déc. 1984, n° 83-10.764, Gaz. Pal.
1985, pan. p. 174.
- Civ. 1re,
3 janv. 1985, RTD com. 1985. 325, obs. E. Alfandari et M. Jeantin.
Ø Le refus de
l’action sociale ut singuli
- Civ. 1re,
13 févr. 1979, D. 1981, p. 205, obs.
F. Alaphilippe.
Ø La faute
détachable des fonctions
- Civ. 2e,
19 fév. 1997, Bull. Civ. II, n° 53 ;
JCP G 1997, I, n° 4070, obs.Viney G. ; RTD
civ. 1998, p. 114, obs. Jourdain P.
- Com. 20
mai 2003, D. 2003, p. 2623, note B.
Dondero ; JCP G 2004, I, n°103,
Caussain J.-J., Deboissy F. et Wicker G.
- Civ. 2ème,
7 oct. 2004, Dr. sociétés, nov. 2004,
p. 17, obs. F.-X. Lucas.
TABLE DES
MATIERES
L’APPLICATION DU DROIT DES SOCIETES AUX
ASSOCIATIONS. 1
Liste des abréviations. 2
SOMMAIRE.. 4
INTRODUCTION GENERALE.. 5
Titre I : L’application du droit des sociétés
à l’association acte juridique. 10
Chapitre 1 : L’association, acte de volonté.
11
Section 1 / La volonté, condition de validité
des décisions modificatrices des statuts : L’interdiction d’augmenter les
engagements d’un sociétaire sans son consentement 12
§ 1) Le
fondement retenu : L’art. 1134 du Code civil 12
A – Le mérite de la solution : L’association,
contrat 12
1°) Le contrat d’association, loi des parties
seulement 13
2°) Le contrat d’association, loi de toutes
les parties. 13
B – Les limites de la solution. 13
1°) la référence aux statuts. 14
2°) Les limites de la référence aux statuts.
14
§ 2) Le fondement souhaitable : L’art. 1836 du
Code civil 15
A – L’évidence de la transposition. 15
1°) La décision modificatrice des statuts. 15
2°) L’augmentation des engagements des membres
du groupement 15
B – L’efficacité de la transposition. 16
1°) L’art. 1836 du Code civil en droit des
sociétés. 16
2°) Les conséquences de l’application de
l’art. 1836 aux associations. 17
Section 2 / La volonté, condition de survie de
l’acte. 17
§ 1) La transposition de la dissolution pour
justes motifs. 18
A – Le fondement contractuel 18
1°) La méconnaissance des obligations
contractuelles. 19
2°) La perte de confiance réciproque. 20
B – L’art. 1844-7-5, principe commun de
dissolution. 20
1°) La qualité pour agir 21
2°) La gravité de la mésentente. 21
§ 2) Les probabilités de transposition des
autres dispositions de l’art. 1844-7 du Code civil 22
A – Les transpositions probables. 22
1°) Les causes de dissolution issues du droit
commun des contrats. 23
2°) Les causes de dissolution résultant de la
volonté des associés. 23
B – Les
transpositions improbables. 23
1°) La réunion de toutes les parts sociales
entre une seule main. 23
2°) La dissolution pour liquidation
judiciaire. 23
Conclusion du Chapitre 1. 24
Chapitre 2 : L’association, acte
d’organisation. 25
Section 1 : L’organisation du pouvoir 25
§ 1) Le renforcement des pouvoirs des
dirigeants. 26
A – L’extension des pouvoirs du président d’association. 27
1°) Les pouvoirs internes du président 27
2°) Les pouvoirs externes du président 28
B – L’appréciation de la transposition des
pouvoirs. 28
1°) Les mérites de la transposition. 29
2°) Les limites de la transposition. 30
§ 2) La révocation des dirigeants. 31
A – La prise en compte de l’incident de
séance. 31
1°) Les conditions de l’incident de séance. 32
2°) L’incident de séance : principe commun des
groupements. 32
B – La relativité de cette prise en compte. 33
1°) L’incident de séance : Une modalité de
révocation ad nutum... 33
2°) L’inutilité de la transposition. 33
Section 2 : La
possibilité de contester le pouvoir au sein de l’organisation. 34
§ 1) L’abus de droit 34
A – L’abus de majorité. 35
1°) Les éléments constitutifs. 35
2°) L’éventualité d’un principe commun. 36
B – Les
autres abus du droit de vote. 37
1°) Les obstacles à la transposition. 37
2°) Les raisons d’espérer 38
§ 2) Les sanctions de l’abus. 39
A – Le
régime de l’action en nullité. 39
1°) La qualité pour agir 39
2°) La prescription de l’action. 39
B – Les effets de la nullité. 40
1°) L’illogisme de la transposition. 40
2°) L’isolement de la transposition. 41
Conclusion du Chapitre 2. 41
Conclusion du Titre 1. 42
Titre II : L’application du droit des sociétés
à l’association personne morale. 43
Chapitre 1 : Les effets liés à la
personnification de l’association. 45
Section 1 : L’effet sur la constitution de
l’association : La reprise des engagements. 45
§ 1) L’admission de principe de la reprise en
droit associatif. 46
A – L’admission indirecte. 46
1°) La motivation retenue. 46
2°) La reconnaissance implicite de la reprise.
47
B – L’admission directe. 47
1°) Le sort du cautionnement souscrit par
l’association non personnifiée. 47
2°) La sort des autres actes conclus avant la
personnification de l’association. 48
§ 2) Les obstacles à l’admission définitive de
la reprise en droit associatif. 49
A – Les incertitudes de la solution. 49
1°) Les modalités de la reprise. 49
2°) Les effets de la reprise. 50
B – La portée relative de la solution. 50
1°) Le principe de la reprise en droit
associatif : une construction fragile. 50
2°) Le refus
de l’article 1843 comme fondement commun du principe de la reprise. 50
Section 2 : L’effet sur la disparition de
l’association : La survie de la personnalité juridique pour les besoins de
liquidation 51
§ 1) L’opportunité de l’application de la
règle aux associations. 52
A – Les obstacles à l’application ne varietur
de la règle aux associations. 52
1°) Les obstacles juridiques. 52
2°) Les obstacles factuels. 53
B – La nécessité de l’application de la règle
aux associations. 53
1°) La nécessité de liquider 54
2°) La nécessité de garantir les intérêts des
différents protagonistes. 54
§ 2) L’application de la règle aux
associations. 55
A – La limitation de la personnalité juridique
quant aux actes. 55
1°) Les actes antérieurs. 55
2°) Les actes postérieurs. 55
B – La limitation de la personnalité juridique
dans le temps. 56
1°) La fin de la personnalité juridique avec
la dévolution des biens. 56
2°) La renaissance de la personnalité
juridique après dévolution des biens. 56
Conclusion du chapitre 1. 58
Chapitre 2 : La responsabilité civile des
dirigeants de l’association personnifiée. 59
Section 1 : La déresponsabilisation de fait
des dirigeants de l’association à l’égard des sociétaires. 60
§ 1) L’évaluation du refus jurisprudentiel de
l’action sociale ut singuli en droit
associatif. 61
A – Le fondement du refus : Le défaut
d’autorisation légale. 61
1°) Le principe de mise en œuvre de la
responsabilité des dirigeants sociaux à l’égard de la personne morale :
L’action sociale ut universi 62
2°) L’action exceptionnelle : L’action sociale
ut singuli 62
B – La critique de la décision. 63
1°) Une solution déresponsabilisant le
dirigeant fautif. 63
2°) Une solution obsolète. 64
§ 2) L’opportunité de la reconnaissance de
l’action sociale ut singuli en droit associatif. 64
A – L’action sociale ut singuli, une nécessité
pour le bon fonctionnement de l’association. 64
1°) Protéger la minorité. 65
2°) Lutter contre la dictature de la majorité.
