mercredi 30 mai 2018

L’APPLICATION DU DROIT DES SOCIETES AUX ASSOCIATIONS CHAPITRE 1





































UNIVERSITE MONTESQUIEU - BORDEAUX IV

DROIT, SCIENCES SOCIALES ET POLITIQUES
SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION
L’APPLICATION DU DROIT DES SOCIETES AUX ASSOCIATIONS



Présenté par
Jacques - Brice MOMNOUGUI

Mémoire pour l’obtention du Master II Droit privé fondamental : Dominante Droit des affaires







Sous la direction de Mme Florence Deboissy
Professeur à l’Université Montesquieu – Bordeaux IV

Année Universitaire 2006 – 2007

Liste des abréviations

AJ                                                         Actualité Juridique
Al.                                                        Alinéa
Art.                                                       Article
Ass. Plén.                                              Assemblée plénière

Bull.                                                      Bulletin des arrêts de la Cour de cassation
BODACC                                             Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales
Bull. Joly                                              Bulletin Joly

Cass. civ.                                              Cour de cassation, chambre civile
Cass. com.                                            Cour de cassation, chambre commerciale
Cass. soc.                                              Cour de cassation, chambre sociale
C.                                                          Code
C. ass.                                                   Cour d’assises
C. civ.                                                   Code civil
C. com.                                                 Code de commerce
C. trav.                                                  Code du travail
Chap.                                                    Chapitre
Chron.                                                  Chronique
Concl.                                                   Conclusions

D.                                                         Recueil Dalloz
Décr.                                                     Décret

Gaz. Pal.                                               Gazette du Palais

JCP                                                       Juris-Classeur périodique (Semaine juridique)
JO                                                         Journal officiel
J.-Cl. Soc.                                             Juris-Classeur Sociétés

L.                                                          Loi
NCPC                                                   Nouveau Code de procédure civile

Op. cit.                                                  Ouvrage déjà cité
Ord.                                                      Ordonnance

Rev. Sociétés                                        Revue des sociétés
RJ com.                                                Revue de jurisprudence commerciale
RTD Civ.                                              Revue trimestrielle de droit civil
RTD Com.                                            Revue trimestrielle de droit commercial

SOMMAIRE



TITRE I : L’application du droit des sociétés à l’association acte juridique

CHAPITRE 1 : L’ASSOCIATION, ACTE DE VOLONTE

Section 1 : La volonté, condition de validité des décisions modificatrices des statuts
Section 2 : La volonté, condition de survie de l’acte

CHAPITRE 2 : L’ASSOCIATION, ACTE D’ORGANISATION

Section 1 : L’organisation du pouvoir
Section 2 : La possibilité de contester le pouvoir au sein de l’organisation


TITRE II : L’application du droit des sociétés à l’association personne morale

CHAPITRE 1 : LES EFFETS LIES A LA PERSONNIFICATION DE L’ASSOCIATION

Section 1 : L’effet sur la constitution de l’association : La reprise des engagements

Section 2 : L’effet sur la disparition de l’association : La survie de la personnalité juridique pour les besoins de la liquidation


CHAPITRE 2 : LA RESPONSABILITE CIVILE DES DIRIGEANTS DE L’ASSOCIATION PERSONNIFIEE

Section 1 : La déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des sociétaires

Section 2 : La déresponsabilisation de fait des dirigeants de l’association à l’égard des tiers