65
B – L’absence d’obstacle technique à
l’extension de l’action sociale ut singuli aux associations. 65
1°) L’action sociale ut singuli, un droit propre du membre du groupement 66
2°) L’action sociale ut singuli, une action à caractère conservatoire. 66
Section 2 : La déresponsabilisation de fait
des dirigeants de l’association à l’égard des tiers. 67
§ 1) L’exigence d’une faute détachable des
fonctions. 67
A – La définition classique de la notion de
faute détachable des fonctions. 68
1°) Le caractère intentionnel de la faute. 68
2°) La particulière gravité de la faute. 69
B – L’élément nouveau tiré de la spécificité
de l’association. 69
1°) La faute commise par le dirigeant
d’association hors ses missions statutaires. 70
2°) La portée relative de la nouvelle
exigence. 70
§ 2) Les limites de cette transposition. 71
A – Les
limites tenant à la notion de
faute détachable. 71
1°) Les limites liées à la preuve du caractère
« détachable » de la faute du dirigeant 71
2°) Les limites liées à la mise en œuvre de la
faute détachable. 72
B – Les
limites tenant au statut particulier du dirigeant d’association. 72
1°) Les limites découlant de la qualité de
mandataire du dirigeant 73
2°) Les limites découlant du caractère
facultatif de la rémunération du dirigeant 73
Conclusion du chapitre 2. 74
Conclusion du Titre 2. 74
CONCLUSION GENERALE.. 75
BIBLIOGRAPHIE.. 76
TABLE DES MATIERES. 80
RESUME (SUMMARY)
83
RESUME (SUMMARY)
L’application
du droit des sociétés aux associations par les juges est de plus en plus
affirmée malgré les vives protestations qu’elle a suscitées.
Il
a ainsi été prétendu, que cette transposition jurisprudentielle dénaturerait
l’association. Celle-ci n’est-elle pas constituée « dans un but autre que de partager des bénéfices » à la différence
de la société ?
Mais,
derrière cette crainte d’un droit associatif dénaturé, se cache en réalité
l’ombre de la sacro-sainte loi de 1901 à laquelle il ne faut surtout pas
toucher !
Cependant,
l’examen de la jurisprudence permet de révéler, au-delà des finalités
particulières qui justifient leurs
différences, des similitudes réelles entre l’association et la société.
En
effet, l’association et la société sont bien crées par des contrats, ou plus
précisément par des actes juridiques. L’acte juridique va alors donner
naissance à un groupement organisé. Cette organisation étant limitée dans ses
effets notamment vis-à-vis des tiers, l’attribution de la personnalité morale
tant pour l’association que la société va devenir une nécessité.
Dès
lors il est possible de dégager des règles communes qui tiennent d’une part à
leur nature d’acte juridique et d’autre part à l’attribution de la personnalité
morale.
Ce
sont ces règles qui justifient l’application du droit des sociétés aux
associations.
The application of company law
to associations/societies is more and more frequent despite the strong protests
which it raises.
It was thus claimed, that this
jurisprudential transposition misrepresents the association. An association, is
it not created "with an aim other than splitting the profits" as
opposed to a corporate company?
But, behind this fear of
misrepresenting the right to associate, hides in actual fact the shadow of the
sacrosanct law of 1901 which one must absolutely not touch!
However, the study of case law
reveals, beyond the specific purposes which justify their differences, real
similarities between an association and a company.
Indeed, the association and
the company are both created by contracts, or more precisely by legal acts. The
legal act leads to the creation of an organised group. This organisation being
limited in its efforts notably with respect to third parties, becoming a legal
entity as much for an association as for a company will become a necessity.
Thus it is possible to establish common rules which relate, on the one hand, to
the legal act, and on the other hand to becoming a legal entity. It is these
rules which justify the application of Company law to associations.
[1] Rep. Min, n°56969, 10 déc. 1984, p.
5445.
[2]D. RANDOUX, Vers un droit commun des
groupements, JCP, 1996, éd. G, I,
3982.
[3] Lamy associations, Tome I, étude
111, n°39.
[4] E. ALFANDARI, Associations et
sociétés : points de rencontre, Petites
affiches 1996, n° 50, p. 47 et s
[5] Maurice COZIAN, Florence DEBOISSY,
Alain VIANDIER, Droit des sociétés, Edition
Litec, 2006 p.9 En réalité, la société et l’association peuvent entrer en
concurrence au niveau de la recherche d’économies et au niveau de
l’exploitation d’une entreprise. On sait en effet que depuis la réforme de
l’art.1832 C.civ. en 1978, la société peut avoir pour objet de « profiter de
l’économie qui pourra en résulter ».
[6] Supra
n°1.
[7] Notamment depuis Civ. 1ère, 29 nov. 1994, Rev.
Sociétés, 1994, p ;318, note Y. Guyon.
[8] P. Le Cannu, J. Foyer, V.
Grellière, Y. Guyon, D. Randoux, B. Saintourens, G. Wicker…
[9] Contre 35 au départ, les autres
articles ayant été abrogés.
[10] Les sociétaires sont privés de
démocratie. V. notamment Y. Guyon, B. Bouloc, De la démocratie dans les
associations, colloque tenu à l’université de la Sorbonne, 8 juin 2001, Rev.
Sociétés, oct. – déc. 2001.
[11] Les tiers ne sont pas protégés. V.
en ce sens P. Hoang, La protection des tiers face aux associations, thèse,
Paris 2, LGDJ diffuseur, 2002.
[12] Art. 4 du C. civ.