   INTRODUCTION GENERALE


1. « La loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ne fait aucune référence au droit des sociétés dont il puisse résulter que des règles applicables au droit des sociétés soient transposables aux associations »[1] .
De prime abord, il serait tentant d’accorder du crédit à cette réponse ministérielle dans la mesure où, l’une des spécificités du droit privé français est la diversité de ses groupements.
2. Cette caractéristique est en fait une richesse[2] puisque, en fonction des buts poursuivis par les fondateurs, ceux-ci peuvent librement se doter d’une structure appropriée.
 Ainsi, lorsque le but est de partager les bénéfices ou profiter d’une économie, les fondateurs feront le choix de la société puisqu’elle est «instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou profiter de l’économie qui pourra en résulter » au sens de l’Art.1832 al.1er du Code civil.
Quant à l’association, elle sera choisie par ceux dont le but n’est pas le partage de bénéfices. L’Art.1er de la loi de 1901 dispose en effet que : « L’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. Elle est régie quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations  ».
3. Il s’en suit donc que l’association n’est pas la société, et la société n’est pas l’association. Plus radicalement encore, il semble que l’association se situe à l’opposé de la société. Cette opposition a été voulue par le législateur en 1901. En effet, à la lecture des travaux préparatoires de la loi de 1901 il ressort clairement que les parlementaires ont conçu l’association comme se situant à l’opposé le plus extrême de la société, puisque ils sont partis de la définition de la société pour retenir une définition exactement contraire de l’association[3].
4. Partant de là, plusieurs arguments ont été avancés pour critiquer l’application par les juges du droit des sociétés aux associations.
Il a d’abord été soutenu, que cette application ne serait que la résultante d’un certain laxisme des juges qui au lieu d’interpréter le contrat d’association, cèdent par facilité à la transposition des règles du droit des sociétés.
Il a aussi été soutenu que la transposition jurisprudentielle constituait une atteinte à la liberté contractuelle et une violation de l’art. 1er de la loi de 1901.
Il a enfin été avancé que cette transposition visait à faire de l’association une société, ce qui consisterait en fait à la dénaturer.
5. Ces fortes critiques peuvent toutes se résumer en une seule : L’opposition radicale entre l’association et la société. Cette opposition peut cependant être relativisée. En effet, d’une part, il existe des points de rencontre entre elles[4] et d’autre part, elles peuvent entrer en concurrence[5].
6. De même, doit être relativisée la réponse ministérielle du 10 décembre 1984[6] puisque les juges continuent d’appliquer le droit des sociétés à des associations. Ceci revient à considérer comme nulle la valeur juridique d’une réponse ministérielle.
7. Au demeurant, cette transposition jurisprudentielle qui a commencé timidement dans les années 60 du siècle dernier, est devenu au cours de ces dernières années[7], par la profusion des arrêts, un véritable phénomène. De plus, la jurisprudence tend aujourd’hui à construire ce qui constituerait peut-être le « droit commun des groupements » que beaucoup appellent de leurs vœux[8].
8. Partant de là cette transposition peut être justifiée aux plans politique et technique.
Au plan politique, la loi de 1901, qui a institué la liberté d’association exhibe de nombreuses carences. Fière de ses 18 articles[9], elle ne dit mot sur l’organisation du groupement associatif, qu’elle abandonne aux fondateurs. Ce dessaisissement du législateur qui a été qualifié « de principe de liberté statutaire » aboutit en fait à un libertinage dangereux tant pour les sociétaires[10] que pour les tiers[11].
Au plan technique, il n’y a pas de déni de justice[12], le référé législatif[13] n’existe plus, donc les juges ne peuvent que statuer. Par ailleurs, le droit des sociétés s’est beaucoup développé, à la différence du droit associatif.
Par droit des sociétés aujourd’hui, il faut entendre le Code civil[14], le Code de commerce[15], le Code Monétaire et Financier[16] et des lois non codifiées[17]. Le droit des associations quant à lui est issu pour l’essentiel de la loi de 1901 et son décret d’application du 16 août 1901, du Code civil par renvoi[18], du Code de commerce[19], de certaines lois non codifiées[20] et de nombreux textes dérogatoires au droit commun[21]. Le droit associatif est donc aussi vaste que le droit des sociétés, avec cette différence que la loi de 1901 qui constitue le socle du droit commun des associations n’a fait l’objet que de timides retouches. Le contrat d’association, tel qu’il résulte de cette Loi, n’a jamais été modifié à la différence du contrat de société.
Et si on a pu plaider pour le maintien tel quel de cette Loi[22], c’est en réalité parce qu’elle a répondu à un vœu séculaire, voire millénaire : La liberté d’association. Mais en réalité, le constat généralement opéré est de parler de « carences » du droit associatif, face aux « excès » du droit des sociétés.
 9. Le recours au droit des sociétés opéré par les juges saisis est donc justifié. Bien plus, il est nécessaire car il permet de combler le vide juridique laissé par la loi de 1901. La méthode utilisée est le raisonnement a pari ou par analogie. Il s’agit d’une méthode exégétique d’interprétation de la Loi qui consiste pour le juge à remonter à la ratio legis, c'est-à-dire à l’esprit du législateur pour appliquer dans le silence d’une Loi d’autres règles issues d’autres Lois et dont le but est de régir la même situation.
10. Si les juges raisonnent a pari c’est qu’ils considèrent que les solutions du droit des sociétés sont transposables aux associations. Ils affirment donc de manière indirecte qu’il s’agit de deux choses du même genre. Le législateur semble raisonner pareillement lorsqu’il réunit l’association et la société à travers le droit commun de l’entreprise[23].
11. Si l’application du droit des sociétés aux associations aboutit à réunir deux groupements que tout opposait, il ne faudrait pas qu’on en arrive à les confondre. Il importe donc de vérifier que les juges ont bien respecté cette exigence. Encore faut-il rechercher au préalable les fondements de cette transposition. Pour ce faire, il convient de se demander : quelles sont les fondements des règles juridiques qui sont transposées ? Quelle est la portée de cette transposition ?
12. L’application du droit des sociétés aux associations présente des intérêts pratique et théorique.
D’un point de vue pratique, d’une part, le rôle des associations dans la vie publique et sociale s’est fortement accru : des associations caritatives, cultuelles, intellectuelles aux associations de consommateurs, raciales, de défense des sans-papiers. Les associations sont partout et naissent chaque jour. Ce phénomène associatif[24] a provoqué l’institution du CNVA[25] qui est chargé d’étudier et de suivre l’ensemble des questions intéressant la vie associative, de donner son avis sur les projets de textes législatifs ou réglementaires et proposer les mesures utiles au développement de la vie associative[26]. D’autre part, il s’agit aussi de savoir si au fur et à mesure des transpositions, l’association serait devenue une société.
D’un point de vue théorique, l’application du droit des sociétés aux associations a suscités en doctrine, un vif débat quant aux règles qu’il fallait transposer pour éviter de dénaturer l’association. Il a ainsi été proposé de se fonder soit sur des « règles techniques » soit sur des règles issues des « principes communs des personnes morales » ou des « principes communs des groupements ».
Si le fondement des « règles techniques » semble délicat dans sa mise en œuvre[27], il n’est pas superflu d’imaginer les principes communs des groupements ou des personnes morales. Les deux qualificatifs, seront retenus ici, pour la simple raison, qu’ils ne sont pas incompatibles[28].
13. Dans le cadre de cette étude, les fondements qui ont été retenus pourraient aboutir à un consensus doctrinal tout en rassurant la pratique[29]. Ces fondements sont « l’acte juridique » et la « personnalité morale ». Dès lors, il sera successivement envisagé l’application du droit des sociétés à l’association acte juridique (Titre I) et l’application du droit des sociétés à l’association personne morale (Titre II).