[13] Pratique qui consistait pour les
tribunaux, sur le fondement de la maxime que les juges doivent obéir aux lois
et qu’il leur est défendu d’interpréter, à renvoyer par des référés des
justiciables au pouvoir législatif, toutes les fois qu’il manquait de loi ou
que la loi existante leur paraissait obscure. Le Tribunal de cassation a
constamment réprimé cet abus comme un déni de justice.
[14] Livre III, Titre IX, du C. civ.
[15] Notamment le Livre II qui
reproduit les dispositions de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés
commerciales ainsi que les textes applicables aux GIE (Groupement d’intérêt
économique) et GEIE (Groupement européen d’intérêt économique).
[16] Les dispositions relatives au
droit boursier.
[17] A l’instar de la loi du 31
décembre 1990 sur la SEL (Société d’exercice libéral).
[18] Par renvoi de l’art. 1er
de la loi de 1901 aux dispositions du Code civil relatives aux contrats.
[19] Notamment les art. L 612-1 et s.
pour les associations exerçant une activité économique.
[20] Notamment la loi du 11 juillet
1985 autorisant l’émission de valeurs mobilières par certaines associations
[21] F. Lemeunier, Associations, 11ème
éd. Delmas 2005, n°221 et s.
[22] J. Rivero, G. Sousi, Y. Guyon…
[23] Droit du travail, droit des
procédures collectives, droit de la consommation.
[24]P. Hoang, thèse préc. Dans la
préface Paul Didier précise qu’on dénombre aujourd’hui environ 700 à 800000
associations employant environ 800000 salariés maniant des sommes considérables
estimées à plus de 200 milliards de francs. V. aussi F. Lemeunier, Associations,
préc. n°104 pour des chiffres revus à la hausse soit 900000 associations pour
plus de 20000000 d’adhérents , 1000000 de salariés et plus de 700000 bénévoles.
[25] Conseil National de la Vie
Associative institué par le décret du 25 févr. 1983.
[26] F. Lemeunier, Associations, préc.
n°105 et s.
[27] Comment distinguer en droit des sociétés, les règles techniques de
celles qui ne le sont pas ? Que faut-il entendre par règles techniques ?
Existe-t-il des règles techniques ? Ce critère est trop flou pour pouvoir être
mis en œuvre.
[28] La doctrine tend généralement à
exclure un qualificatif pour retenir l’autre. Ainsi, K. Rodriguez dans sa thèse
« le droit commun des personnes morales » retient la qualification de personne
morale pour son élasticité pour exclure celle de groupement à cause de sa
rigidité et son universalité (Elle vise un grand nombre d’êtres moraux). En
revanche, B. Saintourens dans sa thèse intitulée « essai sur la méthode
législative : Droit commun et Droit spécial », exclut le qualificatif de
personne morale qu’on définit toujours en référence à la personnalité morale.
Il suggère alors de retenir le qualificatif de groupement car c’est une notion
beaucoup plus certaine.
Mais dans le cadre
de cette étude, les deux qualificatifs peuvent être retenus dans la mesure où
tout groupement de personnes à l’instar de l’association et de la société est «
une personne morale potentielle ». V. en ce sens G. Wicker, personne morale, Rep.
Civ. D. juin 1998.
[29] Qui pourrait douter que l’association et la société sont créés par des
actes juridiques et peuvent acquérir la personnalité morale ?
[30] G. Cornu, Vocabulaire Juridique,
PUF, 2003.
[31] P. Didier, « Brèves notes sur le
contrat-organisation » in Mél. F. Terré, D. p. 635.
[32] P. Didier préc.
[33] D’où la notion de «
contrat-organisation ».
[34] Y. Chartrier, L’association,
contrat dans la jurisprudence récente de la Cour de cassation, Mél. Yves Guyon,
Aspects actuels du droit des affaires, D. 2003. En effet il considère que
l’association doit pouvoir fonctionner en respectant son esprit qui est fait,
en plus, du concours de volontés, « d’ouverture des membres les uns aux autres,
d’une certaine égalité entre eux » […].
[35] Sociétés, GIE …
[36] K. Rodriguez, Le droit commun des
personnes morales, Thèse Pau, 2001.
[37] Art. 1er de la loi de
1901.
[38] Pour les sociétés, c’est l’art.
1836 ; pour les syndicats de copropriétaires, c’est l’art. 81 de la loi du 10
juillet 1965
[39] Civ. 1re, 20 juin 2001,
Rev. Sociétés 2002, p. 321, note Elie Alfandari
[40] L’Association Foncière Urbaine
Libre (AFUL) est une organisation syndicale, constituée par des propriétaires
en vue de l’exécution de certains travaux. Elle a été créée par une loi du 28
juin 1868.
[41] Art. 1134 : « Les conventions
légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent
être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise.
Elles doivent être
exécutées de bonne foi ».
[42] Elie Alfandari, note sous Civ. 1ère,
20 juin 2001, préc.
[43] Civ. 3ème, 4 mai 1988,
Bull. Civ. II, n°84.
[44] E. Alfandari, P. Dutheil,
Association, D. Action 2000, n°1291.
[45] Elie Alfandari, note sous Civ. 1ère,
20 juin 2001, préc.
[46] Pour une application récente, voir
Civ. 1ère, 25 juin 2002, D. p. 2539, note Y. Chartrier.
[47] V. par exemple, Civ. 1ère,
14mars 1995, Bull. civ. I, n° 121.
[48] Civ. 1ère, 25 avril
1990, RTD Com. 1991, p. 249.
[49] Elie Alfandari, note sous Civ. 1ère, 20 juin 2001,
préc.
[50] M. Cozian, F. Deboissy A.
Viandier, Droit des sociétés, préc., n° 313 et s. Selon ces auteurs,
l’assemblée générale, même extraordinaire, ne peut imposer à un associé : de
souscrire une augmentation de capital contre son gré ; une mesure de blocage de
son compte courant ou l’incorporation du compte courant au capital ; la
transformation d’une SA ou d’une SARL en SNC ou en SAS ; l’adoption d’une
clause statutaire d’exclusion, …
[51] Préc.
[52] V. notamment K. Rodriguez, le
droit commun des personnes morales, thèse préc. § 398, p. 304. L’auteur
considère en effet que la cotisation ne peut être qualifiée d’engagement.
[53] E. Alfandari, P. Dutheil,
Association, Dalloz Action 2000 n° 1661.
[54] Com. 13 nov. 2003, JCP E 2004,
601, n°7, obs. Caussain, Deboissy et Wicker.
[55] Préc.