Titre I : L’application du droit des sociétés à l’association acte juridique

14. Par acte juridique, il faut entendre : « une opération juridique (negotium) consistant en une manifestation de la volonté (publique ou privée, unilatérale, plurilatérale ou collective) ayant pour objet et pour effet de produire une conséquence juridique (établissement d’une règle, modification d’une situation juridique, création d’un droit, etc.)[30] ».
15. L’association et la société sont deux actes juridiques car ils sont issus d’une manifestation de volonté, et produisent des effets de droit. Il s’agit d’actes juridiques particuliers, distincts des autres pour un certain nombre de raisons.
 D’abord, ils se distinguent des autres actes juridiques par la présence d’un intérêt commun. Ce ne sont donc pas des « jeux à somme nulle où l’un perd ce que l’autre gagne [31] » dépourvus de possibilités d’expression collective et de représentation. Il s’agirait plutôt d’ « un jeu de coopération où tous les joueurs gagnent et perdent en même temps[32] ».
Ensuite, ils se caractérisent aussi par le fait qu’ils créent une organisation[33], une structure dotée d’organes qui se répartissent le pouvoir, et émettent des actes juridiques dont la portée a largement au-delà de la simple structure sociale.
16. En tenant compte de cette réalité, les juges ont appliqué à des associations un certain nombre de règles issues de leur nature commune d’acte juridique avec la société.
17. En tant qu’acte juridique, l’association est donc un acte de volonté (Chapitre 1) dont l’effet est de créer une organisation. Et en cela, elle est aussi un acte d’organisation (Chapitre2).

Chapitre 1 : L’association, acte de volonté

18. L’association est un acte de volonté car elle est créée par au moins deux personnes qui expriment une volonté commune. Cette volonté délimite en fait l’animus du groupement associatif qui est constitué entre autres « d’un concours de volontés pour remplir l’objet social [34] ».
19. Ce concours de volontés se retrouve en fait au delà des associations, dans tous les groupements volontaires de droit privé[35]. Cela justifie sans doute qu’un auteur l’ait érigé au rang de principe commun à tous les groupements sous le vocable d’affectio collaborationis[36].
20. À la naissance de l’acte, ses créateurs sont animés d’une volonté d’être ensemble. Ils se choisissent et s’engagent à employer « leurs connaissances à la réalisation d’un but autre que le partage des bénéfices »[37].
21. Mais, une fois l’acte créé, l’association va se doter d’une possibilité d’expression collective. La volonté de tout un chacun se manifeste alors par la participation à l’assemblée générale à travers l’expression d’un droit de vote. Certes, les décisions sont prises à la majorité et s’imposent même à ceux qui n’y ont pas consenti. Mais quid lorsque ces dernières modifient les statuts en augmentant les engagements des sociétaires ?
22. Enfin, l’existence de l’acte est conditionnée par cette volonté commune, et la disparition de cette volontas suffit à entraîner la disparition de l’acte. Mais à quelles conditions ?
23. Saisis par les associations, les juges n’ont pas hésité, en recourant au droit des sociétés, à affirmer le rôle de la volonté dans le fonctionnement et l’existence de l’association. La volonté est alors une condition de validité des décisions modificatrices des statuts (Section 1) et une condition de survie de l’acte (Section 2).
Section 1 / La volonté, condition de validité des décisions modificatrices des statuts : L’interdiction d’augmenter les engagements d’un sociétaire sans son consentement
24. Dans certains groupements, la Loi prévoit expressément que les engagements d’un membre ne peuvent être augmentés sans son consentement[38]. Rien de tel n’a été prévu pour l’association par la loi de 1901.
25. Dans un arrêt du 20 juin 2001[39], la Cour de cassation a étendu cette interdiction aux associations sur le fondement de l’art. 1134 du C. civ. (§1). Toutefois, elle aurait pu, pour aboutir à un résultat identique mais plus efficace, retenir comme fondement l’art. 1836 du C. civ. (§2)
§ 1)  Le fondement retenu : L’art. 1134 du Code civil
26. Dans cette affaire, les statuts de l’AFUL[40] Neuve Douane avaient été modifiés, entraînant notamment un changement du critère de répartition des dépenses de l’association. Mais cette nouvelle répartition s’étant révélée défavorable à un sociétaire (M. Colombero), ce dernier contesta en justice la validité de cette délibération qui aggravait son engagement. Les juges suprêmes saisis, par un arrêt de Cassation, rendirent au visa de l’art. 1134 du C. civ. l’attendu suivant :
« Qu’en statuant ainsi, sans constater que M. Colombero avait accepté la modification des statuts, alors que celle-ci aboutissait à une augmentation de ses engagements, la Cour d’appel a violé le texte susvisé »
27. S’il convient de relever le mérite de cette solution (A), révéler ses limites (B) semble inévitable.
A – Le mérite de la solution : L’association, contrat
28. En se fondant sur l’art. 1134[41] du C. civ. les juges suprêmes ne font qu’affirmer la nature contractuelle de l’association. C’est là le seul mérite de cette solution qui « privilégie l’association-contrat par rapport à l’association-institution »[42].
29. Si au sens de l’art. 1134 al 1er, le contrat est la loi des parties, cela signifie qu’il est d’une part la loi des parties seulement (1) et d’autre part la loi de toutes les parties (2).
1°) Le contrat d’association, loi des parties seulement
30. Il convient au préalable d’identifier quelles sont les parties au contrat d’association.
L’association naît d’un contrat passé entre les membres de l’association, mais elle est aussi un contrat passé entre l’association elle-même et chaque membre.
31. En tant que loi des parties uniquement, le contrat d’association ne peut faire l’objet d’une modification extérieure. Dès lors, seules les parties peuvent décider de la modification du contrat et un juge ne peut modifier lui-même le système de répartition des charges des sociétaires déterminé par les statuts[43].
32. Mais l’une des parties, notamment l’association peut-elle modifier unilatéralement le contrat ? Y répondre par la négative permettrait d’affirmer que l’association est aussi la loi de toutes les parties.
2°) Le contrat d’association, loi de toutes les parties
33. En se fondant comme elle l’a fait sur l’art. 1134 du C. civ. la Cour de Cassation reconnaît que l’association est la loi de toutes les parties. Dès lors, l’association ne peut modifier unilatéralement le contrat.
34. Les juges semblent affirmer qu’aucune modification ultérieure du contrat d’association ne saurait être décidée sans le consentement des membres concernés. Ce serait en effet, aller à l’encontre de leurs obligations contractuelles. C’est en fait la nature contractuelle de l’association qui ne permet pas à l’assemblée, sauf si elle statue à l’unanimité des membres, de modifier l’engagement de ceux-ci[44].
 35. Cela vaut-il dans tous les cas ? Ou uniquement lorsque la décision modificatrice vient augmenter les engagements initiaux des sociétaires ?
36. Il est permis de croire que cette solution vaudra pour toutes les modifications étant entendu que la nature contractuelle de l’association n’a jamais été véritablement contestée.
37. Cette solution est donc bien fondée en ce qu’elle affirme sans ambages la nature contractuelle de l’association. Cependant, elle semble limitée dans sa portée.
B – Les limites de la solution
38. Cette solution semble avoir une portée limitée, car au lieu de poser un principe de portée générale, elle fait référence aux statuts de l’association (1), alors que cette référence comporte un certain nombre de limites (2).