[56] Comme l’ont démontré Caussain,
Deboissy et Wicker dans la note précitée, la solution est critiquable dans la
mesure où l’ordre public visé par la 1386 al. 2 est une règle d’ordre public de
protection et non de direction. Dès lors elle ne saurait être sanctionnée de
nullité absolue mais de nullité relative. Et en ce cas le consentement à une
augmentation aurait privé le demandeur de qualité pour agir.
[57] La loi de 1901 étant une loi de
liberté, peut-on concevoir l’ordre public au sein des associations ? Cela
ferait sans doute renaître le débat sur la nature contractuelle ou
institutionnelle de l’association. Etant entendu que pour une partie de la
doctrine, lorsque l’ordre public avance, la liberté contractuelle recule.
[58] Clauses restrictives du droit de
vote, absence d’information des sociétaires …
[59] Contra K. Rodriguez, le droit commun des personnes morales,
précité, § 366, P. 282 qui considère que les dispositions d’ordre public ne
sauraient être prises en compte dans la rédaction du droit commun car « malgré
leur autorité supérieure, elles ne s’appliquent qu’au groupement qu’elles
régissent ».
[60] Art. 1844-7-5 du C. civ. « Par la
dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour
justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé
ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ».
[61] TGI Seine, 20 mai 1959, jur. 463,
note X ; V. aussi, E. Alfandari, P. Dutheil, Association, Dalloz Action 2000,
n° 685.
[62] Civ. 1ère, 17 oct.
1973, Bull. civ. I, n° 74 ; 10 mai 1978, 2ème esp., JCP 1979, II,
19245, note R. Savatier.
[63] Préc.
[64] F. X. Lucas, note sous Com. 8
juillet 2003, RDCO 2004, 01 avril 2004, n° 2, p. 399.
[65] Préc.
[66] V. G. Wicker, F. Deboissy, Code
des sociétés, Litec, 2007, p. 57, n° 4.
[67] CA Poitiers, 2ème ch.
civ., 24 sept. 2002, Gamaury c/ Club régional de parachutisme du Poitou :
Juris-data n° 2002-190318 ; Dr. Sociétés 2003, n° 26.
[68] Civ. 1ère, 13 mars
2007, pourvoi n° V 05-21,658, Arrêt n° 351 F-D.
[69] Com., 16 mars 1954 : JCP 1954, II,
8172, note J. R. « la mésentente n’est une cause de dissolution que lorsque,
paralysant le fonctionnement de la société, elle met en péril la situation
financière de celle-ci ».
[70] Cass. Req. 15 mars 1881 : DP 1882,
1, p. 421.
[71] G. Wicker et F. Deboissy, Code des
sociétés, Litec, 2007, p. 55 et s. n° 3, V. surtout les cas de paralysie non
démontrée.
[72] Com. 8 juill. 2003, RDCO, 01 avril
2004, n° 2, p. 399, note F.-X. Lucas.
[73] F.-X. Lucas précité.
[74] Notamment la cohabitation dans une
société moribonde du liquidateur judiciaire et du liquidateur amiable.
[75] Loi du 26 juillet 2005, art. 189
et 190 ; art. 231 du Décret du 28 décembre 2005.
[76] In « brèves notes sur le
contrat-organisation », précité.
[77] Supra, n°18
[78] G. Cornu, Vocabulaire juridique,
PUF, 2006.
[79] G. Cornu, préc.
[80] Car c’est cette conception qui
justifie les pouvoirs des dirigeants d’associations ou de sociétés. Qu’ils
soient considérés comme « mandataires sociaux » ou « organes », les pouvoirs
qui leur sont conférés sont des prérogatives juridiques, c'est-à-dire fondés en
droit. La notion de « dirigeants de fait » est donc exclue de cette étude.
[81] V. pour un exemple l’art. L 225-56
du Code de commerce.
[82] P. Hoang, La protection des tiers
face aux associations, Thèse, éd. Panthéon Assas, Paris, 2002 (LGDJ diffuseur),
p. 95, § 65.
[83] P. Hoang, précité, p. 98, § 68.
[84] P. Hoang, précité. Dans sa thèse,
l’auteur démontre que face à l’association, les tiers contractants ne
bénéficient d’aucune protection véritable. D’une part, face à ce qu’il nomme «
l’acte d’organisation » et d’autre part, face « aux actes de l’organisation ».
Qui représente l’association ? Même dans le schéma traditionnellement adopté
par les associations (Président – Bureau - Assemblée générale), l’auteur
démontre que la multiplicité et la complexité des statuts sont telles, que le
tiers ne saurait déterminer avec précision qui est censé engager l’association.
[85] F-X Lucas, note sous Civ. 1ère,
3 mai 2006, JCP E, n°47, 23 nov. 2006, V. surtout CA Pau, 2ème ch.,
1er avr. 2003, Dr sociétés 2003, comm. 206, obs. F. – X. Lucas.
[86] B. Alibert, Les statuts du
président d’association, LPA, 28 févr. 1992. L’auteur affirme en effet que : «
Le sujet du statut du président, endormi le plus souvent, explose parfois
devant une opinion publique affolée : Les spécialistes de leur côté, ne
résistent pas au plaisir de décrire la catastrophe […] sans proposer la moindre
réforme ».
[87] Civ. 1ère, 3 mai 2006,
Rev. Sociétés, p. 855, note D. Randoux, v. aussi, note F-X-Lucas sous le même
arrêt au JCP E. préc.
[88] Car cette extension des pouvoirs
du président d’association a pour conséquence de l’aligner sur le statut du
directeur général de SA.
[89] Soc. 25 nov. 2003, Bull. Joly
sociétés, 01 mars 2004, n° 3, p. 422, note C. M. Bénard.
[90] CA, Paris, 19 janv. 1989, Gaz.
Pal. 18-19 oct. 1989, pan. P. 21 obs. Ghilain.
[91] M. Cozian, A. Viandier, F.
Deboissy, Droit des sociétés, préc. n° 562.
[92] Ce qui reviendrait à croire que
cette extension aurait pour effet d’assimiler le président d’association au
directeur général de S.A.
[93] Dictionnaire, Le petit Larousse,
compact 2003, p.77.
[94] P. Hoang, Thèse préc.
[95] Les modèles varient d’une
association à l’autre. Généralement les associations recourent au modèle des
statuts-types élaborés par le Conseil d’Etat v. annexes.
[96] Com. 5 avr. 1965, n° 63-10621,
Bull. Civ. III, n° 225, p. 228
[97] Soc. 25 nov. 2003, préc.
[98] Civ. 1ère, 3 mai 2006, préc.
[99] Supra, n°9
[100] E. Alfandari, “Hiérarchie des
pouvoirs et révocabilité des mandats dans les organes des associations”, Rev.
Sociétés, 1987, p. 91
[101] Lamy Association, fasc. 204, n° 2
et 3
[102] X. Delsol, Juris. Associations,
1987, 41.
[103] Civ. 5 févr. 1991, inédit, RTD
com. 44 (2), avril – juin 1991
[104] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n° 562
[105] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n° 256
[106] Lamy Associations, Tome I, etude
204, n° 92
[107] CA Limoges, 28 mai 1991, somm. ,
p.22
[108] Com. 5 avr. 1965, n° 63-10.621,
préc. ; Civ. 1ère, 19 janv. 1970, n° 68-12.994, Bull. civ. I, n° 17, p. 13;
Civ. 1ère, 5 févr. 1991, n° 88-11.351, Bull. civ. I, n° 45, p. 29
[109] Trousset, Pouvoir et
Responsabilité dans les associations, JCP éd. CI 1984, II, n° 14268 ; Sousi,
note sous TGI Lyon, 4 déc. 1985, JCP éd. G 1987, II, n° 20725 ; Alfandari, note
sous CA Paris, 21 avril 1986, Rev. Sociétés 1987, p. 90
[110]
[111] Tandis que les dirigeants de
sociétés tiennent leurs pouvoirs de la loi, il n’en est pas de même pour les
dirigeants d’association, qui tiennent leurs pouvoirs du contrat de mandat.
[112] Civ. 1ère, 19 janv.
1970, Bull. Civ. 1970, I, n°17, p. 13; TGI Bourg en Bresse 26 nov. 1987,
n°1858/87 Inédit ; Civ. 29 nov. 1994, Lallemand, Bull. Joly, févr. 1995, 182,
obs. Jeantin
[113] K. Rodriguez, Le droit commun des
personnes morales, préc. § 397, p. 303. L’auteur estime que « Ces différences
sont en réalité théoriques : seule une révélation particulière suscitant de
vifs débats lors de la réunion permettra la révocation » […]
[114] C’est ce qui ressort de la
lecture de l’art. L225-105 du C. com.
[115] Lamy Associations, Etude 204-49,
Tome I.
[116] Civ. 1ère, 19 janv.
1970, préc.
[117] TGI Bourg en Bresse, 26 nov.
1987, préc.
[118] Civ. 29 nov. 1994, préc.
[119] K. Rodriguez, Le droit commun des
personnes morales, préc. § 397, p. 303. L’auteur pense que tous les dirigeants
ne sont pas concernés par ce principe d’une part ; d’autre part, l’introduction
du principe du contradictoire contribue à contester son utilité.
[120] Supra n°123.
[121] Supra n°123 et s.
[122] Lamy Associations, étude 204,
n°49, Tome I
[123] E. Alfandari, Rev. Sociétés 1987,
p. 90.
[124] RTD com. 49 (1), Janv. - mars
1996, p. 87
[125] RTD com. 49 (1) préc.
[126] G. Roujou de Boubée, Essai sur
l’acte juridique collectif, thèse, Toulouse, 1961
[127] C.-L. de Secondat Montesquieu, De
l’esprit des lois, Gallimard 1995, coll. Folio,
Livre XI, Chapitre IV : « C’est une expérience éternelle que tout homme
qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu’à ce qu’il trouve des
limites »
[128] L. Josserand, De l’esprit des
droits et de leur relativité, « théorie dite de l’abus des droits », D. 1939
[129] De l’esprit des droits et de leur
relativité, préc. Préface, p. XXIV
[130] De l’esprit des droits et de leur
relativité, préc. § 132, p. 182
[131] En droit des sociétés, v. Com. 18
avr. 1961, JCP 1961, p. 12164, note D. B. ; En droit des associations, v. Civ.
1ère, 4 avril 2006, JCP E, n° 40, 5 oct. 2006, note F. – X. Lucas
[132] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n° 360
[133] Ibid.
[134] F. – X. Lucas, note sous Civ. 1ère,
4 avr. 2006, préc.
[135] De l’esprit des droits… préc. ,
n° 132, p. 182
[136] V. dans ce sens F. – X. Lucas
note sous Civ. 1ère, 4 avr. 2006 préc.
[137] Expression tirée du Droit des
sociétés, Litec 2006, préc. Ière Partie, Chap. X, Sous-section 2 : « L’abus du
droit de vote »
[138] Selon, Cozian, Deboissy,
Viandier in Droit des sociétés, Litec
2006, préc. n° 367« L’abus d’égalité n’est qu’une variété d’abus de minorité et
est soumise au même régime ».
[139] A. Constantin, La tyrannie des
faibles – De l’abus de minorité en droit des sociétés : Mél. Y. Guyon, D. 2003,
p. 213
[140] De la démocratie dans les
associations, préc.
[141]
Civ. 1ère, 13 févr. 1979 : D. 1981, 205, note Alaphilippe,
voir infra n°377
[142]Pour l’action sociale ut singuli
voir infra n°374 et s.
[143]Pour l’abus de minorité v. L’arrêt
Flandin, Com. 9 mars 1993, JCP E 1993, 448, note A. Viandier ; Pour l’abus
d’égalité v. Com. 8 juill. 1997, Bull. Joly 1997, p. 890, obs. E. Lepoutre
[144] Supra n°65 et s.
[145] De l’esprit des droits… préc, n°
132, p. 182
[146] Droit des sociétés, n° 362, Litec
2006, préc. Selon les auteurs, les deux actions reposent sur des fondements
différents. L’action en responsabilité est fondée sur l’article 1382 du Code
civil (il faut donc que le demandeur apporte la preuve d’un préjudice) et est
soumise à la prescription décennale. L’action en annulation de la délibération
abusive est fondée sur l’article 1844-10 du Code civil et se prescrit en
principe par trois ans, sauf application d’une prescription plus courte.
Conformément à l’article 31 du NCPC, cette action est ouverte à tous ceux qui
peuvent se prévaloir d’un intérêt légitime, les associés minoritaires mais
aussi un dirigeant agissant au nom de la société. […] Autre différence, tandis
que l’action en réparation doit être dirigée contre les associés majoritaires,
l’action en annulation doit être intentée contre la société : il aurait erreur
d’aiguillage à réclamer des dommages-intérêts à la société.
[147] Droit des sociétés, Litec 2006,
préc., n° 402. Les auteurs démontrent qu’il existe de nombreux obstacles à la
qualité pour agir en droit des sociétés, et notamment la question de la
détermination des personnes susceptibles d’invoquer la nullité d’une décision
sociale.
[148] Lamy Associations, Tome I, étude
214, n°82
[149] CA Besançon, 23 janv. 1901, DP
1904, 2, p. 46.