1°) la référence aux statuts
39. La loi de 1901 a certes accordé une grande liberté aux sociétaires en ce qui concerne leurs règles de fonctionnement. C’est un principe légal fortement réaffirmé, à tel point que la plupart des arrêts font toujours référence aux statuts et l’arrêt suscité n’échappe pas à cette règle. En l’espèce, « l’aggravation des charges des sociétaires n’était pas prévue parmi les décisions pouvant être prises à la majorité. La solution aurait-elle été la même si cela avait été le cas ?[45] ».
40. Cette question permet en réalité d’entrevoir les limites de cette référence aux statuts.
2°) Les limites de la référence aux statuts
41. Les juges suprêmes prennent le soin de faire expressément référence aux statuts sur la base de deux principes classiques du droit général de la cassation en matière de contrats.
Le premier édicte que « les statuts font la loi des parties et la liberté contractuelle laisse à celle-ci le soin de fixer comme elles l’entendent le contenu des statuts[46] ».
Le second énonce que « l’interprétation des statuts par les juges du fond est souveraine sauf dénaturation[47] ».
42. Ces principes, dont la justification ne fait l’objet d’aucun doute a pu conduire à des dérives dans les associations. Ainsi, dans un arrêt du 25 avril 1990[48], la Cour de Cassation a admis que les statuts d’une association votés dans des conditions régulières pouvaient priver de droit de vote certaines catégories de sociétaires.
43. Certes, il faut relativiser la portée de cet arrêt, car la Cour suprême ne s’est pas prononcée sur le principe du droit de vote mais sur la validité des clauses statutaires.
44. Mais on le voit tout de même, la restriction du droit de vote est encore plus grave que l’augmentation des engagements des membres. Et si la première est exclue, on ne saurait imaginer la seconde. Les deux vont de paire, d’où la nécessité d’affirmer avec force, comme principes communs à tous les groupements, le droit de vote mais aussi la règle de l’interdiction d’augmentation des engagements sans le consentement des membres.
45. En somme, pour les raisons exposées précédemment, la référence à l’art. 1134 du C. civ. ne permet pas d’assurer de façon pérenne et générale l’inviolabilité de la règle de l’intangibilité. En vertu de l’adage specialia generalibus derogant, il convient peut - être de souhaiter que les juges recourent de lege ferenda à l’art. 1836 du C. civ.
§ 2) Le fondement souhaitable : L’art. 1836 du Code civil
46. Aux termes de l’art. 1836 du C. civ.
 « Les statuts ne peuvent être modifiés, à défaut de clause contraire que par l’accord unanime des associés.
   En aucun cas, les engagements d’un associé ne peuvent être augmentés sans le consentement de celui-ci ».
 47. La transposition de l’art. 1836 du C. civ. aux associations est souhaitable dans la mesure où elle conduirait au même résultat[49] que celui de l’art. 1134 du C. civ., sans encourir les mêmes critiques. Il s’agit donc d’une transposition évidente (A) mais surtout efficace (B) pour l’affirmation de cette règle comme principe.
A – L’évidence de la transposition
48. Envisager comme évidente la transposition de cet article c’est reconnaître aux sociétaires comme aux associés une identité de situation face à une décision venant augmenter leurs engagements initiaux. En effet dans un cas comme dans l’autre on peut retrouver une décision modificatrice des statuts (1), entraînant une augmentation des engagements d’un ou plusieurs membres du groupement (2).
1°) La décision modificatrice des statuts
49. À l’instar des sociétés, la décision modificatrice des statuts d’une association relève de la compétence de l’assemblée générale extraordinaire. Le principe pour tous les groupements contractuels est l’unanimité à moins que les statuts ou la loi ne prévoient un autre mode de répartition.
Dans les deux cas on a donc un même organe, édictant une mesure identique : Une décision venant modifier les engagements initiaux des membres du groupement.
2°) L’augmentation des engagements des membres du groupement
50. Il semble intéressant, à ce stade du raisonnement de se demander en quoi consiste l’augmentation des engagements. En d’autres termes, à partir de quel moment un membre va-t-il considérer que son engagement a été augmenté ?
En droit des sociétés, l’examen de la jurisprudence permet d’envisager plusieurs situations pouvant aggraver les engagements des associés[50].
En droit des associations, dans l’arrêt du 20 juin 2001[51], l’augmentation des engagements consistait en un changement du critère de répartition des dépenses de l’association.
51. Mais quid des cotisations ?
La question ne manque pas d’intérêt dans la mesure où une partie de la doctrine a pu considérer que ces sommes ne pouvaient être considérées comme étant l’engagement des associés[52]. Et dès lors, on ne pouvait considérer que l’intangibilité des engagements puisse viser les hypothèses d’augmentation des engagements. Toutefois cela est contestable dans la mesure où les cotisations « restent le reflet de l’engagement des membres[53] ».
52. L’évidence de transposition de l’art. 1836 ne fait donc l’objet d’aucun doute car on le voit, dans l’association comme dans la société, les membres se retrouvent dans la même situation. Mais bien plus que l’évidence, c’est l’efficacité de cette transposition pour l’instauration du principe de l’intangibilité des engagements en droit des associations qu’il convient d’envisager.
B – L’efficacité de la transposition
53. Cette transposition serait, semble-t-il, pleinement efficace pour affirmer avec force la règle de l’interdiction comme principe commun. Pour ce faire il convient de se référer d’abord au droit des sociétés où elle est d’ordre public, la jurisprudence[54] considérant même qu’elle est sanctionnée de nullité absolue (1). Ensuite il sera envisagé les conséquences de son application aux associations (2).
1°) L’art. 1836 du Code civil en droit des sociétés
54. En droit des sociétés dans un arrêt du 13 novembre 2006[55] les juges ont accordé une valeur absolue à l’art. 1836 en décidant que : « Lorsque l’augmentation des engagements des associés ne procède pas de leur consentement unanime, l’associé ayant consenti à cette augmentation n’est pas de ce seul fait, dépourvu d’intérêt à agir en nullité car l’art. 1836, alinéa 2, du Code civil est une disposition d’ordre public sanctionnée de nullité absolue ».
55. En l’espèce, une action en nullité était dirigée contre une décision d’assemblée générale à laquelle il était reproché d’avoir augmenté les engagements des associés sans leur consentement unanime, il s’agissait alors de savoir si l’un des associés ayant consenti à la décision était recevable à agir. La Cour en recevant cette action, estime que la règle est d’ordre public et donc sanctionnée de nullité absolue.
56. Certes la solution est critiquable[56], mais elle reste tout de même intéressante car elle affirme sans équivoque que la règle de l’intangibilité des engagements est d’ordre public. Et en cela, son application aux associations pourrait entraîner un certain nombre de conséquences.
2°) Les conséquences de l’application de l’art. 1836 aux associations
57. Puisque l’art. 1836 est d’ordre public, il ne saurait y être dérogé conventionnellement. En l’appliquant aux associations les juges feraient rentrer une disposition impérieuse dans le droit des associations non sans quelques grincements de dents[57].
58. Au demeurant, cela permettrait peut être de lutter contre les dérives constatées dans les associations notamment en matière de droits politiques[58] des sociétaires, et d’injecter un peu de démocratie dans les associations. Il ne reste plus qu’à espérer que la jurisprudence fasse prochainement application de cette disposition aux associations.
59. La jurisprudence, on l’a vu, reconnaît que la volonté est une condition de validité des décisions modificatrices des statuts en appliquant la règle de l’intangibilité des engagements aux associations. Mais elle pourrait aller plus loin encore en transposant l’art. 1836 al. 2 qui est en droit des sociétés une disposition d’ordre public[59].
60. La jurisprudence, on le verra, reconnaît aussi que l’association est un acte volontaire, un groupement de personnes et en tant que tel, la volonté est également une condition de survie de l’acte.