[150] Lamy Associations, Tome I, étude
214, n°79.
[151] CA Paris, 23 nov. 1999, Bull.
Joly 2000, p. 333, n° 3, note Noémie.
[152] Civ. 1ère, 9 janv.
1996, n° 94-11550.
[153] CA Paris, 25 nov. 1977, Gaz. Pal.
1978, jur. , p. 316, note A.P.S. , et rejet du pourvoi par Civ. 1ère,
10 juill. 1979, Bull. civ. I, n° 202, p. 162.
[154] Civ. 1ère, 19 nov.
1991, Dr. Sociétés, janv. 1992, 25, obs. T. Bonneau
[155] Civ. 1ère, 27 juin
2000, Rev. Sociétés, janv. – mars 2001, note D. Randoux
[156] D. Randoux, note sous Civ. 1ère,
27 juin 2000, préc.
[157] Elle est mystique car on ne sait
pas ce qu’elle signifie. Outre les travaux de M. Hauriou, la doctrine ne
s’accorde pas sur une définition de la notion d’institution. Généralement on la
définit par opposition au contrat : Ce qui n’est pas contractuel est
institutionnel et vice versa.
[158] C’est ce qui ressort de la
lecture de l’art. 2 de la loi du 1er juillet 1901 : « Les
associations de personnes pourront se former librement sans autorisation ni
déclaration préalable ».
[159] E. Alfandari, Associations,
Dalloz Action 2000, préc. n° 153. Selon l’auteur l’association non déclarée
peut en fait : avoir une dénomination, contracter par la technique du mandat,
percevoir des cotisations et droits d’entrée (qui demeurent la propriété
collective de ses membres), …
[160] E. Alfandari, Associations,
Dalloz Action 2000, préc. n° 150.
[161] Art. 17 loi de 1901 ; v. en ce
sens CAA Paris, 18 mai 1995, BAF n° 1-95, inf. 2, 1ère esp.
[162] E. Alfandari, Associations,
Dalloz Action 2000, préc. n° 152.
[163] Sociétés en participation,
sociétés en formation.
[164] C’est le cas des sociétés en
participation qui sont “occultes”.
[165] C’est ce qui explique qu’avant la
réforme de 1966, l’acquisition de la personnalité morale coïncidait avec la
conclusion de l’acte constitutif.
[166] G. Wicker, Personne morale, Rep.
civ. Dalloz, 1998, n° 20.
[167] G. Wicker, Personne morale, préc.
[168] G. Wicker, Personne morale, préc.
[169] E. Thaller, Traité élémentaire de
droit commercial, préc. n°230 et s.
[170] Les art. 5 et 11 de la loi de
1901 prévoient que les associations simplement publiées peuvent ester en
justice, acquérir à titre onéreux, posséder et administrer des cotisations de
ses membres pourvu qu’elles ne dépassent pas 16 euros, le local destiné à l’administration
de l’association et à la réunion de ses membres, les immeubles strictement
nécessaires à l’accomplissement de leur but. Les art. 10 et 11 régissent pour leur part l’association
reconnue d’utilité publique. Elle dispose certes d’une plus grande capacité,
mais elle ne peut acquérir d’autres immeubles que ceux nécessaires au but
qu’elle se propose.
[171] E. Thaller, Traité élémentaire de
droit commercial, préc. n°230.
[172] C. Gavalda, « La personnalité
morale des sociétés en voie de liquidation », Mél. Hamel, Dalloz, 1961, p. 253
[173] V. K. Rodriguez, Le droit commun
des personnes morales, Thèse, préc. L’auteur démontre l’existence de principes
communs aux personnes morales.
[174] E. Alfandari, Association et
société : points de rencontre, préc.
[175] Abus de pouvoir, intérêt social,
objet social.
[176] Art. 1843 du C. civ.
[177] Art. 1844-8 du C. civ. et L 237-2
du C. com.
[178] CA Versailles, 3 mai 1990, Bull.
Joly, 1990, p. 648, obs. M. Jeantin ; Civ. 1ère, 4 juillet 1995,
BAF, 1/95 Inf. 2. 2ème espèce ; Civ. 5 mai 1998, n°96-13610.
[179] V. en ce sens K. Rodriguez, thèse
préc. n°395 et s. Selon l’auteur, « les fondateurs pouvaient insérer dans les
contrats conclus pour le compte de l’association en formation, une clause
résolutoire de l’engagement du fondateur
au jour de l’acquisition de la personnalité morale par le groupement. Le
fondateur pouvait également conclure l’acte sous la condition suspensive de
ratification par la personne morale […] ».
[180] V. K. Rodriguez, thèse préc. n°
395 et s. Selon l’auteur, « à défaut de stipulation contractuelle, autrement
dit, par principe, aucune reprise n’est prévue ; de plus, en présence d’une
telle stipulation, la reprise n’est pas rétroactive […] ».
[181] CA Versailles, 3 mai 1990, préc.
[182] Le représentant de la société de
publicité, présent à l’assemblée des commerçants, « pouvait légitimement croire
à l’existence de l’association et à la régularité de l’adoption du projet ».
[183] C’est en cette qualité que le «
délégué de gestion aurait engagé l’association en formation ».
[184] M. Jeantin, obs. sous CA
Versailles, 3 mai 1990, préc.
[185] Civ. 1ère, 5 mai 1998,
Juris-associations n° 185/1998, p. 5, « Le sort des actes conclus pour une
association en formation », J. V. Prevost et F. Grillier.
[186] Aujourd’hui art. 2292 du C. civ.
[187] Civ. 1ère, 4 juillet
1995, préc.
[188] V. notamment K. Rodriguez, thèse,
préc. n° 395, p. 302.
[189] En vertu du principe de liberté
statutaire, toutes les combinaisons sont envisageables pour la détermination
des modalités de vote même les plus folles. La cour de cassation ayant admis la
validité de clauses privant certains sociétaires de droit de vote. V. Supra n°42.
[190] Juris-associations, préc.
[191] Juris-associations préc.
[192] K. Rodriguez, thèse préc.
[193] Clauses restreignant le droit de
vote ; clauses aménageant le droit de vote au profit des membres fondateurs tel
le droit de vote plural etc. ; clauses supprimant le droit de vote de certains
membres.
[194] K. Rodriguez, thèse préc.
[195] K. Rodriguez, thèse préc.
[196] Notamment l’art. 1843 du C. civ.
[197] P. Hoang, La protection des tiers
face aux associations, thèse préc.
[198] V. les articles 1844-15 du C.
civ. (La nullité produit les effets de la dissolution), 1844-8 du C. civ. et L
237-2 du C. com. (En cas de dissolution, la personnalité morale subsiste pour
les besoins de liquidation).