Section 2 / La volonté, condition de survie de l’acte
61. C’est peut-être une vérité de Lapalisse que d’envisager la problématique de la dissolution volontaire de l’association. En effet, c’est un contrat auquel n’échappe pas le mutuus dissensus. C’est en tout cas ce que rappelle l’art. 1er et l’art. 9 de la loi de 1901.
62. Mais l’enjeu n’est pour autant pas inexistant. En effet, en l’absence de mutuus dissensus, est-il possible qu’un sociétaire qui ne désire plus poursuivre l’activité commune, sollicite en justice la dissolution du groupement ? Si oui n’est-ce pas un cas de solus dissensus homologué par le juge?
63. Alors qu’en droit des sociétés, il est admis depuis longtemps que la société ne peut survivre à une mésentente si elle est « de nature à paralyser son fonctionnement »[60] aucune disposition similaire n’existe dans la loi de 1901.
64. La jurisprudence a donc dû pallier cette carence en transposant la dissolution pour justes motifs de l’art. 1844-7-5 aux associations (§ 1). Au-delà, n’est-ce pas l’ensemble de l’art. 1844-7 qui est considéré comme un principe commun à tous les groupements ? Il convient donc d’analyser les probabilités de transposition des autres dispositions de l’art. 1844-7 du Code civil (§2).
§ 1) La transposition de la dissolution pour justes motifs
65. Le juge judiciaire peut prononcer la dissolution de l’association lorsque des « justes motifs » paralysent le fonctionnement de la société. La jurisprudence a d’abord été hostile à l’application de cette dissolution à des groupements à but non lucratif[61]. Ensuite, elle admit le principe de cette dissolution en se référant au droit des contrats et sans recourir au doit des sociétés (A). Aujourd’hui, elle semble considérer l’art. 1844-7-5 comme un principe commun de dissolution (B).
A – Le fondement contractuel
66. L’hésitation de la jurisprudence à appliquer l’art. 1844-7-5 aux associations pose la question du fondement contractuel de la dissolution pour justes motifs. Par deux arrêts[62], certes anciens, les juges ont estimé que la dissolution pour justes motifs était possible lorsqu’une des parties méconnaissait gravement ses obligations contractuelles (1) ou lorsqu’il ne régnait plus aucun esprit de confiance au sein de l’association (2).



1°) La méconnaissance des obligations contractuelles 
67. Dans un arrêt du 17 octobre 1973[63], la Cour de cassation prononça la dissolution d’une association en se fondant sur la méconnaissance par un sociétaire de ses obligations contractuelles. En l’espèce, un contrat d’association avait été conclu entre deux vétérinaires. Après deux années sans problèmes, l’un d’eux (M. Boïté) fit paraître une annonce indiquant qu’il recevrait désormais les clients et les appels à son domicile et non plus au siège social. L’autre (M. Lassourd) demanda alors aux juges de prononcer la rupture du contrat d’association et la condamnation de M. Boïté au paiement de dommages intérêts. La Cour d’appel saisie prononça la résolution du contrat aux torts de M. Boïté. Saisie par ce dernier, la Cour de cassation valide le raisonnement des premiers juges par un attendu qui mérite d’être repris :
« Attendu ensuite, qu’après avoir, par une interprétation […] du contrat […] considéré que la commune volonté des parties était de voir exercer la profession au siège social de l’association, les juges du second degré ont souverainement estimé que Boïté, en transférant son cabinet à son domicile particulier et en publiant un communiqué donnant à penser à la clientèle qu’il exerçait désormais seul la profession, avait eu un comportement justifiant la dissolution de l’association »
68. Cet arrêt permet de tirer deux enseignements :
-         La dissolution (ou la résolution du contrat) de l’association peut être prononcée lorsque la commune volonté des parties fait défaut.
-         Celle-ci fait notamment défaut lorsque l’un des sociétaires a méconnu ses obligations contractuelles.
69. De ces observations, il semble opportun de faire le rapprochement entre la dissolution pour justes motifs et la condition résolutoire de l’art. 1184 du C. civ. Qu’est-ce finalement que la dissolution pour justes motifs si ce n’est la transposition de la condition résolutoire[64] ?
En effet la condition résolutoire qui est sous entendue dans tous les contrats synallagmatiques, consiste pour une partie à solliciter en justice la résolution avec dommages et intérêts lorsque l’autre partie ne satisfait point son engagement. N’est-ce pas la même situation, lorsqu’un associé sollicite en justice la dissolution de la société pour inexécution par un autre de ses obligations contractuelles ?
70. Toutefois, l’application de l’art. 1184 exclut que les torts soient réciproques. Il faut alors dissoudre tout simplement le groupement sans dommages et intérêts. C’est notamment, le cas lorsque les sociétaires s’accusent réciproquement de détournement et ne se font plus confiance.
2°) La perte de confiance réciproque
71. Dans un arrêt du 10 mai 1978[65], deux médecins s’étaient constitués en association en vue de l’exploitation en commun d’un cabinet médical. S’accusant réciproquement de détournement, la Cour d’appel saisie refusera de prononcer la résolution de leurs contrats aux torts exclusifs de l’un d’eux en estimant  « qu’en se privant de l’affectio societatis qui devait présider à leurs rapports professionnels, les docteurs Sucrot et Gros ont commis vis-à-vis de l’autre les fautes qui légitiment la dissolution de l’association sans indemnité ». Les juges suprêmes ne feront que confirmer ce raisonnement.
72. En statuant ainsi ils fondent la dissolution pour justes motifs sur la perte de confiance réciproque qui constituait en l’espèce une privation de l’affectio societatis. La référence à cet « affectio », pour le cas d’une association, ne devrait pas surprendre pour deux raisons :
-         D’une part, l’affectio societatis n’est que la traduction latine du consentement que l’on retrouve dans tous les contrats
-         D’autre part, elle n’est donc pas propre aux sociétés, c’est dans ce sens que l’on parle souvent d’affectio associationis, consiacionis, collaborationis…
73. L’étude de cette jurisprudence ancienne a permis de révéler le fondement contractuel de la dissolution pour justes motifs. Mais la jurisprudence n’hésite plus comme par le passé à appliquer l’art. 1844-7-5 aux associations, article qu’elle considère comme un principe commun de dissolution des groupements de personnes.
B – L’art. 1844-7-5, principe commun de dissolution
74. Le raisonnement actuel de la Cour de cassation consiste à transposer l’art. 1844-7-5 du C. civ. aux associations. Par cette transposition, elle en fait un principe général relatif aux groupements de personnes. En revanche, elle subordonne son succès à deux conditions : le demandeur doit justifier de la qualité de membre (1) ; en outre il faut que la mésentente soit de nature à paralyser le fonctionnement de l’association (2).




1°) La qualité pour agir
75. Au sens de l’art. 1844-7-5 du C. civ. la dissolution pour justes motifs peut être prononcée « à la demande d’un associé ». Cette exigence a toujours été réaffirmée par la jurisprudence en droit des sociétés[66].
76. Quant aux associations, la jurisprudence n’est guère florissante. Toutefois, il convient de citer deux arrêts récents qui affirment cette exigence de qualité. Dans un arrêt du 24 septembre 2002[67], la Cour d’appel de Poitiers a rejeté la demande en dissolution d’un ancien sociétaire en estimant que ce dernier n’était pas « recevable à solliciter en justice la dissolution d’une association dont il a perdu la qualité de membre ».
Un autre arrêt du 13 mars 2007[68] est particulièrement intéressant. Dans cette affaire, Mme X avait fait par deux actes (le 4 mars 1974 et le 14 juin 1977) donation à une association d’un nombre important d’immeubles. L’acte prévoyait qu’en cas de dissolution de l’association, les biens devaient faire retour à la donatrice et à ses héritiers. Mme X décédée, ses deux filles demandèrent au tribunal de prononcer la dissolution de l’association pour illicéité de son objet et subsidiairement la nullité des apports pour défaut de conformité avec le but poursuivi : Elles furent déboutées. Vingt ans plus tard, elles ont assigné l’association pour obtenir sa dissolution au visa de l’art. 1844-7 du C.civ., faute de remplir l’objet pour lequel elle avait été constituée. La Cour d’appel saisie (Angers, 4 oct. 2005) prononça la dissolution de l’association. Celle-ci se pourvut alors en cassation sur la base d’une fausse application de l’art. 1844-7 qui ne peut résulter « d’une action des tiers » ou « d’une mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de ses membres ». Sur le défaut de qualité, la Cour estima qu’en tant que fin de non recevoir, elle aurait du être soulevée devant les juges du fond à peine d’irrecevabilité et a approuvé la Cour d’appel d’avoir relevé que l’association ne remplissait plus son objet et prononcer la dissolution.
77. On le voit, la jurisprudence, tend à affirmer comme en droit des sociétés que cette action n’est réservée qu’aux seuls membres du groupement. En plus de la qualité, il faut que le sociétaire démontre l’existence d’une mésentente grave, c'est-à-dire paralysant le fonctionnement de l’association.
2°) La gravité de la mésentente
78. Cette exigence de gravité de la mésentente ne fait l’objet d’aucune discussion en droit des sociétés. La société étant un groupement intéressé, la jurisprudence a toujours hésité à dissoudre une société économiquement viable, alors que ses membres n’arrivaient plus à s’entendre. C’est donc l’importance économique des sociétés qui justifie cette exigence[69]. D’ailleurs, l’appréciation de cette mésentente relève de l’appréciation souveraine des juges du fond[70]. Cela explique sans doute que la paralysie soit une exigence dont le contenu variable reste difficile à démontrer[71].
79. La vocation désintéressée de l’association étant d’ordre public, peut-on espérer que la mésentente pourra y trouver une application plus souple ? En d’autres termes le juge prononcera-t-il tout simplement la dissolution, dès lors que l’affectio associationis fera défaut ? Le doute est permis. Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner un attendu de l’arrêt du 24 septembre 2002 : « Attendu que si le défaut non de vie associative, mais d’affectio associationis peut entraîner la dissolution d’une association lorsque notamment ce défaut se manifeste par une mésentente entre associés de nature à paralyser le fonctionnement de l’association » […]
80. Comme en droit des sociétés, seule la mésentente grave, c'est-à-dire de nature à paralyser le fonctionnement de l’association, peut justifier la dissolution d’une association. Dès lors, la jurisprudence tend à affirmer la dissolution pour justes motifs comme un principe commun de dissolution des groupements de personnes.
81. Mais doit-on aller au-delà de la seule transposition de l’art. 1844-7-5 et considérer l’ensemble de l’art. 1844-7 comme un principe commun ? La réponse à cette question suppose d’examiner les probabilités de transposition de l’art. 1844-7.
§ 2) Les probabilités de transposition des autres dispositions de l’art. 1844-7 du Code civil
82. Il convient de distinguer les transpositions probables (A) de celles qui ne le sont pas (B).
A – Les transpositions probables
83. L’examen des dispositions qui va suivre permet de rendre compte de la nature contractuelle de l’association. Peuvent alors être transposées les causes de dissolution issues du droit commun des contrats (1) et celles résultant de la volonté des associés (2).