[199] Article 14 du Décret du 16 août
1901 : « Si les statuts n’ont pas prévu les conditions de liquidation et de
dévolution des biens d’une association en cas de dissolution, par quelque mode
que ce soit, ou si l’assemblée générale qui prononce la dissolution volontaire
n’a pas pris de décision à cet égard, le tribunal, à la requête du ministère
public nomme un curateur. Ce curateur provoque dans le délai déterminé par le
tribunal, la réunion d’une assemblée générale dont le mandat est uniquement de
statuer sur la dévolution des biens […] ».
[200] P. Hoang, thèse préc. n°223 in
fine, p. 268.
[201] préc.
[202] P. Hoang, thèse précitée, n° 225,
p. 271.
[203] P. Hoang, thèse précitée, n° 224,
p. 269. La définition généralement retenue est celle de M. Jeantin, B. Saintourens,
Ripert et Roblot, P. Didier, P. Merle.
[204] P. Hoang, thèse précitée, n° 224,
p. 269.
[205] P. Hoang, thèse précitée, n° 225,
p. 271.
[206] P. Hoang, thèse précitée, n° 227
et 228, p. 272 et s.
[207] Ce sera le cas des associations
fidèles à la conception originelle voulu par la loi de 1901.
[208] P. Hoang, thèse précitée, n° 229 ab initio, p. 277.
[209] P. Hoang, thèse précitée, n° 229,
p. 279.
[210] Hypothèse dans laquelle les
sociétaires pourraient décider de ne pas ouvrir une période de liquidation tout
en sachant qu’il existe des éléments à liquider.
[211] K. Rodriguez, thèse précitée, n°
393, p. 301.
[212] C. Gavalda, « La personnalité
morale des sociétés en voie de liquidation », préc.
[213] C. Gavalda, « La personnalité
morale des sociétés en voie de liquidation », préc. n°4, p. 255.
[214] C. Gavalda, « La personnalité
morale des sociétés en voie de liquidation », préc. n°4 et 5, p. 255.
[215] M. Béhar-Touchais et C. Legros,
Associations, Rep. Civ. Dalloz, janv. 2003, n°274 ; Lamy associations, Tome I,
étude 305, n°14. Cass. 1ère civ. 29 juin 1971, Bull. Civ. I, n°216; Cass. Civ.
1ère, 11 déc. 1973, Bull. Civ. I, n°344, p. 305; Cass. Civ. 1ère, 5 déc. 1984,
n° 83-10.764, Gaz. Pal. 1985, pan. p. 174; Cass. Civ. 1ère, 3 janv. 1985, RTD
com. 1985. 325, obs. E. Alfandari et M.
Jeantin; Cass. Civ. 3ème, 4 oct. 1995, RTD com. 1996, 88, n°12, obs. E.
Alfandari et M. Jeantin, Dalloz Affaires 1995, p. 94, Dr. Sociétés 1995, n°234,
p. 6, Rev. Sociétés 1996, p. 102, note Y. Guyon.
[216] Lamy associations, Tome I, étude
305, préc.
[217] Lamy associations, Tome I, étude
305, n° 16.
[218] F. Lemeunier, Associations, 11ème
édition, Delmas 2005, n° 1430, p. 183.
[219] F. Lemeunier, Associations, préc.
n°1431.
[220] Lamy associations, Tome I, étude
305, n°16.
[221] Art. 1848
[222] Civ. 1ère, 11 déc.
1973, préc.
[223] TGI Troyes, 18 mars 1981 cité
dans Lamy associations, Tome I, étude 305, n°17
[224] Après publication de leur
déclaration, la plupart des associations n’y font plus recours ni pour signaler
les changements intervenus en cours d’existence, ni pour informer les tiers de
leur disparition.
[225] Civ. 1ère, 11 déc.
1973, préc.
[226] Civ. 1ère, 11 déc.
1973, préc.
[227] En ce sens v. Lamy associations,
Tome I, étude 305, n° 17
[228] Pour les intérêts d’une
prolongation de la personnalité morale (dans une transformation notamment) voir
C. Gavalda, « La personnalité morale des sociétés en voie de liquidation »,
préc. n°24, p.265. Pour la renaissance de la personnalité morale « pour les
besoins de la cause » après liquidation, voir A. Bouilloux, La survie de la
personnalité morale pour les besoins de liquidation, Rev. Sociétés, 1994, p.
405 et 406.
[229] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n°586.
[230] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n°585. Les auteurs parlent de «
responsabilité exceptionnelle envers les tiers ».
[231] M. Cozian, F. Deboissy, A.
Viandier, Droit des sociétés, préc. n°587. Les auteurs considèrent que la
responsabilité du dirigeant envers la société ou les associés est ordinaire.
[232] En ce sens, v. J.-C. Pagnucco,
L’action sociale ut singuli et ut universi en droit des groupements,
thèse Bordeaux IV, novembre 2005, n°358.
[233] J.-C. Pagnucco, thèse préc. n°
358. Ici l’auteur démontre que : « si le groupement n’est pas personnifié, la
poursuite de la réparation du préjudice social doit cependant s’opérer en deux
temps. Le cas de la société en participation constitue en la matière l’exemple
le plus éloquent. La société en participation est une vraie société […]
cependant, faute d’immatriculation et d’octroi effectif de la personnalité
juridique […], cette réalité n’est pas opposable aux tiers. Chaque associé peut
donc agir en responsabilité contre le gérant fautif […] et recueillir
personnellement les dommages-intérêts octroyés en réparation de ce préjudice.
Il est néanmoins tenu, en vertu de l’acte constitutif de la société occulte,
d’affecter les fonds obtenus à la réalisation du but commun poursuivi ». Alors
que pour un groupement personnifié, les dommages-intérêts résultant de l’action
sociale sont versés directement au groupement, et ce quelque soit la qualité de
celui qui l’a initiée en justice, et malgré les frais qu’il a engagés.
[234] Pour un exposé des deux théories,
v. Lamy associations, étude 268, n°90.
[235] Pour un exemple clair de
contradiction v. G. Wicker, Personne morale, préc. n°76 qui milite en faveur de
la thèse du mandat et G. Chabot, Réflexions sur la responsabilité civile de
l’association et ses dirigeants, Rép. Du Notariat Defrénois, 15 juill. 1999,
n°13-14, n°37 et s. p. 769 et s. Ce
dernier milite en faveur de la théorie organique.
Quant à la
jurisprudence, elle ne fait montre d’aucune cohérence, ce qui impose un examen
au cas par cas.
[236] Lamy associations, Tome I, étude
268, n°90 et s.
[237] Lamy associations, préc. étude
268, n° 90 in fine.