1°) Les causes de dissolution issues du droit commun des contrats
84. Au sens de l’art. 1844-7, la société prend fin par : l’expiration du temps pour lequel elle a été constituée (1°), par la réalisation ou extinction de son objet (2°), l’annulation du contrat de société (3°). Ces causes de dissolution relèvent en fait du droit commun des contrats ; ce n’est que la traduction des articles 1108 et 1134 du C. civ.
L’association étant un contrat, il ne fait aucun doute que ces dispositions peuvent lui être transposées. Il en va de même de celles résultant de la volonté des associés.
2°) Les causes de dissolution résultant de la volonté des associés
85. L’art. 1844-7 ajoute également en son 4°) que la société prend fin par dissolution anticipée décidée par les associés. Or, l’association, et cela vient d’être démontré, est un acte de volonté. Elle peut donc tout à fait prendre fin par décision unanime des sociétaires.
Toutefois, il est des dispositions dont la transposition semble improbable.
B – Les transpositions improbables 
86. Si la réunion de toutes les parts en une seule main n’est une cause de dissolution que dans les groupements intéressés (1), la jurisprudence a également dû exclure pour les associations la dissolution pour liquidation judiciaire (2).
1°) La réunion de toutes les parts sociales entre une seule main
87. Ce cas de dissolution est prévu à l’art. 1844-7-6. La réunion de toutes les parts en une seule main est une conséquence de la vocation aux bénéfices de la société. Elle ne saurait être transposée aux associations qui ne peuvent partager un bénéfice.
En revanche, une association peut parfaitement être mise en liquidation judiciaire.
2°) La dissolution pour liquidation judiciaire
88. Par un arrêt du 8 juillet 2003[72] la Cour de cassation a estimé qu’ « une association ne prenant pas fin par l’effet du jugement ordonnant la liquidation judiciaire, elle peut valablement, en vertu de son droit propre, interjeter un appel par l’intermédiaire de son président pourvu qu’elle le fasse contre le liquidateur ou en sa présence ».
89. Un auteur commentant cet arrêt a parfaitement démontré les bienfaits de ce refus jurisprudentiel de transposition d’une règle dont on ne voit guère à quel principe général elle peut être rattachée[73]. Tenant d’ailleurs compte des difficultés qu’a engendré l’application de cette disposition dans les sociétés[74], le législateur dans la réforme des procédures collectives[75] a autorisé le maintien exceptionnel de l’activité.


                                     


 Conclusion du Chapitre 1

90. Au terme de ce chapitre, il est permis d’affirmer que l’association est bien un acte de volonté. C’est en fait la conséquence de sa nature d’acte juridique puisque tous les actes juridiques sont des actes de volonté. Les manifestations de la volonté se rencontrent ainsi tout au long de la vie de l’acte et conditionnent même sa survie.
Toutefois, l’association est un acte juridique particulier en ce sens qu’il crée une organisation. 

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