[238] C'est-à-dire l’action sociale
intentée par les représentants de la personne morale contre les dirigeants
fautifs.
[239] C'est-à-dire l’action sociale
intentée par les associés contre les dirigeants sociaux.
[240] Par laquelle l’associé demande
réparation d’un préjudice qui lui est personnel.
[241] Civ. 1ère, 13 févr.
1979, D. 1981, p. 205 et s., note F. Alaphilippe.
[242] F. Alaphilippe, note préc. n°4.
[243] J.-C. Pagnucco, L’action sociale ut singuli et ut universi en droit des groupements, thèse, Bordeaux IV, nov.
2005, n°347 in fine.
[244] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°273.
[245] Comme c’est le cas pour les
sociétés.
[246] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°276.
[247] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°353. Cette caractéristique des groupements personnifiés est selon l’auteur,
la possibilité de se doter « d’organes aptes à exprimer la volonté collective
».
[248] J-C. Pagnucco thèse préc. n°336
et s.
[249] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°348.
[250] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°351.
[251] Elle était uniquement admise pour
la plupart des sociétés commerciales en vertu de la loi du 24 juillet 1966.
[252] V. Paris, 8 mai 1978, Gaz. Pal.,
2 nov. 1978, p. 520 et s., note A. P. S.
[253] J.-C. Pagnucco, thèse préc. n°339
et s.
[254] V. l’art. 1843-5 du C. civ.
institué par loi du 05/01/88 : « […] outre l’action en réparation du préjudice
subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l’action
sociale en responsabilité contre les dirigeants ».
[255] J.-C. Pagnucco, thèse préc. n°352
in fine.
[256] Supra n°158-4.
[257] V. J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°274 et s.
[258] Notamment J.-C. Pagnucco, thèse
préc.
[259] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°274.
[260] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°274.
[261] J.-C. Pagnucco, thèse préc. n°
353.
[262] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°274.
[263] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°274.
[264] J.-C. Pagnucco, thèse préc.
n°276.
[265] Civ. 2ème, 19 févr.
1997, JCP éd. G 1997, I, n°4070, obs. Viney G., RTD civ. 1998, p. 114, obs.
Jourdain P. ; Civ. 2ème, 7 oct. 2004, Dr. Sociétés, nov. 2004, p. 17
obs. F. – X. Lucas.
[266] Lamy Droit de la responsabilité,
coll. Lamy Droit civil étude 483, n°39. Font partie du domaine de la faute
détachable des fonctions : Le gérant de SARL (Com. 22 mai 2001 n°98-16.379,
Bull. Joly 2001, p. 995, § 228, note Barbiéri J-F.) dont la solution est
transposable au gérant de SNC pour la doctrine ; le président du conseil
d’administration de la SA (Com. 9 mai 2001, n°98-10.260, Bull. Joly 2001, p.
1020, § 234, note Barbiéri J-F.); les administrateurs (CA Versailles, 17 janv.
2002, Bull. Joly 2002, p. 515, § 111, note Barbiéri J-F.) ; le gérant de SCI
(Civ. 3ème, 17 mars 1999, n°97-19.293, RTD com. 1999, p. 690, obs.
Monsérié-Bon M.-H.). En revanche, sont exclus du domaine de la faute détachable
des fonctions : Les membres du conseil de surveillance et les dirigeants de
fait.
[267] Lamy Droit de la responsabilité,
préc. étude 483, n°41.
[268] Com. 20 mai 2003, D. 2003, p.
2623, note B. Dondero.
[269] Faute incompatible avec
l’exercice normal des fonctions – Faute intentionnelle – Faute d’une
particulière gravité. C’est l’analyse retenue par le Lamy Droit de la
responsabilité, préc. étude 483, n° 41.
[270] V. notamment M. Cozian, F.
Deboissy, A. Viandier, Droit des sociétés, préc. n°268, p. 130.
[271] V. en ce sens, Caussain J.-J.,
Deboissy F. et Wicker G., JCP éd. G 2004, I, n°103.
[272] Lamy Droit de la responsabilité,
préc. étude 483, n° 41, b).
[273] V. notamment Caussain, Deboissy
et Wicker obs. préc. p. 71 qui considèrent que cette exclusion est « une prime
à (…) l’incompétence ».
[274] Civ. 2ème, 19 févr.
1997, JCP éd. G préc.
[275] Lamy Droit de la responsabilité,
préc. étude 483, n°41, c).
[276] Certains auteurs y voient une «
faute lourde » : Caussain, Deboissy, Wicker, JCP éd. G 2004 préc., aussi
Cozian, Deboissy, Viandier, Droit des sociétés, préc. n° 269 in fine, p.130 et
d’autres au contraire excluent cette qualification : Champaud C. et Danet D.,
Chazal J.-P. et Rheinard Y., RTD com 2003 p.p. 741 et 523 respectivement.
[277] La jurisprudence se contente de
transposer la construction de la faute détachable à l’univers des associations.
[278] Civ. 2ème, 7 oct.
2004, préc.
[279] Civ. 2ème, 7 oct.
2004, préc.
[280] Contre F-X Lucas, note sous Civ.
2ème, 7 oct. 2004, préc.
[281] En ce sens, Lamy associations,
préc. étude 483, n°41 : « La critique est sévère car toute définition par
nature comporte des limites délicates à tracer. Faut-il rappeler la difficulté
qu’il y a, d’une manière générale, à qualifier la notion de faute en droit
privé ».
[282] B. Petit et Y. Reinhard, La
responsabilité civile des dirigeants, RTD com. 1997, 282, spéc. p. 292.
[283] P. Hoang, La protection des tiers
face aux associations, Thèse préc. n°370, p. 423.
[284] B. Petit et Y. Reinhard, La
responsabilité civile des dirigeants, préc. ; G. Auzero, Responsabilité
personnelle des dirigeants sociaux et des préposés : l’application de la notion
de faute détachable des fonctions en droit privé, D. Aff. 1998, p. 502.
[285] P. Hoang, Thèse préc. n°370,
préc. et n° 371 p. 424.
[286] J.-J. Caussain, F. Deboissy, G.
Wicker, JCP éd. G 2004 préc.
[287] R. Viricelle, Responsabilité
personnelle des dirigeants : notion de faute séparable, RJDA 8-9/03, p. 717.
[288] V. notamment Civ. 1ère
1984, Bull. Civ. 1984, I, n°47, p. 41 : « Mais attendu que le mandataire est
personnellement responsable envers les tiers des délits ou quasi-délits qu’il
peut commettre à leur préjudice dans l’accomplissement de sa mission, la faute
pouvant consister aussi bien dans une abstention que dans un acte positif […]».
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